TAS-CAS – Tribunale Arbitrale dello Sport – Corte arbitrale dello Sport (2010-2011)———-Tribunal Arbitral du Sport – Court of Arbitration for Sport (2010-2011) – official version by www.tas-cas.org Arbitrage TAS 2010/A/2104 SASP Le Havre Athletic Club & Association Le Havre Athletic Club c. Fédération Internationale de Football Association (FIFA), Matthias Lepiller & Fiorentina AC, sentence du 15 février 2011

TAS-CAS - Tribunale Arbitrale dello Sport - Corte arbitrale dello Sport (2010-2011)----------Tribunal Arbitral du Sport - Court of Arbitration for Sport (2010-2011) - official version by www.tas-cas.org Arbitrage TAS 2010/A/2104 SASP Le Havre Athletic Club & Association Le Havre Athletic Club c. Fédération Internationale de Football Association (FIFA), Matthias Lepiller & Fiorentina AC, sentence du 15 février 2011 Formation: Me Dirk-Reiner Martens (Allemagne), Président; Me Olivier Carrard (Suisse); Me José Juan Pinto (Espagne) Football Fin des rapports contractuels entre un joueur et son club et indemnité de formation Pouvoir d'examen du TAS Légitimation active Portée de l'article 17 RSTJ Convention de formation Rapports entre convention de formation et contrat de joueur en formation “Contrat plan de carrière” visant la conclusion ultérieure d'un contrat non-amateur 1. L’article R57 du Code de l'arbitrage en matière de sport octroie au TAS un pouvoir d'appréciation complet en fait et en droit dans le cadre de l’instruction de la cause. Malgré ce plein pouvoir d’examen, le TAS ne peut que juger le différend tel qu’il est défini par la décision contestée et sa compétence est limitée par la portée objective et subjective de cette même décision. 2. En vertu de la loi française, un club de football au niveau professionnel est constitué d’une association sportive et d’une société anonyme sportive professionnelle. Ces deux structures sont liées par une convention et constituent conjointement un groupement sportif. En vertu de cette solidarité complète, les deux entités juridiques ont toutes deux la légitimation active. 3. Il résulte sans aucune équivoque du texte du RSTJ (2005) que l’article 17 ne peut s’appliquer qu’à la violation d’un contrat écrit prévoyant une rémunération supérieure aux frais encourus par le joueur. Cette portée limitée de l’article 17 RSTJ est en phase avec le but même du système de règlement des litiges de la FIFA, à savoir s’assurer du respect des contrats de travail conclus avec des joueurs professionnels durant la validité de ces accords, plutôt que de lier ces mêmes joueurs à leur club au-delà de cette validité. Cette “interprétation” ne contrevient nullement au principe pacta sunt servanda. En effet, elle ne confère pas un blanc-seing à la partie qui ne respecterait pas un contrat autre que celui visé par l’article 2 RSTJ, mais exclut in casu les litiges liés à de telles violations de la compétence de la FIFA. 4. Pour qu'une convention de formation constitue un contrat de nature professionnelle, elle doit être passée par écrit et il doit être établi que le joueur perçoit, sur la base de ce document, une indemnité supérieure à ses frais effectifs. Si tel n'est pas le cas, la convention de formation ne constitue pas un contrat de nature professionnelle et une éventuelle violation des obligations en découlant (directement ou indirectement) ne saurait être sanctionnée par l’article 17 RSTJ. 5. Il ressort de l’ensemble du dispositif prévu par la règlementation française qu’en France, la formation d'un footballeur est susceptible d’être l’objet de deux contrats, parallèles et simultanés, et distincts par leur nature et leur objet. Si la signature d’un contrat de joueur en formation implique nécessairement la conclusion simultanée d’une convention de formation, l’inverse n’est pas vrai. La convention de formation peut donc continuer à exister pour elle-même alors même que le contrat de joueur en formation a pris fin. 6. Reconnaître force de loi à un “contrat plan de carrière” par lequel un joueur mineur s’engage à signer ultérieurement un contrat non-amateur pour une durée supérieure à trois ans reviendrait à permettre de contourner les règles de la FIFA qui interdisent la conclusion d'un tel contrat par un joueur qui n'a pas 18 ans révolus. Un tel “contrat plan de carrière” doit être déclaré nul. L’Association Le Havre Athletic Club (“l’Association HAC”) est un club de football affilié à la Fédération Française de Football (FFF) et ayant pour but de former et d’encadrer les jeunes joueurs par le biais d’un centre de formation créé en 1984. La SASP Le Havre Athletic Club (“la SASP HAC”) est une société anonyme sportive professionnelle de droit français qui émane de l’Association HAC et dont le but est de gérer la carrière des joueurs de cette association, notamment par la conclusion de contrats sportifs. La SASP HAC et l’Association HAC sont liées entre elles par une convention et constituent conjointement un groupement sportif reconnu par la FFF (“le HAC”). Matthias Lepiller est un joueur de football de nationalité française, né le 12 juin 1988, ayant grandi dans la région du Havre et ayant ainsi évolué au sein de la SASP HAC dès son plus jeune âge. Son passeport FIFA indique qu’il a bénéficié d’une licence de joueur amateur dès la saison 1999-2000, soit dès sa douzième année. Selon la SASP HAC, il aurait débuté le football au sein de ce club dès l’âge de huit ans déjà. La Fédération Internationale de Football Association (FIFA) est l’instance dirigeante du football au niveau mondial. L’Associazione Calcio Fiorentina (“l’ACF”) est un club de football italien créé en 1926 et évoluant en série A. Le 5 avril 2003, Matthias Lepiller et l’Association HAC ont signé une “convention de formation” laquelle a été homologuée par la Ligue de Football Professionnelle française (LFP) le 8 avril 2003. Cette convention, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 2003, a été conclue pour une durée initiale de trois ans et arrivait donc à échéance le 30 juin 2006. En son article 12.1, elle prévoyait que “[c]onformément aux dispositions de l’article 15-4 de la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée et aux dispositions de la Charte du football professionnelle, à l’issue de la formation, si le bénéficiaire entend exercer à titre professionnel l’activité de joueur de football, il est dans l’obligation de conclure, avec la société du club, un contrat de travail à durée déterminée de joueur de football visé par l’article L. 122-1-1 (3°) du code du travail”. Le 25 août 2003, ces mêmes parties ont signé un “contrat de joueur aspirant”, lequel a été homologué par la LFP le 18 septembre 2003. Ce contrat, qui est entré en vigueur le 1er juillet 