TAS-CAS – Tribunale Arbitrale dello Sport – Corte arbitrale dello Sport (2009-2010)———-Tribunal Arbitral du Sport – Court of Arbitration for Sport (2009-2010) – official version by www.tas-cas.org Arbitrage TAS 2010/A/2045 Olympique Lyonnais c. UEFA & Fortuna Hjørring, sentence du 3 mai 2010
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Arbitrage TAS 2010/A/2045 Olympique Lyonnais c. UEFA & Fortuna Hjørring, sentence du
3 mai 2010
Formation: Me Romano Subiotto QC (Royaume-Uni), Président; Me Bernard Hanotiau (Belgique); Me Bernhard Welten (Suisse)
Football
Qualification d’un joueur
Protêt
Application aux joueurs amateurs des périodes d’enregistrement des joueurs professionnels Statut de joueur professionnel
Sanction non automatique de forfait
1. Le Règlement disciplinaire de l’UEFA et le Règlement de l’UEFA Women’s Champions
League (WCL) n’exigent pas de conditions de forme sur l’intitulé du protêt mais imposent des conditions sur son contenu. Dès lors, il est indifférent que la demande porte le nom de contestation officielle et ait la forme d’une question. L’existence d’une contestation écrite sur un ou plusieurs éléments mentionnés aux dispositions topiques du Règlement disciplinaire UEFA et du Règlement WCL suffit à emporter la qualification de protêt. Il n’est pas exigé pour la qualification de protêt que la contestation auprès de l’UEFA porte sur la qualification d’un joueur ayant une influence déterminante sur le résultat du match. Aux termes du Règlement disciplinaire UEFA et du Règlement WCL, la contestation portant sur l’absence de qualification d’un joueur est suffisante pour emporter la qualification de protêt.
2. L’application des règles internationales sur les périodes d’inscription à un joueur donné
ne dépend ni du statut du joueur concerné ni de la qualification de la compétition faite par les autorités nationales ou internationales. Aux termes du Règlement FIFA, la présence d’un seul joueur ayant les caractéristiques d’un joueur professionnel dans un championnat national qualifié d’amateur par l’autorité nationale suffit à emporter l’application à tous les joueurs participant à ce championnat, même aux joueurs amateurs jouant dans ce même championnat, des périodes d’inscription applicables aux joueurs professionnels pour déterminer si un joueur est qualifié au regard du règlement de la compétition concernée.
3. Le statut de joueur ou joueuse professionnel(le) repose sur l’appréciation d’un faisceau
d’indices, incluant en particulier l’existence d’un contrat écrit avec un club et le montant
des indemnités perçues par lui/elle. La participation à un championnat qualifié
d’amateur par l’association nationale n’est pas un élément pertinent au sens de l’Article
2 du Règlement FIFA. De même, il n’appartient pas à une fédération nationale de
décider si un statut particulier conféré à des joueurs ou joueuses suffit à les qualifier
d’amateurs au sens des règles de la FIFA, même s’il s’agit d’une “expérimentation” et
de la “première année d’application”.
4. Selon le Règlement disciplinaire UEFA, la déclaration de défaite par forfait est une
sanction disponible, et non automatique, en cas de présence d’un joueur non qualifié lors d’une rencontre. Dans sa décision, l’instance adjudicatrice doit dès lors prendre en compte les principes généraux de sanction tels qu’ils sont énoncés à l’article 17 du Règlement disciplinaire UEFA qui indique que la sanction doit être proportionnée aux “éléments objectifs et subjectifs constitutifs de l’infraction”.
L’Olympique Lyonnais Association (l’“Olympique Lyonnais”) est une association de droit français (loi du 1er juillet 1901), dont le siège est à Lyon, France, disposant d’une équipe féminine qui évolue dans le championnat de France, dans la Coupe de France et dans les compétitions européennes organisées par l’Union Européenne de Football Association.
L’Union Européenne de Football Association (UEFA) est une association de droit suisse, dont le
siège est à Nyon, Suisse. L’UEFA, qui regroupe les fédérations nationales d’Europe, a pour but de
traiter toutes les questions qui concernent le football européen. L’UEFA organise, conformément à
ses statuts (les “Statuts UEFA”) diverses compétitions européennes et notamment une compétition
féminine appelée UEFA Women’s Champions League (la “WCL”) régie par un règlement spécifique
(le “Règlement WCL”).
Le Club Fortuna Hjørring (“Fortuna Hjørring”) est un club de football danois, dont le siège est à Hjørring, Danemark, qui dispose d’une équipe féminine évoluant dans le championnat du Danemark et dans les compétitions européennes organisées par l’UEFA.
Le 27 octobre 2009, l’Olympique Lyonnais a inscrit Mesdames Christine Nilsen et Isabell Herlovsen (les “joueuses concernées”) auprès de l’UEFA afin de les placer sur la liste des joueuses pouvant disputer la WCL à compter du 31 octobre 2009.
Le 29 octobre 2009, les joueuses concernées ont été officiellement transférées du club norvégien Kolbotin Il à l’Olympique Lyonnais.
Le 5 novembre 2009, l’Olympique Lyonnais et Fortuna Hjørring ont disputé la rencontre aller comptant pour les huitièmes de finale de la WCL à Hjørring, Danemark. Les joueuses concernées ont pris part à la rencontre au sein de l’équipe de l’Olympique Lyonnais. L’Olympique Lyonnais a remporté cette rencontre sur le score d’un but à zéro.
