TAS-CAS – Tribunale Arbitrale dello Sport – Corte arbitrale dello Sport (2014-2015)———-Tribunal Arbitral du Sport – Court of Arbitration for Sport (2014-2015) – official version by www.tas-cas.org – Arbitrage TAS 2014/A/3505 Al Khor SC c. C., sentence du 3 décembre 2014
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Arbitrage TAS 2014/A/3505 Al Khor SC c. C., sentence du 3 décembre 2014 Formation: Me Olivier Carrard (Suisse), Arbitre unique Football Indemnisation pour résiliation de contrat de travail Droit applicable Droit applicable dans le domaine du sport international Arbitre unique Principe de stabilité contractuelle Juste cause Principes régissant le calcul de l'indemnité et obligation de réduire le dommage 1. Dans la Loi fédérale sur le droit international privé (“LDIP”), la question des règles de droit applicable au fond est régie par l’article 187 LDIP, dont l’alinéa 2 précise que les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à statuer en équité. Le fait que les parties puissent notamment permettre aux arbitres de décider en équité, c’est-à-dire en dehors de toute référence à des normes étatiques particulières, illustre la liberté accordée aux parties par l’article 187 LDIP en ce qui concerne le choix des règles applicables au fond de leur litige. Si l’article 187 LDIP permet le recours à l’équité en lieu et place d’un système particulier de normes étatiques, suivant l’argument a majore, minus il est logique de conclure qu’il permet a fortiori de se référer à un système de normes non étatiques. 2. Par nature le sport est un phénomène transcendant les frontières et il est indispensable que les règles régissant le sport au niveau international aient un caractère uniforme et largement cohérent dans le monde entier. Pour en assurer un respect au niveau mondial, une telle réglementation ne doit pas être appliquée différemment d’un pays à l’autre, notamment en raison d’interférences entre droit étatique et réglementation sportive. Le principe de l’application universelle des règles de la FIFA – ou de toute autre fédération internationale – répond à des exigences de rationalité, de sécurité et de prévisibilité juridique. L’uniformité qui en résulte tend à assurer l’égalité de traitement entre tous les destinataires de ces normes, quel que soit le pays où ils se trouvent. L’application directe de l’ordre juridique d’un seul pays ne convient pas forcément au sport organisé au niveau mondial. L’article 187 LDIP permet une approche moins nationale, en réservant la possibilité d’un renvoi à des règles de droit non étatiques. Par ailleurs, une élection de droit peut aussi être indirecte lorsque les parties se soumettent à un règlement d’arbitrage qui contient lui-même des dispositions au sujet de la désignation du droit applicable. Ainsi, même si un contrat conclu entre deux parties prévoit l’application d’un droit national, mais que le litige entre ces mêmes parties est par ailleurs soumis aux divers règlements de la FIFA et le TAS prévu comme dernière instance de tous litiges, les règlements du TAS et de la FIFA doivent être considéré comme tacitement etindirectement choisis; il en suit qu’en premier lieu, les règlements de la FIFA s’appliquent au litige, le droit suisse étant applicable à titre supplétif. 3. Selon l’article R54 alinéa 1 du Code, si les parties sont convenues de recourir à un arbitre unique ou si le Président de Chambre estime que l’appel doit être soumis à un arbitre unique, c’est le Président de Chambre qui désigne l’arbitre unique dès réception de la déclaration d’appel ou dès qu’une décision sur le nombre d’arbitres est rendue . La requête d’une des parties de nommer un arbitre en particulier en tant qu’arbitre unique doit être rejetée. 4. Les règlements FIFA prévoient qu’un contrat entre un joueur professionnel et un club ne peut être résilié qu’à son échéance ou d’un commun accord (principe de stabilité contractuelle). De plus, un contrat peut être résilié par l’une ou l’autre des parties sans entraîner de conséquences seulement en présence d’un cas de juste cause. Une disposition contractuelle octroyant la possibilité pour une partie de résilier unilatéralement un contrat sans justes motifs est contraire aux règles de la FIFA et doit être considérée comme invalide et non applicable. 