2003, a été conclu pour une durée de trois saisons et arrivait donc à échéance le 30 juin 2006. Ce type de contrats est destiné aux jeunes joueurs qui s’entraînent dans un centre de formation et pour lesquels il est usuel, mais non obligatoire, de conclure un contrat dit “de joueur en formation” en parallèle à leur convention de formation. Le 15 septembre 2004, ces mêmes parties ont conclu un avenant ayant pour but la prolongation du “contrat de joueur aspirant” jusqu’au 30 juin 2009. Par une décision du 28 septembre 2004, la commission juridique de la LFP a toutefois refusé d’homologuer cet avenant au motif qu’il représentait l’établissement d’un lien contractuel entre le joueur et son club d’une durée supérieure a trois ans, ce qui constituait une violation des règles de la FIFA relatives à l’interdiction d’engagement contractuel excessif par des joueurs de moins de 18 ans. Le 29 septembre 2004, la SASP HAC et Matthias Lepiller ont signé un “contrat plan de carrière”. Dans le cadre de ce dernier, Matthias Lepiller a bénéficié de prêts à partir de mars 2005. Les parents du joueur, encore mineur à cette période, ont également apposé leur signature sur la “convention de formation”, le “contrat de joueur aspirant” et le “contrat plan de carrière”. Ce dernier contrat fait expressément référence au refus d’homologation, par la commission juridique de la LFP, de l’avenant au “contrat de joueur aspirant”. Son article 2 stipule ainsi que “les parties décident de transformer en contrat, ferme, définitif et irrévocable, les dispositions actées à l’avenant au “contrat de joueur aspirant” sus-indiquées et reprises ci-après”. Aux termes de son article 3, “les parties conviennent, de manière ferme, définitive et irrévocable de signer entre elles un contrat de “Joueur Elite” prenant effet et application dans les formes prévues par la Charte du Football Professionnel, soit pour une durée de 5 ans commençant le 1er juillet 2006 pour s’achever le 30 juin 2011. Le Club s’engage à verser au Joueur, pendant la durée dudit contrat, un salaire mensuel fixe brut correspondant à 190 points pour la première saison (…)”. Ce nombre de 190 points correspond à un salaire d’environ 2’500 € par mois, versé au joueur et faisant l’objet de bulletins de salaire, lesquels sont soumis au contrôle de la Commission de gestion des clubs de football français. L’article 4 du “contrat plan de carrière” stipule que ce dernier “annule et remplace tous les accords de toutes natures et les dispositions convenues antérieurement”. Le 11 décembre 2004, les parties ont signé un avenant à la convention de formation, homologué par la LFP le 5 janvier 2005 et prévoyant sa prolongation jusqu’au 30 juin 2008. Selon les appelantes, Matthias Lepiller se serait rendu à Florence du 14 au 15 mars 2006, afin d’y rencontrer des représentants de l’ACF. Le 4 avril 2006, le Président du Directoire du HAC a adressé un courrier à l’agent de Matthias Lepiller afin de prendre note de l’accord que celui-ci lui avait donné sur les conditions fixées par le contrat “plan de carrière” conclu en 2004 et précisant que, bien que demeurant dans le cursus de formation durant les deux premières saisons du “contrat de joueur élite”, Matthias Lepiller s’entrainerait avec “le groupe professionnel”. Le 11 avril 2006, le HAC a adressé à Matthias Lepiller et à ses parents une proposition de “contrat de joueur élite”, en application de l’article 261 de la Charte du Football Professionnel (CFP), selon lequel: “à l’expiration normale du contrat apprenti et aspirant, le club est en droit d’exiger de l’autre partie la signature d’un nouveau contrat de joueur stagiaire élite ou professionnel”. Cette proposition portait sur la signature d’un “contrat de joueur élite” d’une durée de cinq saisons. Le 24 avril 2006, le Président du Directoire du HAC a adressé un courrier au joueur en ces termes: “faisant suite à nos différents entretiens et à nos précédentes correspondances, ainsi qu’au courrier adressé à votre agent, (…), je vous confirme ma proposition de signature d’un “contrat de joueur élite” à compter du 1er juillet 2006 et précise ci-après les conditions financières afférentes à cette proposition”. Cette lettre portait la mention manuscrite “reçue en main propre le 26.04.06” apposée par le joueur. Le 26 avril 2006, un nouveau courrier a été adressé au joueur et indiquait ce qui suit: “ce faisant, et en complément de la proposition du 24 avril, je vous confirme que nous accédons à vos demandes salariales formulées dans votre copie du 7 mars dernier et modifions ainsi notre proposition du 24 avril (…)”. Par ce courrier, le HAC offrait des conditions salariales supérieures à celles mentionnées dans son courrier du 24 avril précédent. Ce courrier portait également la mention “reçue en main propre le 26.04.06” apposée par Matthias Lepiller Le 29 avril 2006, une lettre portant le nom, mais, selon les appelantes, pas la signature de Matthias Lepiller a été adressée par courrier recommandé avec accusé de réception au Président du HAC. Ce document indiquait que Matthias Lepiller entendait mettre un terme à la convention de formation le liant au club jusqu’au 30 juin 2008, ceci avec effet au 30 juin 2006. Le 30 avril 2006, les parents de l’intéressé ont, selon la seconde intimée, adressé un courrier au HAC afin de valider, en leur qualité de représentants légaux, la résiliation de la convention de formation par leur fils. Le 5 mai 2006, le Président du Directoire du HAC a adressé un nouveau courrier à l’agent du joueur afin de l’informer qu’il acceptait les nouvelles exigences d’augmentation salariales émises par ce dernier. Le 12 mai 2006, le HAC a reçu un courrier de l’ACF, daté du 4 mai 2006, réfutant la participation de Matthias Lepiller à des entraînements avec l’ACF, mais précisant que ce club souhaitait contacter le joueur dès lors que son contrat avec le HAC arrivait à échéance le 30 juin 2006. Le 24 mai 2006, le HAC a adressé une réponse à l’ACF dans laquelle il précisait que son joueur n’était pas libre au 30 juin 2006, mais qu’il était, au contraire, lié par un engagement contractuel allant au-delà de cette date. Le 2 juin 2006, le HAC a adressé un courrier à Matthias Lepiller: “Devant l’absence de refus de votre part, nous considérons, conformément à l’ensemble de nos accords antérieurs, que vous avez l’intention de donner bonne suite à notre proposition”. Le 22 juin 2006, Matthias Lepiller ne s’est pas présenté à la reprise de l’entrainement à laquelle il avait été convoqué par le HAC par courrier du 29 mai précédent. Le 22 juin 2006, la FFF, interpellée par la Fédération Italienne de Football (“la FIF”) indiquait à celleci que le joueur était