Le 6 novembre 2009, la Fédération Danoise de Football a pris contact avec l’UEFA concernant la
qualification des joueuses concernées pour la rencontre du 5 novembre 2009 au regard de l’Article
16.01 du Règlement WCL sur la qualification des joueuses qui dispose:
“16.01 Une joueuse est qualifiée pour jouer dans la compétition si elle remplit toutes les conditions ci-après.
a) Elle est âgée de 16 ans à la fin de l’année civile au cours de laquelle le match est joué (limite d’âge inférieure). Par exemple: Une joueuse née entre le 1er janvier 1993 et le 31 décembre 1993 (inclus) est autorisée à jouer à tous les stades de la compétition. Une joueuse née entre le 1er janvier 1994 et le 31 décembre 1994 (inclus) est uniquement autorisée à jouer les matches disputés en 2010.
b) Elle est dûment inscrite auprès de l’association nationale concernée conformément à la réglementation de cette
dernière ainsi qu’aux dispositions de la FIFA, en particulier au Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs
de la FIFA.
c) Elle est uniquement qualifiée pour jouer pour un club affilié à l’association nationale concernée.
d) Elle est dûment inscrite auprès de l’UEFA par l’association nationale concernée conformément à l’alinéa
16.05”.
Le 9 novembre 2009, l’UEFA a confirmé que ces joueuses avaient été correctement inscrites auprès
de l’UEFA, à savoir que la liste des joueuses (W2) avait été complétée et les certificats de transferts
internationaux avaient été envoyés dans les délais prévus à l’Article 16.07 du Règlement WCL qui
dispose:
“A condition que l’association nationale du club confirme par écrit à l’UEFA dans tous les cas que les nouvelles joueuses sont qualifiées au niveau national, la liste de joueuses pour le tour de qualification, les seizièmes de finale, les huitièmes de finale et les quarts de finale peut être modifiée en tout temps au moyen du formulaire W2 jusqu’à la date suivante à 12h00 HEC:
a) le 28 juillet 2009 pour le tour de qualification;
b) le 28 septembre 2009 pour les seizièmes de finale;
c) le 2 novembre 2009 pour les huitièmes de finale;
d) le 8 mars 2010 pour les quarts de finale”.
Le 11 novembre 2009, la Fédération Danoise de Football a réitéré ses doutes concernant la qualification des joueuses concernées et plus précisément la date de transfert des joueuses et l’existence de contrats en cours avec le club norvégien Kolbotin Il. Cette demande a été portée à la connaissance de l’Olympique Lyonnais le 11 novembre 2009.
Le 12 novembre 2009, l’Olympique Lyonnais a vérifié auprès des services juridiques de la Fédération Française de Football (FFF) que les joueuses concernées étaient bien qualifiées. Cette vérification est confirmée par la déclaration du Directeur Général de la FFF en date du 4 février 2010.
Le 12 novembre 2009 à 18h00, l’Olympique Lyonnais et Fortuna Hjørring ont disputé la rencontre
retour comptant pour les huitièmes de finale de la WCL à Lyon, France. Madame Christine Nilsen a
pris part à l’intégralité de la rencontre en qualité de gardienne de but. Il n’est pas contesté par les
parties que Madame Christine Nilsen n’a été que très peu sollicitée, n’ayant eu à arrêter qu’un seul tir
cadré au cours de la rencontre. Madame Isabell Herlovsen a remplacé une autre joueuse de champ à
la 72ème minute du match, alors que le score était de trois buts à zéro en faveur de l’Olympique
Lyonnais. L’Olympique Lyonnais a remporté ce match contre Fortuna Hjørring, sur le score de cinq
buts à zéro et Madame Isabell Herlovsen n’a marqué aucun des deux derniers buts, marqués à la 81e minute et 83e minute respectivement. Madame Isabell Herlovsen n’a pas non plus fait de passe décisive à cette occasion.
A l’issue de la rencontre, l’arbitre, Madame Kateryna Monzul, a noté sur la feuille de match que Fortuna Hjørring avait protesté contre la qualification de deux joueuses de l’Olympique Lyonnais. Madame Kateryna Monzul a précisé avoir indiqué à Fortuna Hjørring que l’UEFA avait reçu les certificats de transferts de ces joueuses dans les délais impartis.
Le 13 novembre 2009, conformément au souhait mentionné à l’arbitre à l’issue de la rencontre du 12
novembre 2009, Fortuna Hjørring a adressé une contestation officielle auprès de l’instance de contrôle
et de discipline de l’UEFA concernant la qualification des joueuses concernées pour la rencontre du
12 novembre 2009. Fortuna Hjørring a fondé sa contestation sur le fait que les joueuses concernées ont été transférées à l’Olympique Lyonnais le 27 octobre 2009, soit en dehors de la période de mutation des joueurs professionnels en France, mais au cours de la période de mutation des joueurs amateurs en France. Dans sa contestation et en opposition avec l’objet de celle-ci, Fortuna Hjørring a indiqué une période de transfert erronée pour les championnats français, qui irait du 31 août 2009 au 4 janvier 2010. La Formation arbitrale souhaite rappeler que la période d’enregistrement des joueurs professionnels auprès de la FFF était du 9 juin 2009 au 31 août 2009 et du 4 janvier au 1er février 2010 sur la saison 2009-2010. La période d’enregistrement des joueurs amateurs auprès de la FFF lors de la même saison était du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2010.
Le 17 novembre 2009, l’instance disciplinaire et de contrôle de l’UEFA a rejeté la demande de Fortuna
Hjørring au motif que ce dernier n’avait pas fourni les preuves nécessaires pour démontrer le défaut
de qualification des joueuses concernées. L’instance disciplinaire et de contrôle de l’UEFA a également
retenu que les joueuses concernées ont été transférées en conformité avec la réglementation applicable
puisque la période de mutation des joueurs de football en France court du 31 août 2009 au 4 janvier
2010.
Le 20 novembre 2009, Fortuna Hjørring a fait appel de cette décision auprès de l’instance d’appel de
l’UEFA et a demandé que celle-ci reconnaisse l’absence de qualification des joueuses concernées pour
la rencontre du 12 novembre 2009, conformément à l’Article 16.01 du Règlement WCL qui fait
référence au Règlement FIFA du Statut et du Transfert des Joueurs (le “Règlement FIFA”). A titre de
sanction, Fortuna Hjørring a demandé à ce la rencontre du 12 novembre 2009 soit déclarée perdue
par l’Olympique Lyonnais par forfait trois buts à zéro. Selon Fortuna Hjørring, le transfert des
joueuses concernées à l’Olympique Lyonnais aurait dû être effectué au plus tard le 31 août 2009, date
de clôture de la première période de mutation des joueurs professionnels en France. L’erreur dans le
contenu de la contestation initiale déposée le 13 novembre 2009 serait à l’origine du rejet de l’instance
disciplinaire et de contrôle de l’UEFA. Cette demande d’appel a été complétée par un fax de la
Fédération Danoise de Football qui conteste également le statut d’amateur des deux joueuses
concernées.