5. Les règlements FIFA (en particulier l’article 14 du Règlement du Statut et du Transfer des Joueurs (“RSTJ”)) ne définissent pas ce qui peut constituer une juste cause pour résilier unilatéralement un contrat. Selon la jurisprudence du TAS, l’usage de drogue ou l’absence répétée d’un joueur lors des entrainements peuvent constituer un manquement grave aux devoirs du joueur, pouvant justifier la résiliation unilatérale du contrat de la part d’un club. Par contre tel n’est pas le cas lorsque la raison de la perte de la capacité de travail d’un joueur est inhérente à son activité professionnelle d’athlète (par exemple accident au cours d’un match joué pour le compte du club employeur). En règle générale, le fait pour un joueur de ne pas pouvoir offrir à son club sa capacité de travail en raison d’une maladie ou d’une blessure ne constitue pas un manquement à une obligation pouvant être invoqué comme “juste motif” de résiliation unilatérale du contrat. 6. Ni l’article 17 RSTJ, ni le Commentaire de ce règlement ne permettant de déterminer le montant de l’indemnité due en cas de résiliation unilatérale injustifiée du contrat, ce montant s’apprécie au regard tant du droit suisse applicable à titre supplétif que de la jurisprudence du TAS. Selon ces derniers, la partie victime de la résiliation unilatérale injustifiée est autorisée à exiger le paiement de l’entier de la rémunération à laquelle elle aurait pu prétendre sur la base du contrat ainsi qu’une indemnisation pour tous les dommages qu’elle aurait pu éviter si le contrat avait été exécuté jusqu’à son expiration naturelle. De ce montant doit être soustrait tout revenu qu’elle a ou aurait pu obtenir entre le moment de la résiliation unilatérale du contrat et celui de son expiration naturelle. I. LES PARTIES 1. Le Club sportif Al Khor SC (ci-après le “Club” ou l’“Appelant”) est un club de football qatari basé à Al Khor. Le Club est membre de l’Association de Football du Qatar, elle-même membre de la Fédération Internationale de Football Association (FIFA). 2. C. (ci-après le “Joueur” ou l’“Intimé”) est un joueur de football brésilien, né en 1981. Il a joué pour le Club durant les saisons 2010 et 2011. Egalement surnommé “…”, il évolue actuellement dans l’équipe brésilienne Nacional-MG en tant qu’attaquant. II. FAITS A. ENGAGEMENT DU JOUEUR PAR LE CLUB 3. En date du 25 juillet 2010, le Joueur et le Club ont signé un “Settlement Agreement” (ci-après la “Convention”) portant sur l’engagement du Joueur par le Club pour une période de trois ans et ce, dès le 1er août 2010. 4. Selon les articles 2 à 5 du “Settlement Agreement”, le Club s’était engagé à verser au Joueur les montants suivants: - USD 450’000 comme rémunération globale par saison, dont USD 250’000 payables à la signature et les USD 200’000 restants devant être versés en 10 versements égaux de USD 20’000, à partir du 1er août 2010; - Des billets d’avion en classe économique pour le vol Brésil-Qatar-Brésil pour le Joueur et sa famille; - Un appartement meublé; - Une voiture; - Des traitements médicaux dans les hôpitaux qataris; - Des bonus en cas de victoire. 5. En date du 1er août 2010, le Joueur et le Club ont signé un “Employment Contract” (ci-après le “Contrat”) ainsi qu’un “Football Player Contract Schedule” (ci-après aussi l’“Annexe”), valides jusqu’au 30 juin 2013. 6. Selon l’article 2 de l’Annexe, le Club s’engageait à verser au Joueur un salaire global de USD 450’000 comme rémunération globale par saison, dont USD 250’000 payables à la signature et dont les USD 200’000 restants devaient être versés, entre le 1er août et le 1er mai de l’année suivante, en 10 versements égaux de USD 20’000. 7. Par ailleurs, l’article 4 alinéa 2 lettre c) du Contrat prévoyait que “During the contractual period, the FCC [the Club] will make the following elements available to the player: c) Sports-oriented medical and therapeutic care”. 