sous contrat de formation jusqu’au 30 juin 2008 et sous “contrat de joueur aspirant” jusqu’au 30 juin 2006 avec le club HAC. Par décision du 18 juillet 2006, la Commission juridique de la LFP a considéré que Matthias Lepiller n’avait pas apporté la preuve de la résiliation de sa convention de formation et qu’il était donc lié au HAC par celle-ci jusqu’au 30 juin 2008. Cette décision a été confirmée le 25 juillet 2006 par la Commission juridique de la FFF, qui a refusé la délivrance du certificat international de transfert sollicité par la FIF. Le 4 septembre 2006, l’ACF a saisi la FIFA en requérant la délivrance du certificat international de transfert et l’autorisation d’enregistrer provisoirement Matthias Lepiller auprès de la FIF. Le 29 septembre 2006, le juge unique de la Commission du Statut du Joueur de la FIFA a rendu une décision autorisant cet enregistrement provisoire auprès de l’ACF avec effet immédiat. Le 29 janvier 2007, le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) a rejeté la requête d’effet suspensif déposée par le HAC, tout en précisant que “le droit du joueur de jouer avec le club de son choix ne le libère pas de son obligation d’indemniser, le cas échéant, son ancien club en cas de rupture de contrat. Le joueur s’expose au demeurant aux mesures disciplinaires prévues par la réglementation de la FIFA en pareille circonstances”. Le 15 février 2007, le HAC a retiré sa procédure devant le TAS, tout en se réservant d’agir au fond pour obtenir réparation du préjudice subi. Le 26 octobre 2007, le HAC a entamé une procédure devant la Chambre de Résolution des Litiges de la FIFA (la “CRL”) en réparation des préjudices d’ordre contractuel subis. Par décision du 16 juillet 2009, notifiée aux parties dans son intégralité le 6 avril 2010, la CRL a réfuté l’existence d’un contrat de travail entre le HAC et Matthias Lepiller au 1er juillet 2006 et, par conséquent, a rejeté l’application à ce cas de l’article 17 du Règlement FIFA sur le Statut et le Transfert des Joueurs (le “RSTJ”). La CRL a en revanche reconnu le droit du HAC à une indemnité de formation. Le 26 avril 2010, la SASP HAC et l’Association HAC ont conjointement déposé une déclaration d’appel à l’encontre de la décision prise le 16 juillet 2009 par la CRL. Le 6 mai 2010, les appelantes ont déposé un mémoire d’appel. Le 29 juillet 2010, la FIFA a déposé un mémoire de réponse. Le 3 août 2010, l’ACF a déposé un mémoire de réponse. Matthias Lepiller n’a déposé aucune écriture. Hormis Matthias Lepiller, les parties ont toutes signé, par l’intermédiaire de leur conseil, l’ordonnance de procédure émise par le TAS le 2 septembre 2010. Une audience a été tenue au TAS le 29 septembre 2010. La SASP HAC et l’Association HAC y étaient représentées par Me Benjamin Delaunay, accompagné du Directeur du HAC, Monsieur Alain Belsoeur; la FIFA y était représentée par Me Mariana Jönsson et l’ACF par Me Gianpaolo Monteneri. Durant les débats, les appelantes ont produit deux pièces complémentaires, soit un arrêt rendu le 27 juillet 2010 par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence portant sur un litige opposant la SASP Olympique de Marseille à l’un de ses joueurs professionnels, d’une part, et le procès-verbal daté du 11 janvier 2007 émanant de la “Sous-commission joueurs” de la Commission nationale paritaire de la “Convention collective nationale des métiers du football” (CCNMF), d’autre part. Dans la mesure où ces deux documents complémentaires sont en consultation libre sur internet et qu’il ne s’agit donc pas de documents auxquels il serait impossible d’avoir accès sans leur production par l’une des parties, la Formation a décidé d’accepter qu’ils soient versés au dossier, malgré l’opposition des intimées, ceci conformément au pouvoir d’examen complet en fait et en droit qui lui est conféré à l’article R57 du Code TAS, ainsi qu’à l’exception prévue à l’article R56. La Formation a siégé dans la composition sus-indiquée et les parties n’ont formulé aucune remarque quant à cette composition ou au déroulement de l’audience. En outre, chacune des parties a pu s’exprimer, à sa convenance, en français ou en anglais. DROIT Compétence du TAS 1. Aux termes de l’article R47 du Code de l’arbitrage en matière de sport du TAS (“le Code TAS”), “un appel contre une décision d’une fédération, association ou autre organisme sportif peut être déposé au TAS si les statuts ou règlements dudit organisme sportif le prévoient ou si les parties ont conclu une convention d’arbitrage particulière et dans la mesure aussi où l’appelant a épuisé les voies de droit préalables à l’appel dont il dispose en vertu des statuts ou règlements dudit organisme sportif. Il peut être fait appel au TAS d’une sentence rendue par le TAS agissant en qualité de tribunal de première instance, si un tel appel est expressément prévu par les règles applicables à la procédure de première instance”. 2. Or, l’article 62 des Statuts de la FIFA reconnait expressément la compétence du TAS pour “tout différent opposant la FIFA, les membres, les confédérations, les ligues, les clubs, les joueurs, les officiels et les agents de matches et les agents de joueurs licenciés”. En outre, l’article 13 alinéa 1 lettre a des Statuts de la FIFA impose aux membres de cette association de se conformer pleinement aux décisions du TAS. Finalement, l’article 24 RSTJ prévoit que les décisions prises par la CRL ou par son juge peuvent faire l’objet d’un appel devant le TAS. 3. Le TAS est dès lors compétent pour connaître du présent litige. Droit applicable 4. Conformément à l’article R58 du Code TAS, “la Formation statue selon les règlements applicables et selon les règles de droit choisies par les parties, ou à défaut de choix, selon le droit du pays dans lequel la fédération, association ou autre organisme sportif ayant rendu la décision attaquée a son domicile ou selon les règles de droit dont la Formation estime l’application appropriée. Dans ce dernier cas, la décision de la Formation doit être motivée”. 5. Aux termes de l’article 62 alinéa 2 des Statuts de la FIFA, les dispositions du Code TAS s’appliquent à la procédure, le TAS devant appliquer, à titre principal, les différentes règlementations de la FIFA et, à titre subsidiaire, le droit suisse. 6. Il convient de déterminer quelle version du RSTJ fait foi en l’espèce, puisque les contrats dont il est question ont été signés en 2003 déjà, puis prolongés et prétendument résiliés à une époque où la version 2005 du RSTJ était déjà entrée en force et finalement soumis à la juridiction du TAS alors que la version 2008 était entrée en vigueur. 