Le 22 décembre 2009, l’Olympique Lyonnais a présenté ses commentaires sur l’appel présenté par
Fortuna Hjørring. L’Olympique Lyonnais a notamment soutenu que les joueuses étaient bien
qualifiées aux termes de l’Article 16.01 du Règlement WCL qui concerne notamment les conditions
d’inscription auprès de la FFF et de l’UEFA. Selon l’Olympique Lyonnais, la période de transfert applicable aux championnats professionnels en France ne trouverait à s’appliquer qu’aux championnats masculins de Ligue 1 et Ligue 2. Au contraire, le championnat de France féminin de D1 serait un championnat amateur auquel il conviendrait d’appliquer une période de transfert prolongée. A l’appui de son argumentation, l’Olympique Lyonnais fait référence à la lettre de la FFF du 9 novembre 2009 qui confirmait que les deux joueuses étaient bien inscrites auprès de la FFF conformément à l’Article 6 du Règlement FIFA qui dispose:
“1. Un joueur ne peut être enregistré qu’au cours de l’une des deux périodes annuelles d’enregistrement fixées à cette fin par l’association concernée. À titre exceptionnel, un professionnel dont le contrat a expiré avant la fin de la période d’enregistrement peut être enregistré en dehors de cette période d’enregistrement. Les associations sont autorisées à enregistrer ces professionnels à condition que l’intégrité sportive de la compétition concernée soit dûment prise en considération. En cas de résiliation de contrat pour juste cause, la FIFA peut prendre des mesures provisoires afin d’éviter tout abus et conformément à l’article 22.
2. La première période d’enregistrement commence à la fin de la saison et s’achève, en principe, avant le début de la nouvelle saison. Cette période ne doit pas excéder douze semaines. En principe, la deuxième période d’enregistrement doit se situer au milieu de la saison et ne doit pas excéder quatre semaines. Les deux périodes d’enregistrement pour la saison doivent être communiquées à la FIFA au moins douze mois avant leur entrée en vigueur. La FIFA détermine les dates lorsque les associations ne les communiquent pas à temps.
3. Un joueur ne peut être enregistré - hormis l’exception prévue à l’art. 6, al. 1 - que si le club soumet valablement une requête à l’association concernée au cours de la période d’enregistrement.
4. Les dispositions concernant les périodes d’enregistrement ne s’appliquent pas aux compétitions disputées seulement par des amateurs. Pour ces compétitions, l’association concernée fixe la période d’enregistrement des joueurs tout en prenant en compte l’intégrité sportive de la compétition en question”.
Enfin, l’Olympique Lyonnais indique que l’inscription des joueuses concernées auprès de l’UEFA avait été confirmée par cette dernière le 9 novembre 2009.
Le 8 janvier 2010, l’inspecteur disciplinaire de l’UEFA, Maître Jean-Samuel Leuba, également conseil de l’UEFA dans la présente procédure arbitrale, a formulé une demande complémentaire d’éléments auprès de la FIFA. Cette demande portait sur l’existence de certificats internationaux de transferts, la portée de ces éventuelles inscriptions sur la validité des transferts et le statut des joueuses concernées. La demande a été réitérée par l’UEFA auprès de la FIFA le 13 janvier 2010.
Le 14 janvier 2010, la FIFA a confirmé à l’UEFA que les certificats internationaux de transferts ont été reçus par la FIFA et que les inscriptions de joueurs ne sont valables que si les transferts ont été effectués dans les périodes indiquées par la FFF, soit du 9 juin au 31 août 2009 pour les joueurs professionnels et du 1 juin 2009 au 31 janvier 2010 pour les joueurs amateurs. La FIFA a également précisé l’interprétation de l’Article 2 (2) du Règlement FIFA qui dispose:
“Est réputé joueur professionnel tout joueur bénéficiant d’un contrat écrit avec un club et qui perçoit une indemnité supérieure au montant des frais effectifs qu’il encourt dans l’exercice de cette activité footballistique. Tous les autres joueurs sont réputés amateurs”.
Le 14 janvier 2010, la FFF a envoyé une lettre à l’UEFA pour confirmer la qualification des deux
joueuses concernées pour le championnat de France féminin de D1 et rappeler que le championnat
de France féminin est un championnat amateur. Par ailleurs, la FFF a précisé dans ce courrier les
modalités du statut de joueuse fédérale appliqué aux joueuses concernées. Ce statut, qui fut créé au
lancement de la saison 2009/2010 pour promouvoir le football féminin, repose sur un contrat écrit
entre la joueuse et le club, qui est homologué par la FFF. A la date du 14 janvier 2010, seules 35
joueuses sur 300 avaient signé un contrat de joueuse fédérale homologué par la FFF, dont les deux
joueuses concernées.
Le 15 janvier 2010, l’instance d’appel de l’UEFA a fait droit à l’appel de Fortuna Hjørring et a annulé
la décision de l’instance disciplinaire et de contrôle de l’UEFA du 13 novembre 2009, publiée le 17
novembre 2009. L’instance d’appel de l’UEFA a reconnu l’absence de qualification des joueuses
concernées aux termes de l’Article 16.01 (b) du Règlement WCL qui fait référence aux règles
nationales et internationales. L’instance d’appel de l’UEFA a, en conséquence, déclaré l’Olympique
Lyonnais perdant par forfait pour la rencontre du 12 novembre 2009. Selon l’Article 6 du Règlement
FIFA et pour l’application de l’Article 16.01 du Règlement WCL, les périodes de transfert des joueurs
professionnels auraient dû être appliquées dans le cas d’espèce dans la mesure où les joueuses
concernées devaient être considérées comme des joueuses professionnelles. Selon l’Article 16.12 du
Règlement WCL:
“Lors de la présentation des listes d’inscription des joueuses, l’association nationale et le club concernés doivent attester la validité de leur contenu et s’assurer que les dispositions susmentionnées ont été respectées”.