8. L’article susmentionné peut être librement traduit de la manière suivante: “Durant la période contractuelle, le FCC [le Club] mettra à disposition du joueur les éléments suivants: c) traitement médicaux et thérapeutiques spécialisé dans le sport”. 9. L’article 7 alinéa 3 à 5 du Contrat prévoyait que: “3. In the event that the player shall become incapacitated by reason of sickness or injury for a period between three and six months, established by independent medical examination, the FCC [the Club] shall be entitled to reduce the player’s monthly salary for a percentage of 50% of their amount. 4. In the event that the player shall become incapacitated by reason of sickness or injury for a period between higher than six months, established by independent medical examination, the FCC [the Club] shall be entitled to terminate this contract upon on month’s written notice to player. 5. Qatari legislation regarding sickness and accidents applies to both parties to the contract. Any provisions in the Regulations of the Qatar Football Association and QSLM governing this matter also apply”. L’article susmentionné peut être librement traduit de la manière suivante: “3. En cas d’incapacité du joueur pour des raisons de maladie ou d’accident pour une période allant de trois à six mois et certifiée par un examen médical indépendant, le FCC [le Club] sera autorisé à réduire à hauteur de 50% le salaire mensuel du joueur. 4. En cas d’incapacité du joueur pour des raisons de maladie ou d’accident pour une période supérieure à 6 mois et certifiée par un examen médical indépendant, le FCC [le Club] sera autorisé à résilier le présent contrat, par écrit, moyennant un préavis d’un mois. 5. La législation du Qatar concernant les maladies et les accidents s’applique aux deux parties du contrat. Toutes dispositions du Règlement de l’Association de football qatari et du QSLM régissant cet aspect s’appliquent également”. 10. De plus, l’article 10 du Contrat, dont le titre est “termination by the club or the player” prévoyait que: “The FCC [the Club] may terminate this contract before expiring term and the first party [the Club] will by to the second party [the Player] amount of two month salary only”. Ainsi, l’article susmentionné dont le titre en français est “résiliation par le club ou le joueur” peut être librement traduit de la manière suivante: “Le FCC [le Club] peut résilier le contrat avant l’expiration de son terme et la première partie [le Club] devra à la seconde partie [le Joueur] un montant équivalant à deux mois de salaire seulement”. B. RÉSILIATION DU CONTRAT PAR LE CLUB 11. En date du 24 mai 2011, par le biais du “Professional athlete clearance form” (traduction libre: “formulaire de l’athlète professionnel”), le Club a informé que “C. has ended his services on 31 May 2011” (traduction libre: “C. a mis fin à ses services le 31 mai 2011”). C. RÉSUMÉ DE LA DECISION ET DES CONSIDERANTS DE LA CHAMBRE DE RESOLUTION DES LITGES DE LA FIFA 12. Dans sa décision du 31 octobre 2013, et après avoir pris en considération les positions des parties, la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après la “CRL”) a pris les conclusions suivantes [traduction libre]: 1. “La requête du Demandeur, C., est partiellement admise; 2. Le Défenseur, Al Khor FC, est tenu de payer au Demandeur, dans les 30 jours courant à compter de la date de notification de la présente décision, le montant de USD 700’000 au titre d’indemnité pour rupture unilatérale du Contrat; 3. Si la somme due n’est pas payée dans le délai imparti ci-dessus, des intérêts à hauteur de 5% par année seront exigés et le cas sera transmis, sur requête, à la Commission de Discipline de la FIFA, pour examen et décision formelle. 4. Toute autre conclusion du Demandeur est rejetée. 5. Le Demandeur s’engage à communiquer au Défendeur le numéro de compte bancaire auquel le club devra verser la somme allouée et à informer la Chambre de Résolution des Litiges de tous paiements reçus ”. 13. Pour se déterminer, la CRL s’est fondée en premier lieu sur une analyse de l’article 10 du Contrat - disposition sur laquelle le Club se base pour justifier la résiliation du Contrat. 