7. La version 2008, tout comme la version actuelle du RSTJ (2010), prévoit, à l’article 26 alinéa 1, que tous les cas portés devant la FIFA avant que ce règlement n’entre en vigueur doivent être traités conformément à la règlementation antérieure, soit la version 2005. De même, l’article 26 alinéas 1 et 2 de la version 2005 prévoit que les cas portés devant la FIFA après que ce règlement soit entré en vigueur doivent être traités conformément à celui-ci. 8. En l’espèce, le présent litige a été soumis à la CRL de la FIFA le 27 novembre 2007. Par conséquent, il doit être fait ici application de la version 2005 du RSTJ. 9. Comme rappelé ci-dessus, les différentes règlementations de la FIFA s’appliquent à titre principal et le droit suisse à titre subsidiaire. Cela étant, l’article 25 RSTJ impose à la CRL, lors de la prise de ses décisions, de tenir également compte de tous les arrangements, lois et/ou conventions collectives qui existent au niveau national, de même que les spécificités du sport. 10. Il appartiendra donc à la Formation de déterminer si et dans quelle mesure la règlementation française, en particulier la CFP, doit être prise en compte dans le cadre du présent litige. Recevabilité de l’appel 11. Aux termes de l’article R49 du Code TAS, “en l’absence de délai d’appel fixé par les statuts ou règlements de la fédération, de l’association ou de l’organisme sportif concerné ou par la convention particulière préalablement conclue, le délai d’appel est de vingt-et-un jours dès la réception de la décision faisant l’objet de l’appel. Après consultation avec les parties, le Président de la Chambre peut décider de ne pas donner suite à un appel lorsque celui-ci est manifestement tardif”. 12. Conformément à l’article 63 des Statuts de la FIFA, des appels interjetés contre des décisions finales prises par les organes de la FIFA doivent être déposés au TAS dans les 21 jours suivants la notification de la décision attaquée. 13. Celle-ci, prise le 16 juillet 2009 par la CRL, a été notifiée aux appelantes dans son intégralité le 6 avril 2010. Celles-ci ont respecté le délai précité en adressant au TAS, le 26 avril suivant, leur déclaration d’appel. En outre, en adressant leur mémoire d’appel au TAS le 6 mai 2010, les appelantes ont respecté le délai de 10 jours prévu à l’article R51 du Code TAS. 14. L’appel déposé conjointement par la SASP HAC et l’Association HAC est donc recevable en la forme. Pouvoir d’examen 15. Le pouvoir d’examen de la Formation dans la présente procédure arbitrale d’appel est régi par les dispositions des articles R47 et suivants du Code TAS. En particulier, l’article R57 octroie au TAS un pouvoir d’appréciation complet en fait et en droit dans le cadre de l’instruction de la cause. 16. L’admission d’un pouvoir d’examen qui ne soit pas restreint est en outre confortée par les mesures d’instruction étendues que la Formation est autorisée à ordonner aux termes de l’article R44.3 alinéa 2 du Code TAS: “La Formation peut en tout temps, si elle l’estime utile pour compléter les présentations des parties, requérir la production de pièces supplémentaires, ordonner l’audition de témoins, commettre et entendre des experts ou procéder à tout autre acte d’instruction (…)”. Cette large capacité d’instruction démontre l’existence d’un plein pouvoir d’examen de l’affaire, notamment en ce qui concerne les faits. 17. Malgré ce plein pouvoir d’examen, le TAS ne peut que juger le différend tel qu’il est défini par la décision contestée et sa compétence est limitée par la portée objective et subjective de cette même décision (en ce sens, voir ex multis, TAS 2009/A/1879, cons. 72 et les références citées). Légitimation active des appelantes 18. Les contrats conclus avec Matthias Lepiller ont été signés par l’Association HAC, alors même que l’appel est interjeté par deux entités distinctes, soit la SASP HAC et l’Association HAC. 19. Interpellé sur ce point, le représentant de la SASP HAC, présent à l’audience, a expliqué qu’en vertu de la loi française, un club de football est constitué d’une association sportive, laquelle est héritière de l’histoire du club et détient le numéro d’affiliation octroyée par la FFF. En parallèle à cette structure, dès que les membres de l’association entendent pratiquer leur sport au niveau professionnel, une société doit être constituée, sous la forme d’une société anonyme sportive professionnelle. Ces deux structures sont alors intimement liées par une convention homologuée par le Ministère des Sports et constituent conjointement un groupement sportif reconnu par la FFF. 20. Le représentant de la SASP HAC a également expliqué que cette solidarité complète entre les deux entités juridiques a notamment pour effet que, en cas de dépôt de bilan de l’une d’elle, l’ensemble du groupement sportif pourrait être rétrogradé en ligue inférieure. De même, une éventuelle indemnité de formation devrait être répartie au sein du groupement au prorata du temps passé par le joueur au sein de chacune des entités. 21. Dans ces circonstances, la Formation relève que la SASP HAC et l’Association HAC ont toutes deux la légitimation active. C’est donc à juste titre qu’elles ont déposé conjointement leur appel auprès du TAS. 22. Pour le surplus, la Formation constate que le représentant de la SASP HAC participe à l’audience en étant au bénéfice d’une procuration conférée par l’Association HAC et qu’il est donc légitimé a représenter l’entier du groupement sportif dans le cadre de la présente procédure. Examen des moyens de droit A. Préambule a) La portée de l’examen de la Formation 23. Le HAC fait valoir son droit à être indemnisé à double titre: d’une part, en application des règles relatives à la violation des obligations contractuelles du joueur, en vertu de l’article 17 RSTJ, et, d’autre part, de celles relatives à l’indemnité de formation, en vertu de l’article 3 alinéa 1 de l’annexe 4 RSTJ. 24. Comme relevée ci-dessus, la portée de l’examen de la Formation arbitrale est limitée par la portée objective et subjective de la décision appelée (voir supra cons. 17). 25. En l’espèce, la compétence de la FIFA était fondée sur l’article 3 alinéa 1 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges (2008) en combinaison avec l’article 24 alinéas 1 et 2 et l’article 22 lettres a et d RSTJ (2008). Aux termes de cette disposition, la compétence de la FIFA s’étend: “a) aux litiges entre clubs et joueurs en relation au maintien de la stabilité contractuelle (art. 13-18) s’il y a eu demande de CIT et s’il y a réclamation d’une partie en relation à cette demande de CIT, notamment au sujet de son établissement, de sanctions sportives ou d’indemnisations pour rupture de contrat; […] d) aux litiges relatifs à l’indemnité de formation (art. 20) et au mécanisme de solidarité (art. 21) entre des clubs appartenant à des associations différentes”. 