Il appartient donc à la FFF et à l’Olympique Lyonnais, et non à l’UEFA, de s’assurer de la conformité
des transferts avec l’Article 16.01 du Règlement WCL. Selon l’instance d’appel de l’UEFA, le seul fait
que l’Olympique Lyonnais ait respecté les règles d’inscription indiquées par la FFF ne suffirait pas à
l’exonérer de toute responsabilité. Par conséquent, puisqu’il aurait fallu appliquer aux joueuses
concernées les périodes d’inscription habituellement réservées aux championnats professionnels
français de Ligue 1 et de Ligue 2, les deux joueuses concernées n’auraient pas été qualifiées. La
sanction de déclaration de défaite par forfait serait justifiée par la négligence coupable de l’Olympique
Lyonnais et la FFF, les besoins d’un bon déroulement de la WCL, les besoins de l’égalité sportive et
l’effet dissuasif d’une telle sanction.
Le 25 janvier 2010, l’Olympique Lyonnais a déposé auprès du Tribunal Arbitral du Sport (TAS) une
déclaration d’appel à l’encontre de Fortuna Hjørring et de l’UEFA concernant la décision de l’instance
d’appel de l’UEFA du 15 janvier 2010. Afin de bénéficier d’une procédure accélérée, l’Olympique
Lyonnais considère que l’absence de suspension de la décision du 15 janvier 2010 aurait des
conséquences “irréversibles et fausserait irrémédiablement le jeu de la compétition au cas où le TAS réformerait
[ultérieurement] cette décision”. Dans le cas où la procédure accélérée était refusée, l’Olympique
Lyonnais a présenté une requête d’effet suspensif de la décision de l’instance d’appel de l’UEFA du
15 janvier 2010.
Par courrier du 28 janvier 2010, l’UEFA a non seulement accepté mais aussi requis l’application d’une procédure accélérée pour permettre que le dispositif de la sentence arbitrale du TAS puisse être communiqué aux parties au plus tard le 25 février 2010.
Le 29 janvier 2010, la Fédération Danoise de Football, au nom de Fortuna Hjørring, a indiqué être d’accord avec la mise en place d’une procédure accélérée.
Par courrier du 2 février 2010, le Greffe du TAS, avec l’accord des parties, a fixé les modalités de la procédure accélérée.
L’Olympique Lyonnais a déposé par la suite, le 4 février 2010, un mémoire d’appel à l’encontre de la décision de l’instance d’appel de l’UEFA.
Le 18 février 2010, l’UEFA a déposé un mémoire en réponse auprès du TAS.
Fortuna Hjørring n’a pas déposé de réponse. Toutefois, il est utile de préciser que, dans son courrier du 29 janvier 2010 précité, la Fédération Danoise de Football, au nom de Fortuna Hjørring, a indiqué qu’elle laisserait l’UEFA gérer la procédure comme il lui semble approprié (pour le choix d’un arbitre et de la langue de la procédure), et que l’UEFA fera le nécessaire pour défendre la décision de son instance d’appel du 15 janvier 2010.
Lors de l’audience de jugement qui s’est tenue à Lausanne, Suisse, le 23 février 2010, les parties ont
repris les arguments développés dans leurs écritures et maintenu leurs conclusions quant au fond.
A la suite de cette audience et aux termes de la procédure accélérée, le TAS a rendu et notifié aux parties, le 25 février 2010, le dispositif de la sentence arbitrale.
DROIT
La compétence du TAS
1. En vertu de l’Article R47 du Code de l’arbitrage en matière de sport, édition 2010 (le “Code”),
applicable à la présente procédure arbitrale, un appel contre une décision d’une fédération, d’une association ou d’un autre organisme sportif peut être déposé au TAS si les statuts ou règlements dudit organisme sportif le prévoient ou si les parties ont conclu une convention d’arbitrage particulière et dans la mesure où l’appelant a épuisé les voies de droit préalables dont il dispose en vertu des statuts ou règlements dudit organisme sportif.
2. En l’espèce, le Règlement WCL, qui concerne le déroulement de la WCL, prévoit dans son
Article 28.01:
“En cas de litige découlant du présent règlement ou en rapport avec celui-ci, les dispositions relatives au TAS figurant dans les Statuts de l’UEFA s’appliquent”.
3. Le Règlement WCL fait ainsi référence à l’Article 62 des Statuts UEFA qui dispose:
“Toute décision prise par un organe de l’UEFA peut être exclusivement contestée auprès du TAS en tant que tribunal arbitral d’appel, à l’exclusion de tout tribunal ordinaire ou de tout autre tribunal arbitral”.
4. L’Article 66 du Règlement disciplinaire UEFA réserve également la compétence du TAS
conformément aux Statuts UEFA:
“Les décisions de l’Instance d’appel sont définitives, sous réserve des dispositions statutaires relatives au Tribunal
Arbitral du Sport (T.A.S.). Elles sont exécutoires dès leur notification écrite”.
5. Enfin, l’Olympique Lyonnais et Fortuna Hjørring ont souscrit un engagement reconnaissant la
compétence du TAS telle que définie aux Articles 61 à 63 des Statuts UEFA.
6. En l’espèce, la déclaration d’appel de l’Olympique Lyonnais du 25 janvier 2010 est dirigée contre
la décision de l’instance d’appel de l’UEFA du 15 janvier 2010 infligeant une sanction
disciplinaire sportive à l’encontre de celui-ci sur le fondement du Règlement disciplinaire UEFA.
7. L’instance d’appel de l’UEFA a statué en dernière instance de sorte que la compétence du TAS
est acquise. Au surplus, il est possible de constater que les parties ont toutes deux admis cette compétence.