14. En substance et selon l’interprétation faite par la CRL de l’article 10 susmentionné, bien que cette disposition s’intitule “résiliation par le club ou le joueur”, son contenu n’autorisait, dans les faits, que le Club à résilier le Contrat avant l’expiration de son terme en échange du versement au Joueur de deux mois de salaire. Selon la CRL, cette possibilité de résilier prématurément le Contrat en échange d’une somme relativement insignifiante était de nature profondément arbitraire, octroyant ainsi de facto la possibilité au seul Club de choisir de maintenir ou non la relation contractuelle avec le Joueur. 15. La CRL considérait ainsi que cette disposition avait tout d’une clause léonine [potestative] et qu’en conséquence, l’argumentation du Club à ce sujet ne pouvait pas être retenue par la CRL. 16. En se référant à l’article 7 alinéa 3 à 5 du Contrat, et indépendamment du fait que, selon le Club, la blessure du Joueur n’était pas la cause de la résiliation du Contrat, la CRL a considéré comme pertinent de rappeler sa jurisprudence constante selon laquelle la blessure ou la maladie d’un joueur ne pouvait pas être considérée comme une raison valable pour cesser de verser la rémunération d’un joueur et encore moins pour résilier son contrat de travail 1 . 17. Par ailleurs, et quand bien même le Club avait proposé au Joueur de résilier le Contrat en échange de deux mois de salaire, ce dernier avait décliné l’offre. Malgré ce refus, le Club avait décidé de déposer, en date du 24 mai 2011, le formulaire idoine auprès du Comité des Joueurs Professionnels, résiliant ainsi unilatéralement le Contrat le liant au Joueur. 18. La CRL est ainsi arrivé à la conclusion que le Club ne pouvait invoquer aucune juste cause pour résilier unilatéralement le Contrat et qu’en conséquence, ce dernier était tenu responsable de la résiliation du Contrat. 19. Après s’être déterminée sur la responsabilité du Club, la CRL s’est penchée sur les conséquences de cette rupture du Contrat sans juste motif. Se basant sur l’article 17 du Règlement FIFA, la CRL a considéré que le Joueur était en droit de recevoir une indemnisation en sus de tout solde éventuel encore dû sur la base du Contrat. 20. Ainsi, en application de l’article 17 alinéa 1 du Règlement FIFA et compte tenu du fait que (i) le Joueur avait, à la suite de la résiliation du Contrat, signé plusieurs autres contrats lui ayant permis de gagner un salaire global de USD 57’000 et (ii) que, malgré le fait que l’article 10 du Contrat n’était pas valable, ce dernier créait malgré tout une certaine expectative auprès du Club de pouvoir résilier le Contrat en échange du versement de deux mois de salaire; la CRL est arrivée à la conclusion que le Club était tenu de verser au Joueur une indemnité d’un montant de USD 700’000. III. RESUMÉ DE LA PROCEDURE DEVANT LE TAS 21. Le 17 février 2014, l’Appelant a déposé une déclaration d’appel conformément aux dispositions de l’article R47 du Code de l’arbitrage en matière de sport (ci-après le “Code”), à l’encontre de la décision de la CRL du 31 octobre 2013. 22. La déclaration d’appel comportait les conclusions suivantes [sic.]: “Pour tous ses motifs et en se réservant le droit pour de plus ample documents et moyens d’appel si cela s’avère nécessaire, et a toute clarification l’Appelant demande à votre honorable instance: PREMIEREMENT: De prononcer la recevabilité du recours actuel en appel car conforme au délai et aux règles de forme. DEUXIEMEMENT: de prononcer l’annulation du jugement de la chambre de résolution des disputes du 31/10/2013 – pour être contraire au droit et aux faits prouves – car non fondées. TROISIEMEMENT: de rejeter les raisons émises dans l’appel pour être contraire aux dispositions contractuelles convenues entre les parties – ce qui constituent une intervention illégal dans la volontécontractuelle des parties. 