26. En conséquence, la FIFA avait consacré son examen aux trois questions suivantes: i) En signant un contrat de travail avec l’ACF, le joueur a-t-il commis une rupture de son contrat de travail avec le HAC au sens de l’article 17 RSTJ? ii) Dépendant de la réponse à la question précédente, quelles sont les conséquences de la signature d’un contrat de travail avec l’ACF par le joueur? iii) L’ACF est-il redevable d’une indemnité de compensation au HAC pour l’éducation et la formation du joueur en application de l’article 20 et de l’annexe 4 RSTJ et, dans l’affirmative, de quel montant? 27. La Formation relève ici que les appelantes ont basé toutes leurs conclusions soit sur l’article 17, soit sur l’article 22 RSTJ. En raison d’une relative ambiguïté dans le libellé de certaines des prétentions du HAC, la Formation souligne toutefois à toutes fins utiles, qu’au vu de ce qui précède, son examen ne saurait en tout état de cause aller au-delà des prétentions des appelantes en tant qu’elles sont fondées sur les règles de la FIFA, plus spécifiquement sur les dispositions susmentionnées. b) La portée de l’article 17 RSTJ1 28. Si le fondement de la compétence de la FIFA et la portée de son examen (limitée aux trois questions susmentionnées) n’ont, par ailleurs, pas été contestés, le champ d’application de l’article 17 RSTJ est, en revanche, l’objet d’importantes divergences de vues entre les parties. 29. Le HAC estime que “[l]es règles relatives à la stabilité contractuelle s’appliquent nécessairement à l’ensemble de la situation contractuelle qui unit un club et son joueur, quelque soit la nature des contrats qui ont été passés”. La FIFA limiterait ainsi à tort l’application de l’article 17 RSTJ aux contrats de travail à proprement parler. A l’appui de cette interprétation, les appelantes se réfèrent essentiellement aux sentences rendues par le TAS dans le cadre des affaires TAS 2004/A/791 et TAS 2003/O/530 et au fait qu’une solution contraire violerait le principe essentiel de la force obligatoire des contrats. 30. Selon la FIFA, l’article 17 RSTJ, qui est susceptible d’entraîner de sérieuses conséquences disciplinaires, a été conçu dans le but de s’appliquer exclusivement aux contrats de travail et non à toute relation contractuelle susceptible d’exister entre un joueur et un club. Elle rappelle ici le contexte dans lequel s’inscrit la genèse de cette disposition et du chapitre dans lequel elle s’insère, “IV. Stabilité contractuelle entre professionnels et clubs”, à savoir la réorganisation du système international des transferts à la suite de l’arrêt Bosman. Or, au cœur de cette jurisprudence figurait le principe selon lequel si un contrat de travail doit être respecté, un joueur ne peut pas être considéré comme étant lié au club au-delà du terme de ce contrat. Sanctionner un joueur qui n’est plus lié par un contrat de travail aboutirait ainsi à un résultat opposé à celui qui était recherché. Elle s’appuie également sur la jurisprudence CAS 2004/A/691, laquelle confirme que le principe de la stabilité contractuelle n’est pas applicable aux joueurs amateurs. 31. L’ACF partage le point de vue de la FIFA et souligne que la prise en compte de la rémunération du joueur dans le cadre du calcul de l’indemnité due selon l’article 17 RSTJ ainsi que le libellé de l’article 2 de ce règlement renforce le bien-fondé de cette interprétation. 32. La Formation relève ici que si le libellé du chapitre VIII du RSTJ (2001) “Maintien de la stabilité contractuelle” pouvait peut-être prêter à confusion (CAS 2004/A/691, cons. 69), comme l’illustre l’existence des sentences TAS 2004/A/791 et TAS 2003/O/530, d’une part, et CAS 2004/A/691, d’autre part, le libellé du chapitre IV du RSTJ (2005) a dissipé toute éventuelle ambigüité. 1 Article 17 Conséquences d’une rupture de contrat sans juste cause Les dispositions suivantes s’appliquent lors qu’un contrat est résilié sans juste cause: 1. Dans tous les cas, la partie ayant rompu le contrat est tenue de payer une indemnité. Sous réserve des dispositions stipulées à l’art. 20 et à l’annexe 4 concernant les indemnités de formation et si rien n’est prévu par le contrat, l’indemnité pour rupture de contrat est calculée conformément au droit en vigueur dans le pays concerné, aux spécificités du sport et en tenant compte de tout critère objectif inhérent au cas. Ces critères comprennent notamment la rémunération et autres avantages dus au joueur en vertu du contrat en cours et/ou du nouveau contrat, la durée restante du contrat en cours jusqu’à cinq ans au plus, le montant de tous les frais et dépenses occasionnés ou payés par l’ancien club (amortis sur la période contractuelle) de même que la question de savoir si la rupture intervient pendant les périodes protégées. […]. 33. En effet, l’article 17 RSTJ s’inscrit dans la section “IV Stabilité contractuelle entre professionnels et clubs” et l’article 2 alinéa 1 RSTJ définit le joueur professionnel comme un joueur “bénéficiant d’un contrat écrit avec un club et qui perçoit une indemnité supérieure au montant des frais effectifs qu’il encourt dans l’exercice de cette activité footballistique”. 34. En outre, l’alinéa 1 de l’article 17 précise que les critères permettant de calculer l’indemnité s’appuient notamment sur la rémunération du joueur, laquelle est un élément caractéristique du contrat liant un joueur professionnel à un club. 35. Il résulte ainsi sans aucune équivoque du texte du RSTJ (2005) que l’article 17 ne peut s’appliquer qu’à la violation d’un contrat écrit prévoyant une rémunération supérieure aux frais encourus par le joueur. Cette portée, certes limitée, de l’article 17 RSTJ est, par ailleurs, parfaitement en phase avec le but même du système de règlement des litiges de la FIFA, à savoir s’assurer du respect des contrats de travail conclus avec des joueurs professionnels durant la validité de ces accords, plutôt que de lier ces mêmes joueurs à leur club au-delà de cette validité. A l’inverse, dans l’hypothèse où cette disposition devrait permettre de sanctionner un joueur qui n’est plus lié à un club par aucun contrat de travail, le résultat obtenu serait alors diamétralement opposé au but recherché par le chapitre IV du RTSJ. Une telle interprétation extensive irait, en d’autres termes, au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir le principe fondamental de la stabilité contractuelle et de la sécurité du droit. 