8. Partant, en vertu de l’Article R47 du Code et de l’Article 62 des Statuts de l’UEFA, le TAS est
compétent pour connaître du présent litige.
La recevabilité de l’appel
9. En vertu de l’Article 60 (3) des Statuts UEFA, le délai de recours au TAS est de 10 jours à
compter de la réception de la décision. En outre, seules peuvent recourir au TAS les parties directement touchées par une décision.
10. En l’espèce, ces deux conditions sont réalisées. L’UEFA a par ailleurs indiqué dans son mémoire
en réponse qu’elle ne contestait pas la recevabilité de l’appel interjeté par l’Olympique Lyonnais qui ne lui apparaissait pas irrecevable quant à la forme.
11. La déclaration d’appel satisfait également aux conditions de forme requises par l’Article R48 du
Code.
12. Par conséquent, l’appel est recevable.
Droit applicable
13. Conformément à l’Article R58 du Code:
“La Formation statue selon les règlements applicables et selon les règles de droit choisies par les parties ou à défaut de choix, selon le droit du pays dans lequel la fédération, association ou autre organisme sportif ayant rendu la décision attaquée a son domicile ou selon les règles de droit dont la Formation estime l’application appropriée. Dans ce dernier cas, la décision de la Formation doit être motivée”.
14. Dans le cas d’espèce, en sus des Statuts UEFA, les règlements applicables sont le Règlement
FIFA, le Règlement disciplinaire UEFA et le Règlement WCL.
15. Les parties ont expressément accepté de soumettre le litige à cette réglementation, celles-ci y
faisant toutes deux références dans leurs écritures.
16. Par ailleurs, l’UEFA ayant son siège à Nyon, Suisse, le droit suisse est applicable à titre supplétif
au fond du litige, en vertu de l’Article R58 du Code.
17. La présente procédure est au demeurant régie par les Articles R47 et suivants du Code.
Au fond
18. A titre liminaire, il est rappelé qu’en vertu de l’Article R57 du Code, le pouvoir d’examen du
TAS est complet. La formation du TAS revoit ainsi les faits et le droit avec un plein pouvoir.
A. La recevabilité du protêt
19. Selon l’Article 44.1 du Règlement Disciplinaire UEFA:
“[…] Un protêt est déposé dans le but de contester la validité du résultat d’un match. Il se fonde sur la qualification d’un joueur, sur la violation d’un règlement par l’arbitre ou sur tout autre incident majeur ayant eu une influence déterminante sur le résultat du match […]”.
20. Cette définition est reprise par l’Article 22.01 du Règlement WCL qui précise que:
“[…] Un protêt est déposé dans le but de contester la validité du résultat d’un match. Il se fonde sur la qualification d’une joueuse, sur la violation d’un règlement par l’arbitre ou sur tout autre incident majeur ayant eu une influence déterminante sur le résultat du match”.
21. L’Olympique Lyonnais soutient dans son mémoire d’appel que Fortuna Hjørring a posé une
question et non déposé un protêt et que la demande déposée par Fortuna Hjørring ne porterait pas sur la qualification d’une joueuse ayant eu une influence déterminante sur le résultat du match comme cela est exigé par l’Article 44.01 du Règlement Disciplinaire UEFA.
22. L’UEFA, dans son mémoire en réponse, soutient au contraire que Fortuna Hjørring aurait
entendu déposer un protêt et non uniquement poser une question comme cela est prouvé par la mention de cette intention dans la feuille de match établie par l’arbitre le 12 novembre 2009 ainsi que dans la demande formelle du 13 novembre 2009. En outre, le protêt n’a pas besoin de porter sur un événement ayant eu une influence déterminante, comme en témoigne la version anglaise de l’Article 44 (1) du Règlement disciplinaire UEFA (la version anglaise prime sur les autres versions aux termes de l’Article 4 alinéa 3 des Statuts UEFA et de l’Article 78 du Règlement disciplinaire UEFA)1.
23. Sur le premier point, l’Article 44 (1) du Règlement disciplinaire UEFA et l’Article 22.01 du
Règlement WCL n’exigent pas de conditions de forme sur l’intitulé du protêt mais imposent des conditions sur son contenu. Dès lors, il est indifférent que la demande de Fortuna Hjørring du 13 novembre 2009 porte le nom de contestation officielle et ait la forme d’une question. L’existence d’une contestation écrite de la part du Fortuna Hjørring sur un ou plusieurs éléments mentionnés aux Articles 44 (1) du Règlement disciplinaire UEFA et 22.01 du Règlement WCL suffit à emporter la qualification de protêt. Au surplus, l’Olympique Lyonnais, dans son mémoire d’appel, traduit le terme de “official contestation” par “protêt”.
24. Sur le second point, la version anglaise de l’Article 44 (1) du Règlement disciplinaire UEFA doit
s’imposer et, partant, il n’est pas exigé pour la qualification de protêt que la contestation auprès de l’UEFA porte sur la qualification d’un joueur ayant une influence déterminante sur le résultat du match. Aux termes des Articles 44.1 Règlement disciplinaire UEFA et 22.01 du Règlement WCL, la contestation portant sur l’absence de qualification d’un joueur est suffisante pour emporter la qualification de protêt.
25. Par conséquent, le protêt déposé par Fortuna Hjørring le 13 novembre 2009 est recevable.
B. La qualification des joueuses concernées
26. La décision attaquée retient que les joueuses concernées n’étaient pas qualifiées aux termes de
l’Article 16.01 (b) du Règlement WCL, qui concerne la validité des inscriptions auprès de
l’association nationale, la FFF en l’espèce, et de la FIFA. Or, selon l’Article 6 du Règlement
FIFA et pour l’application de l’Article 16 du Règlement WCL, le championnat de France
féminin ne serait pas un championnat amateur dans la mesure où il n’est pas disputé uniquement
par des amateurs mais également par des professionnels (y compris les deux joueuses
concernées). Selon l’instance d’appel de l’UEFA, l’inscription des joueuses concernées serait
conforme aux règles nationales, mais non pas aux règles internationales, en particulier à l’Article
6 (4) du Règlement FIFA qui impose des périodes de mutation restreintes pour les joueurs
professionnels. Aux termes de l’Article 16.12 du Règlement WCL, il appartenait à la FFF et à
l’Olympique Lyonnais de s’assurer de la conformité des inscriptions. Le seul fait que
l’Olympique Lyonnais ait respecté les règles d’inscription indiquées par la FFF ne suffit pas à
1 La version anglaise de l’Article 44(1) dispose que “[a] protest is directed against the validity of a match result. It is based on
a player’s eligibility to play, a decisive breach of the regulations by the referee, or any other major incident influencing the match result”.
l’exonérer de toute responsabilité. Par conséquent, la décision attaquée retient que les deux joueuses concernées n’étaient pas qualifiées.
27. Selon l’Olympique Lyonnais, les deux joueuses concernées auraient été transférées dans les
délais applicables en France aux joueurs amateurs et, par conséquent, auraient été qualifiées à disputer la rencontre du 12 novembre 2009 conformément aux Articles 6 du Règlement FIFA et 16.01 du Règlement WCL. Il ressortirait notamment de l’avis de la FFF du 14 janvier 2010 que le championnat de France féminin est un championnat amateur pour l’application de l’Article 16.01 (b) du Règlement WCL.
28. Au contraire, l’UEFA soutient dans son mémoire en réponse que les deux joueuses concernées
ont le statut de professionnelles aux termes de l’Article 2 du Règlement FIFA et que les règles
applicables aux joueurs professionnels de l’Article 6 du Règlement FIFA trouveraient à
s’appliquer aux joueuses concernées. L’UEFA en déduit dans son mémoire en réponse que,
puisque les périodes d’inscriptions pour les championnats professionnels n’ont pas été
respectées, les joueuses concernées n’étaient pas qualifiées pour disputer la rencontre du 12
novembre 2009.
29. Il n’est pas contesté par les parties que la validité du transfert d’un joueur est une condition
essentielle de la qualification d’un joueur pour une rencontre au sens du Règlement WCL, en particulier de l’Article 16.01. De même il n’est pas contesté par les parties que cette validité résulte en particulier de la validité de l’inscription auprès de l’association nationale, la FFF en l’espèce (Article 16.01 (b) du Règlement WCL), ainsi que de la validité de l’inscription auprès de l’UEFA (Article 16.01 (d) du Règlement WCL).
30. L’Article 16.01 (b) du Règlement WCL précise que l’inscription auprès de l’association nationale
doit être conforme “à la réglementation de cette dernière, ainsi que des dispositions de la FIFA, en particulier du [Règlement FIFA]”, ce qui comprend notamment l’Article 6 du Règlement FIFA sur les transferts de joueurs.
31. Il n’est pas contesté par les parties qu’il appartient aux clubs ainsi qu’aux associations nationales
de s’assurer du respect des règles relatives à la validité du transfert (Article 16.12 du Règlement WCL et TAS 2004/A/751).
32. L’Article 6 du Règlement FIFA, qui précise les modalités de transfert des joueurs applicables
par chaque association nationale, distingue selon les périodes d’inscription applicables aux compétitions disputées par au moins un joueur professionnel, qui sont fixées par chacune des fédérations nationales selon des règles d’encadrement strictes, et les périodes d’inscription applicables aux compétitions disputées seulement par des amateurs pour lesquelles des règles plus souples sont prévues.
33. L’application des règles internationales sur les périodes d’inscription à un joueur donné ne
dépend ni du statut du joueur concerné ni de la qualification de la compétition faite par les
autorités nationales ou internationales. Aux termes du Règlement FIFA, la présence d’un seul
joueur ayant les caractéristiques d’un joueur professionnel dans un championnat national
qualifié d’amateur par l’autorité nationale suffit à emporter l’application à tous les joueurs participant à ce championnat, même aux joueurs amateurs jouant dans ce même championnat, des périodes d’inscription applicables aux joueurs professionnels pour déterminer si un joueur est qualifié au regard du Règlement WCL.
34. Ainsi, selon le Règlement WCL, la fenêtre d’inscription auprès de la FFF réservée aux joueurs
professionnels s’applique au transfert de toutes les joueuses, même amatrices, qui jouent dans
la ligue féminine française. En application des règlements WCL et FIFA, les clubs prenant part
à la WCL se voient par conséquent appliquer différents critères pour la détermination de la
qualification de leurs joueuses selon que leur championnat national est composé uniquement
de joueuses amateurs ou d’au moins une joueuse ayant les caractéristiques de joueuse
professionnelle.
35. La Formation souhaite relever que l’application stricte du Règlement FIFA pour l’organisation
de la WCL aurait pour conséquence l’application de différentes fenêtres de recrutement à des
équipes participant à la même compétition, ce qui aurait pour effet de créer des inégalités entre
ces clubs, de s’opposer au développement d’une compétition composée principalement
d’amateurs et d’encourager des pratiques frauduleuses visant à déguiser les indemnités touchées
par les joueuses. Dans le cas où les fenêtres de transfert pour des joueuses amateurs et
professionnelles sont les mêmes - ce qui n’est pas le cas en France - le problème relevé ici
devient caduc.
36. Concernant la qualité des joueuses concernées, l’Article 2 du Règlement FIFA précise que:
“les joueurs participant au football organisé, sont soit amateurs, soit professionnels: est réputé joueur professionnel
tout joueur bénéficiant d’un contrat écrit avec un club et qui perçoit une indemnité supérieure aux montants des
frais effectifs qu’il encourt dans l’exercice de cette activité footballistique. Tous les autres joueurs sont réputés
amateurs”.
37. La qualification de joueuse professionnelle repose donc sur l’appréciation d’un faisceau
d’indices, incluant en particulier l’existence d’un contrat écrit avec un club et le montant des
indemnités perçues par elle. La participation à un championnat qualifié d’amateur par
l’association nationale n’est pas un élément pertinent au sens de l’Article 2 du Règlement FIFA.