36. La Formation relève enfin que, contrairement à ce qu’allèguent les appelantes, cette “interprétation” ne contrevient nullement au principe pacta sunt servanda. En effet, elle ne confère pas un blanc-seing à la partie qui ne respecterait pas un contrat autre que celui visé par l’article 2 RSTJ, mais exclut in casu les litiges liés à de telles violations de la compétence de la FIFA. 37. En conséquence, et afin de répondre aux deux premières questions examinées par la FIFA (voir supra cons. 27), la Formation arbitrale devra en tout premier lieu déterminer si Matthias Lepiller était lié au HAC par un “contrat écrit sur la base duquel il percevait une indemnité supérieure au montant des frais effectifs qu’il encourrait dans l’exercice de cette activité footballistique” après le 30 juin 2006. B. Existence d’une relation contractuelle au sens de l’article 2 para. 2 RSTJ après le 30 juin 2006 a) Convention de formation 38. Faisant valoir l’existence d’une convention de formation conclue avec Matthias Lepiller et valable jusqu’au 30 juin 2008, le HAC considère que l’intéressé était tenu de signer une licence en faveur de l’association, tant en application de l’article 4 de ladite convention, que de l’article 4 de l’arrêté du Ministère des sports du 14 novembre 2002 approuvant la convention type de formation de la FFF selon lequel “pendant la durée de la convention, le bénéficiaire s’engage à signer une licence en faveur de l’association, affiliée à la FFF, du club dont relève le centre de formation”. A son sens, cette obligation contractuelle matérialise l’existence d’un lien avec le club pendant toute la durée de la formation et ayant notamment pour conséquence d’interdire au joueur de s’engager librement en faveur d’un autre club. 39. L’avis des parties diverge quant à la validité, ou non, de la convention de formation signée le 5 avril 2003 entre Matthias Lepiller et le HAC. Les appelantes estiment, contrairement à l’intimée, que ce document liait encore Matthias Lepiller lorsqu’il s’est engagé avec l’ACF. 40. La Formation arbitrale relève ici que, si cette convention est un contrat écrit, les appelantes n’ont nullement établi que Matthias Lepiller aurait perçu une indemnité supérieure à ses frais effectifs sur la base, non pas du contrat de joueur aspirant, mais de ce document. Dès lors, la convention de formation ne constitue pas un contrat de nature professionnelle et une éventuelle violation des obligations en découlant (directement ou indirectement) ne saurait être sanctionnée par l’article 17 RSTJ et il n’appartient à la Formation arbitrale de se prononcer ni sur sa validité, ni sur le respect des droits et devoirs y relatifs. 41. Par souci d’exhaustivité, la Formation relève ici que l’éventuelle violation par le joueur d’une obligation de signer une licence avec le HAC ne saurait en outre être assimilée à la violation d’un contrat de travail (voir en ce sens RIZZO F., Cah. Dr. Sport no 13, 2008, p. 91, point 8) alors inexistant. b) Contrat de joueur aspirant 42. Il ressort de l’ensemble du dispositif prévu par la règlementation française qu’en France, la formation d’un footballeur est susceptible d’être l’objet de deux contrats, parallèles et simultanés, et distincts par leur nature et leur objet. 43. Tel était le cas pour Matthias Lepiller, dont l’évolution au sein du HAC faisait l’objet à la fois d’une convention de formation, signée le 5 avril 2003, et d’un contrat de joueur en formation - en l’occurrence, d’un “contrat de joueur aspirant” - signé le 25 août 2003 et conclu pour une durée de trois saisons, soit jusqu’au 30 juin 2006. 44. Un avenant ayant pour but de prolonger ce contrat a, par la suite, été soumis à la Commission juridique de la LFP. 45. Dans une décision du 28 septembre 2004, elle a retenu ce qui suit: “Considérant que l’engagement «ferme définitif et irrévocable» des parties de signer un «contrat de joueur élite» prenant effet au 1er juillet 2003 matérialise l’établissement d’un bien contractuel entre le club et le joueur d’une durée supérieure à trois ans. Considérant que l’article 35 du règlement FIFA mentionne «qu’un joueur qui n’a pas 18 ans révolus ne peut signer un contrat en tant que non amateur que pour une durée n’excédant pas trois ans». Considérant que cet article est obligatoire au niveau national en application du préambule de ce même règlement. Dit ne pouvoir homologuer l’avenant (…) entre Monsieur Matthias Lepiller et le HAC”. 46. Au vu de cette décision, force est de constater que la prolongation du “contrat de joueur aspirant” n’a jamais été homologuée par l’autorité compétente au niveau national. En outre, celle-ci a expressément reconnu l’applicabilité de la réglementation de la FIFA, en l’occurrence du RSTJ, au niveau national également, avec un effet contraignant pour la LFP, la FFF et ses clubs affiliés. 47. Les appelantes n’ayant pas apporté la preuve que le “contrat de joueur aspirant” avait été valablement prolongé au-delà de sa période de validité initiale, soit jusqu’au 30 juin 2006, seule cette date doit être prise en compte ici. Dès lors que Matthias Lepiller n’a pas signé de contrat avec l’ACF avant le mois de juillet 2006, une violation de ses obligations contractuelles à l’égard de le HAC ne saurait lui être reprochée sur la base du “contrat de joueur aspirant”. 48. Par surabondance, il convient de rappeler que si la signature d’un contrat de joueur en formation - et donc d’un “contrat de joueur aspirant” - implique nécessairement la conclusion simultanée d’une convention de formation, l’inverse n’est pas vrai (cf. à ce propos TAS 2004/A/791, cons. 70 ss de la sentence partielle). La convention de formation pouvait donc continuer à exister pour elle-même au-delà du 30 juin 2006, alors même que le “contrat de joueur aspirant” avait pris fin à cette date. Ainsi, même si la convention de formation signée par Matthias Lepiller avait continué à exister au-delà du 30 juin 2006, ce qui n’est pas établi ici, le HAC ne pourrait se prévaloir d’un lien prétendument indissociable entre ces deux contrats pour conclure à leur validité conjointe au-delà de cette date. 49. Dès lors, bien que le “contrat de joueur aspirant” conclu entre le HAC et Matthias Lepiller puisse être considéré comme un contrat de travail (cf. TAS 2004/A/791, cons. 64) et que sa violation donnerait lieu à une indemnité fondée sur l’article 17 RSTJ, les appelantes ne peuvent s’en prévaloir en l’espèce. En effet, arrivé à son terme le 30 juin 2006 ce contrat ne liait plus Matthias Lepiller lors de la signature de son contrat avec l’ACF. c) Contrat plan de carrière 50. Les appelantes font valoir qu’elles avaient conclu avec Matthias Lepiller un “contrat plan de carrière” visant la signature ultérieure d’un “contrat de joueur élite”. 51. La Formation arbitrale doute que l’engagement de conclure un contrat répondant à la définition de l’article 2 RSTJ puisse déjà être considéré comme un tel contrat et que son éventuelle rupture puisse être couverte par l’article 17 RSTJ. Cette question peut toutefois rester indécise in casu. 52. En effet, si un tel contrat a bien été signé par les appelantes, l’intimé et ses représentants légaux en date du 29 septembre 2004, la Formation estime toutefois que ce contrat est entaché de nullité pour les motifs exposés ci-après. 53. Cet engagement vise à parvenir au même résultat que l’avenant au contrat de joueur aspirant, dont la Commission juridique de la LFP avait, la veille, refusé l’homologation, à savoir lier Matthias Lepiller aux appelantes par un engagement “ferme, définitif et irrévocable” de signer un contrat de joueur “élite” prenant effet au 1er juillet 2006. 54. Dans sa décision du 28 septembre 2004, la Commission juridique avait justifié son refus par le fait que cet avenant “matérialise l’établissement d’un lien contractuel entre le club et le joueur d’une durée supérieure à trois ans” et par l’article 35 RSTJ au terme duquel “un joueur qui n’a pas 18 ans révolus ne peut signer un contrat en tant que non-amateur que pour une durée n’excédant pas trois ans” (voir supra). 55. Reconnaître force de loi à un contrat par lequel un joueur mineur s’engage à signer ultérieurement un contrat non-amateur pour une durée supérieure à trois ans reviendrait à permettre de contourner les règles de la FIFA, les règles de la LFP, et le refus d’homologation de la Commission juridique de la LFP. La Formation ne saurait dès lors protéger le “contrat portant plan de carrière” lequel doit être déclaré nul. 56. A toutes fins utiles, la Formation relève encore ici que l’arrêt au fond de la Cour d’appel d’Aix en Provence du 27 juillet 2010 n’est d’aucun secours aux appelantes. Il ressort en effet de cet arrêt que l’accord réciproque d’engagement alors conclu entre Monsieur Clerc et l’Olympique Lyonnais ne faisait, contrairement au cas d’espèce, pas suite à un refus d’homologation pour contrariété aux règles de la FIFA d’un autre contrat poursuivant le même but. d) Contrat de joueur élite 57. En se référant aux négociations conduites avec le joueur durant le printemps 2006, les appelantes considèrent celles-ci comme des promesses synallagmatiques portant sur la conclusion effective d’un “contrat de joueur élite”. 58. L’existence avérée d’un tel contrat pourrait signifier que les appelantes et l’intimé avaient effectivement tissé une relation contractuelle de type professionnel. En effet, les diverses propositions adressées par le HAC à Matthias Lepiller faisaient état d’un salaire d’environ € 2’500.-- par mois, versé au joueur et faisant l’objet de bulletins de salaire, lesquels sont soumis au contrôle de la Commission de gestion des clubs de football français. Les éléments caractéristiques du contrat de travail étant selon le HAC réunis, la rupture d’une telle relation pourrait alors entraîner l’application de l’article 17 RSTJ à l’encontre du joueur, voire de l’ACF. 59. Pour démontrer l’existence de ce contrat, les appelantes se fondent sur la correspondance échangée entre le HAC et Matthias Lepiller, respectivement son agent, pour démontrer que les parties étaient parvenues à faire aboutir leurs négociations et qu’un tel contrat avait finalement été valablement conclu. Toutefois, dans la mesure où les intimées contestent ces allégations, il appartient à la partie qui entend se prévaloir de l’existence de ce contrat d’en apporter la preuve de la conclusion. 60. Les différents courriers adressés par le Président du Directoire du HAC à Matthias Lepiller, durant la période du 24 avril au 2 juin 2006, indiquent clairement l’existence de négociations entre les parties et d’une augmentation progressive des prétentions salariales du joueur à l’égard de son club. D’un point de vue contractuel, ces correspondances démontrent que, malgré le “contrat portant plan de carrière”, les parties n’étaient pas parvenues à un accord sur tous les points essentiels d’un contrat de travail et le courrier envoyé le 2 juin 2006 par le HAC établit clairement qu’ à cette date, Matthias Lepiller n’avait pas encore accepté formellement la proposition de signature d’un “contrat de joueur élite” que lui avait adressée les appelantes. En effet, le HAC précisait dans le courrier susmentionné que l’absence de refus de sa part serait considérée par le club comme une acceptation tacite de la relation contractuelle. 61. Les appelantes tentent de se prévaloir ici de l’adage latin “Qui tacet consentire videtur, quoties qui tacet loqui tenetur” (“celui qui ne dit mot est censé consentir, toutes les fois du moins qu’il est tenu de parler”). Force est de constater que le consentement du joueur par accord tacite ne peut être admis en l’espèce, puisque, moins d’un mois après l’envoi de ce courrier par le HAC, l’intéressé signait un contrat de travail avec l’ACF et, le 22 juin 2006, il ne se présentait pas à la reprise de l’entraînement de l’équipe du HAC. Cet état de fait corrobore donc la position des intimées, selon laquelle il n’y a jamais véritablement eu une manifestation de volontés réciproques et concordantes de la part des parties pour conclure un “contrat de joueur élite”. 62. Par surabondance, la Formation arbitrale relève encore ici que conformément à l’article 2 alinéa 2 RSTJ, un tel contrat est soumis à la forme écrite. Ainsi, même si un accord de volonté portant sur tous les éléments essentiels d’un contrat de travail, quod non, était avéré, il n’est pas certain que la rupture de cet accord soit couverte par l’article 17 RSTJ. e) Obligation légale de conclure 63. Les appelantes se prévalent également d’une violation de l’article 261 CFP pour fonder leurs prétentions. Or, pour les motifs exposés ci-dessus (supra cons. 35 et 41), il n’appartient à la Formation arbitrale de se prononcer ni sur l’existence ni sur les éventuelles conséquences d’une telle violation. f) Conclusion 64. La Formation arbitrale constate dès lors qu’après le 30 juin 2006, les appelantes et Matthias Lepiller n’étaient liés par aucun contrat écrit prévoyant une rémunération. 65. Toute éventuelle relation contractuelle liant le HAC à Matthias Lepiller après cette date échappe, par conséquent, au champ d’application des articles 13 à 18 RSTJ. Dès lors ni la CRL, ni le TAS, ne sont habilités à octroyer une quelconque indemnité au HAC à l’exception de l’indemnité de formation prévue par l’article 20 RSTJ qui est indéniablement de leur ressort. 