Dans le cas d’espèce, l’instance d’appel de l’UEFA a valablement apprécié que les joueuses
concernées sont des professionnelles. A ce sujet, les caractéristiques attachées au statut de
joueuse fédérale constituent des indices pertinents de la qualité de joueuse professionnelle.
38. Par conséquent, la FFF et l’Olympique Lyonnais auraient dû respecter les périodes de mutation
applicables aux compétitions disputées par au moins un joueur professionnel lors de l’inscription des joueuses concernées auprès de la FFF. Il n’appartient pas à la FFF de décider si le statut de joueuse fédérale suffit à qualifier une joueuse d’amateur au sens des règles de la FIFA, même s’il s’agit d’une “expérimentation” et de la “première année d’application”.
39. Ainsi, les joueuses concernées, qui ont été transférées après le terme de la période de mutation
applicable aux compétitions disputées par au moins un joueur professionnel en France, n’étaient pas qualifiées pour participer à la rencontre WCL du 12 novembre 2009.
C. Sanction
40. Aux termes de la décision attaquée, l’instance d’appel de l’UEFA a décidé de sanctionner le fait
que deux joueuses non qualifiées aient participé à la rencontre du 12 novembre 2009 par une
déclaration de défaite par forfait appliquée à l’Olympique Lyonnais. L’instance d’appel de
l’UEFA précise que “aux fins du bon déroulement de la compétition, il est indispensable d’appliquer avec
toute la rigueur requise les dispositions relatives à la qualification des joueurs”. L’instance d’appel de l’UEFA
note également que “attribuer la victoire du match au Fortuna Hjørring était la sanction appropriée, tout en
gardant présent à l’esprit les circonstances particulières de l’affaire, à savoir l’irrégularité du match en question
du fait de la faute commise par l’un des clubs participants et sa fédération nationale. La sanction a, par ailleurs,
pour but de restaurer l’égalité sportive. La sanction disciplinaire imposée permet également d’atteindre les objectifs
fixés à savoir contraindre le club à adopter un autre comportement et éviter que de telles situations se
reproduisent”.
41. L’Olympique Lyonnais indique au contraire dans son mémoire d’appel que la déclaration de
défaite par forfait serait impropre comme non applicable aux faits, les deux joueuses concernées
ayant été irrégulièrement qualifiées et non pas “non qualifiées” comme cela est exigé par l’Article
14 bis du Règlement disciplinaire UEFA. L’Olympique Lyonnais précise également qu’il n’avait
pas connaissance de l’irrégularité de la qualification des deux joueuses concernées et n’a donc
commis ni faute ni négligence. Au contraire, l’Olympique Lyonnais indique que l’erreur provient
de la mauvaise interprétation par la FFF de la réglementation applicable au championnat de
France féminin et d’une mauvaise interprétation de l’UEFA qui aurait, à tort, confirmé avoir
dûment inscrit les deux joueuses. Enfin, l’Olympique Lyonnais demande une réduction de
sanction au regard du rôle limité des deux joueuses lors de la rencontre du 12 novembre 2009.
42. L’UEFA précise dans son mémoire en réponse que, contrairement à ce qu’indique l’Olympique
Lyonnais, il n’existerait aucune distinction entre des joueuses non qualifiées au sens de l’Article
14 bis du Règlement UEFA et des joueuses “irrégulièrement qualifiées”. Dès lors, la sanction de
déclaration de défaite par forfait aurait été applicable aux faits de l’espèce par l’instance d’appel
de l’UEFA. De plus, l’UEFA rappelle que l’Olympique Lyonnais aurait du “procéder à des
vérifications en profondeur”, puisqu’il appartenait à celui-ci ainsi qu’à la FFF de “s’assurer de la
qualification des joueuses”. Enfin, l’UEFA, qui rappelle que l’instance d’appel de cette organisation
dispose d’une certaine marge d’appréciation que le Tribunal Arbitral du Sport doit veiller à
respecter, souligne que des “règles relativement strictes sont pleinement justifiées” en l’espèce.
43. Comme précisé plus haut, l’Article 14 bis (4) du Règlement disciplinaire UEFA dispose que:
“[s]i un joueur non qualifié a participé à un match, la décision de forfait n’est prononcée que si l’équipe adverse
dépose protêt, à moins que le joueur en question n’ait été suspendu suite à une décision disciplinaire”. En
l’occurrence, l’Intimée a déposé protêt. Par ailleurs, l’instance d’appel de l’UEFA a valablement
retenu que les joueuses concernées n’étaient pas qualifiées. Elle pouvait donc en principe
appliquer la sanction de déclaration de défaite par forfait prévue à l’Article 14 (1) lit. g du
Règlement UEFA.
44. Toutefois, l’Article 17 (1) du Règlement disciplinaire de l’UEFA précise également que:
“L’instance disciplinaire détermine le type et l’étendue des mesures disciplinaires en vertu des éléments objectifs et subjectifs constitutifs de l’infraction. Elle tient compte d’éventuelles circonstances aggravantes ou atténuantes. Sous réserve de l’Article 6, alinéa 1 du présent règlement, aucune mesure disciplinaire ne peut être infligée si la partie en cause n’a commis aucune faute ou négligence”.
45. Il importe donc à la Formation de déterminer si l’Olympique Lyonnais a commis une faute ou
négligence et dans l’affirmative, si la sentence infligée par l’instance d’appel de l’UEFA est proportionnée à l’infraction commise.
46. L’Olympique Lyonnais allègue comme excuse la mauvaise interprétation par la FFF de la
réglementation applicable au championnat de France féminin de D1 et la confirmation de
l’inscription des joueuses concernées pour la rencontre du 12 novembre 2009. La Formation
estime néanmoins que ces éléments ne sauraient exempter l’Olympique Lyonnais de toute
sanction puisqu’il lui appartenait également de vérifier la validité de l’inscription des joueuses
concernées auprès de la FFF, conformément à l’Article 16.12 du Règlement WCL. L’absence
d’une telle vérification est constitutive en droit de négligence de la part de l’Olympique
Lyonnais, même si à aucun moment il n’a pu croire que les joueuses concernées n’étaient pas
qualifiées.