66. Les conclusions des appelantes visant à l’imposition de sanctions à l’encontre de Matthias Lepiller et de l’ACF ainsi qu’à l’octroi d’une indemnité autre que celle prévue par l’article 20 RSTJ ne peuvent ainsi qu’être rejetées. C. Indemnité de formation 67. Le 6 octobre 2009, l’ACF a fait verser le montant de 312’292.47 € au HAC, en indiquant comme motif de paiement: “saldo indemnità di formazione Matthias Lepiller”. 68. Aux termes de l’article 3 alinéa 1 de l’annexe 4 RSTJ, lorsqu’un joueur est enregistré la première fois en qualité de professionnel, le club pour lequel il est enregistré doit le paiement, dans un délai de 30 jours dès l’enregistrement, d’une indemnité de formation à tout club au sein duquel le joueur était enregistré auparavant (conformément à l’historique de sa carrière telle qu’elle figure dans son passeport de joueur) et qui a contribué à son entraînement à partir de la saison durant laquelle il avait eu son douzième anniversaire. 69. Ces dispositions précisent également le mode de calcul du montant de l’indemnité de formation, soit au prorata de la période de formation que le joueur a passée au sein de chaque club. 70. Les parties au présent litige ne contestent pas le fait que le HAC soit légitimé à obtenir une telle indemnité de formation. L’ACF rappelle toutefois qu’elle a d’ores et déjà payé un montant supérieur à € 312’000.-- peu après la décision de la CRL, alors même que cette dernière ne la condamnait qu’au versement d’une indemnité de € 272’500.--. L’intimée estime dès lors s’être déjà acquittée de son obligation à l’égard du HAC, lequel ne pourrait dès lors pas prétendre à une nouvelle indemnisation pour ce même motif. 71. L’article 1 alinéa 1 de l’annexe 4 RSTJ prévoit que la formation et l’éducation d’un joueur a lieu entre 12 et 23 ans. Ainsi, de façon générale, une telle indemnité est due jusqu’à l’âge de 23 ans pour une formation ayant pris fin à l’âge de 21 ans, à moins qu’il soit établi que le joueur avait d’ores et déjà terminé sa période de formation avant ses 21 ans. 72. Fondée sur ce qui précède, la CRL a estimé que Matthias Lepiller avait été enregistré et formé par le HAC depuis le mois d’avril 2003 jusqu’à la fin de la saison 2005-2006, soit lorsqu’il a quitté le HAC pour être employé par l’ACF. La CRL a ainsi tenu compte d’une période d’enregistrement de trois mois durant la saison de son quinzième anniversaire et de trois saisons entières de son seizième à son dix-huitième anniversaire. A cet égard, la CRL, faute d’éléments probants, a rejeté l’argument de l’ACF selon lequel Matthias Lepiller avait déjà terminé sa formation deux ans avant de quitter le HAC. 73. Tenant compte de ces différents paramètres, la CRL a déterminé qu’un montant de € 90’000.-- par année était applicable à la période durant laquelle les deux clubs étaient inscrits en catégorie 1 de l’UEFA, respectivement de € 10’000.-- par année pour les clubs en catégorie 4. Elle a ainsi condamné l’ACF au versement d’un montant de € 272’500.-- correspondant à l’addition de 2’500 € (3 mois durant lesquels le HAC était en catégorie 4) et de € 270’000.-- (3 saisons en catégorie 1). 74. La méthode de calcul appliquée par la CRL est parfaitement correcte et conforme aux articles 5 et 6 de l’annexe 4 RSTJ, ainsi qu’à la circulaire FIFA numéro 959 du 16 mars 2005 fixant le barème applicable aux indemnités de formation. 75. En revanche, la période de trois mois retenue par la CRL comme étant celle durant laquelle Matthias Lepiller a évolué au sein de le HAC, alors que celui-ci se trouvait en catégorie 4, est inexacte. Il ressort en effet du passeport FIFA de l’intéressé qu’il disposait d’une licence de joueur amateur pour la saison 1999-2000 déjà, soit durant la saison de sa douzième année. Quand bien même tout indique que ni l’ACF ni la CRL ne peuvent se voir reprocher une quelconque faute à cet égard, dans la mesure où les appelantes n’ont produit que lors de la procédure devant le TAS une copie du passeport du joueur, il n’en demeure pas moins que la Formation se doit d’en tenir compte dès lors qu’elle en a eu connaissance, en vertu de l’article R57 du Code TAS. 76. Partant, le calcul de l’indemnité de formation doit être modifié en ce sens que le HAC peut prétendre à un montant total de € 310’000.-- correspondant à quatre fois €10’000.-- (saisons du douzième au quinzième anniversaire), auquel s’ajoutent trois fois € 90’000.--(saisons du seizième au dix-huitième anniversaire), le joueur ayant ensuite quitté son club formateur pour l’ACF durant la saison 2006-2007. 77. L’ACF a d’ores et déjà versé le montant de € 272’500.-- avec intérêt à 5 % par année à compter du 30 octobre 2006, soit un total de € 312’292.47. Les appelantes estiment que l’indemnité corrigée à € 310’000.-- doit leur être payée avec un taux d’intérêt à 5 % par année à compter du 12 août 2006, soit 30 jours après le départ de Matthias Lepiller pour l’ACF. 78. En vertu de l’article 3 alinéa 2 de l’annexe 4 RSTJ, le délai pour le versement de l’indemnité de formation est de 30 jours suivant l’enregistrement du joueur professionnel auprès de son nouveau club. En l’espèce, ce n’est que le 29 septembre 2006 que la FIF a obtenu l’autorisation du Juge unique de la Commission du Statut du Joueur de la FIFA d’enregistrer provisoirement Matthias Lepiller auprès de l’ACF. Le dies a quo retenu par la CRL, soit le 30 octobre 2006, est donc exact. 79. Au vu de ce qui précède, les appelantes doivent se voir reconnaître le droit à une indemnité de formation d’un montant correspondant à la différence entre, d’une part, la somme de 310’000 € plus intérêt à 5 % par année dès le 30 octobre 2006 et, d’autre part, le montant de 312’292.47 € déjà versé à le HAC. La Formation relève ici qu’elle ne peut condamner directement l’ACF au paiement de ce montant dans la mesure où les appelantes prennent une conclusion en constatation de droit et non une conclusion condamnatoire dans leur mémoire d’appel. Le Tribunal Arbitral du Sport: 1. Admet partiellement l’appel de la SASP Le Havre Athletic Club et de l’Association Le Havre Athletic Club dans la mesure où il est recevable; 2. Dit que la SASP Le Havre Athletic Club et l’Association Le Havre Athletic Club se voient reconnaître le droit à une indemnité de formation de € 310’000.-- (trois cent dix-mille Euros) avec intérêt à 5 % par année à compter du 30 octobre 2006, de laquelle sera déduit le montant de € 312’292.47 (trois cent douze-mille deux cent-deux Euros quarante-sept) versé le 6 octobre 2009 par l’Associazione Calcio Fiorentina; (…) 5. Dit que le droit de Greffe de CHF 500.-- (cinq cent francs suisses) versés par la SASP Le Havre Athletic Club et l’Association Le Havre Athletic Club reste acquis au TAS; 6. Dit que toutes autres ou plus amples conclusions sont rejetées.
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