47. L’Olympique Lyonnais allègue également la prétendue erreur de l’UEFA qui a confirmé que les
joueuses concernées étaient inscrites auprès d’elle le 9 novembre 2009. Cette confirmation ne
permet pas davantage d’exonérer l’Olympique Lyonnais de sa responsabilité puisqu’elle porte
sur une autre condition de la qualification d’une joueuse: l’inscription auprès de l’UEFA (Article
16.01 (d) du Règlement WCL).
48. L’Olympique Lyonnais a donc commis une négligence et l’instance d’appel de l’UEFA avait
donc la possibilité de la sanctionner et le cas échéant de lui imposer la sanction de déclaration de défaite par forfait.
49. L’instance d’appel de l’UEFA précise dans sa décision du 15 janvier 2010 qu’elle dispose d’une
“certaine marge d’appréciation [dans le choix de la sanction] que le Tribunal Arbitral du Sport doit veiller
à respecter”. Cette marge d’appréciation est effectivement conforme à la version anglaise de
l’Article 14 bis (4) du Règlement disciplinaire UEFA qui précise que “A default result may be
awarded against a team that fields an ineligible player […]” (soulignement ajouté). Cette distinction
entre une sanction disponible et une sanction automatique apparaît de manière plus claire que
dans la version française du Règlement disciplinaire UEFA qui indique: “[s]i un joueur non qualifié
a participé à un match, la décision de forfait n’est prononcée que si l’équipe adverse dépose protêt […]”. Comme
la version anglaise du Règlement disciplinaire UEFA a valeur de référence en cas de conflit, il
faut en déduire que la déclaration de défaite par forfait est bien une sanction disponible, et non
automatique (contrairement à la pratique de l’instance d’appel de l’UEFA), en cas de présence
d’un joueur non qualifié lors d’une rencontre.
50. La seule question qui reste donc à trancher par la Formation est de savoir si dans sa décision,
l’instance d’appel de l’UEFA a pris en compte les principes généraux de sanction tels qu’ils sont
énoncés à l’Article 17 du Règlement disciplinaire UEFA qui indique que la sanction doit être proportionnée aux “éléments objectifs et subjectifs constitutifs de l’infraction”.
51. La Formation estime que ce n’est pas le cas. Elle considère que l’instance d’appel de l’UEFA
aurait ainsi dû constater que l’Olympique Lyonnais, qui a demandé à l’UEFA et à la FFF de
confirmer la validité de l’inscription des joueuses concernées avant la rencontre du 12 novembre
2009 (les 9 et 11 novembre 2009), pouvait légitimement croire que les joueuses concernées
étaient qualifiées. La décision de l’Olympique Lyonnais de faire jouer les joueuses concernées
n’était incontestablement pas intentionnelle. Ceci se confirme par le fait que l’Olympique
Lyonnais a choisi de faire entrer sur le terrain une des deux joueuses concernées, Madame Isabell
Herlovsen, à la 72e minute de la rencontre alors que l’Olympique Lyonnais menait déjà par trois
buts à zéro. L’Olympique Lyonnais, qui avait été informé le 11 novembre 2009, jour férié et
veille de la rencontre avec la Fortuna Hjørring, de la volonté de Fortuna Hjørring de déposer
un protêt, a été tout au plus négligente - mais certainement pas fautive - dans son interprétation
non rigoureuse de la réglementation internationale applicable au transfert des joueuses
concernées.
52. L’instance d’appel de l’UEFA aurait également dû constater qu’il n’existe aucun précédent qui
aurait pu permettre à l’Olympique Lyonnais d’établir avec certitude que l’inscription des joueuses concernées était soumise aux périodes de mutation habituellement réservées aux championnats professionnels de Ligue 1 et Ligue 2. Au contraire, de telles règles résulteraient d’une réglementation internationale qui, appliquée au niveau local, crée des inégalités entre les clubs de football féminin participant à la WCL.
53. En l’absence de prise en compte, conformément à l’Article 17 (1) du Règlement disciplinaire
UEFA - des circonstances atténuantes évoquées ci-avant, la Formation estime que la sanction de déclaration de défaite par forfait imposée par l’instance d’appel UEFA apparaît comme disproportionnée au regard des faits de l’espèce. Et statuant à nouveau, la Formation estime que même s’il y a eu négligence de l’Olympique Lyonnais eu égard à ses obligations de vérification, la conclusion que les joueuses étaient qualifiées est aisément compréhensible, au regard du caractère très peu clair, voire contradictoire, des dispositions applicables à la qualification des joueurs et aux représentations qui lui avaient faites par la FFF et l’UEFA. Elle estime dès lors qu’une sanction à l’égard de l’Olympique Lyonnais ne s’impose pas et même, que l’imposition d’une telle sanction serait totalement inéquitable.
54. Dès lors, la Formation, réformant toutes ses dispositions à la décision rendue le 15 janvier 2010
par l’instance d’appel de l’UEFA et statuant à nouveau, dit qu’il n’y a pas lieu à sanction à
l’encontre de l’Olympique Lyonnais. Partant, la Formation confirme le résultat du match du 12
novembre 2009 acquis par l’Olympique Lyonnais contre le club de Fortuna Hjørring par un
score de 5-0.
Le Tribunal Arbitral du Sport prononce:
1. Déclare l’appel de l’Olympique Lyonnais recevable et partiellement fondé;
2. Réforme la décision prise le 15 janvier 2010 par l’instance d’appel de l’Union Européenne de
Football Association;
3. Dit qu’il n’y a pas lieu à sanction à l’encontre de l’Olympique Lyonnais;
4. En conséquence, confirme le résultat du match du 12 novembre 2009 acquis par l’Olympique
Lyonnais contre Fortuna Hjørring sur un score de 5-0;
(…)
7. Rejette toutes autres ou plus amples conclusions des parties.
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