1 Décision de la CRL du 31 octobre 2013, p. 11. QUATRIEMEMENT: de condamner l’intime au versement d’un montant de (500.000) USD – indemnités à l’Appelant pour perte de saison sportive et abus de droit d’ester en justice sans fondement légal. CINQUIEMEMENT: de prononcer le sursis à exécution de la décision du 31/10/2013 – jusqu’à la fin de la procédure d’appel actuel et au prononce du jugement d’appel. SIXIEMEMENT: de valider la décision de l’appelant de nommer M. JALAL EL AHDAB – LIBANAIS – arbitre unique – figurant sur la liste régulière des arbitres du TAS – a défaut d’accord et de condamner l’intimé aux frais et honoraires des deux parties”. 23. En date du 19 février 2014, le TAS a accusé réception de la déclaration d’appel de l’Appelant datée du 17 février 2014. Toutefois, afin que la déclaration d’appel réponde aux exigences de l’article R48 du Code, le TAS a invité l’Appelant à soumettre l’adresse postale complète de l’Intimé dans un délai de quatre jours. 24. Par courrier du même jour, l’Appelant a soumis l’adresse postale de l’Intimé au TAS. 25. Par mémoire d’appel daté du 26 février 2014, l’Appelant a requis le TAS de considérer sa déclaration d’appel comme étant un mémoire d’appel, conformément à l’article R51 du Code. 26. Par courrier daté du même jour, le Tribunal a pris note que la déclaration d’appel de l’Appelant du 17 février 2014 valait mémoire d’appel. Par conséquent, conformément à l’article R55 du Code, l’Intimé a été invité à déposer au Greffe du TAS une réponse comportant ses moyens de défense, dans un délai de vingt (20) jours. 27. Concernant la demande d’effet suspensif de l’Appelant, le TAS a informé les parties d’une jurisprudence du TAS selon laquelle une décision de nature financière rendue par une association privée suisse n’est pas exécutoire lorsqu’un appel est déposé à son encontre. Il s’ensuit que la demande d’effet suspensif était sans objet et, dans ces circonstances, le TAS a invité l’Appelant à l’informer dans un délai de cinq jours s’il souhaitait maintenir sa requête d’effet suspensif. 28. Le 3 mars 2014, l’Appelant a déposé un mémoire supplémentaire par lequel il a informé le TAS qu’il retirait sa requête d’effet suspensif conformément à la jurisprudence du TAS. 29. Par courrier du 13 mars 2014 et en réponse au courrier du TAS du 27 février 2014, l’Intimé a requis du TAS que le délai pour déposer une réponse soit fixé après le paiement de l’avance de frais par l’Appelant en accord avec l’article R55 alinéa 3 du Code tout en proposant une extension du délai de réponse jusqu’au 4 avril 2014. Il a également requis que l’Appelant soit seul responsable du paiement de l’avance de frais. 30. Concernant la nomination de l’Arbitre, l’Intimé a attiré l’attention du TAS du choix de l’Appelant de procéder avec un panel de trois arbitres. De plus, l’Intimé a conclu à ce que la procédure arbitrale soit menée en langue anglaise. 31. Par courrier du 24 mars 2014, le TAS a accusé réception du courrier de l’Intimé du 13 mars 2014 et pris note du souhait de l’Intimé que le délai de réponse soit fixé après le paiement par l’Appelant de sa part d’avance de frais. Le TAS a, par conséquent, annulé le délai de l’Intimé pour déposer un mémoire de réponse. 32. De plus, le TAS a pris note que l’Intimé souhaitait que la langue de la procédure fût l’anglais. Puisque le délai de cinq jours accordé à l’Intimé pour former objection n’a pas été respecté, le TAS a informé les parties que la langue officielle de l’arbitrage était le français. 33. Concernant le nombre d’arbitres, le TAS a informé les parties que, puisque l’Intimé n’a pas déposé ses observations dans le délai prescrit, la question serait soumise au Président de la Chambre arbitrale d’appel du TAS et que l’arbitre serait désigné (ou la nomination des Arbitres confirmée) conformément à l’article R54 du Code. 34. En date du 27 mars 2014, le TAS a déclaré nommer Me Olivier Carrard, avocat à Genève, Suisse en qualité d’Arbitre unique. 35. Le 28 mars 2014, l’Intimé a requis le TAS de reconsidérer sa décision concernant la langue de la procédure. Subsidiairement, l’Intimé a demandé à ce qu’il puisse déposer sa réponse en anglais. Finalement, l’Intimé a requis du TAS qu’il fixe un délai pour l’Appelant de verser l’avance de frais. 36. Par courrier du 2 avril 2014, le TAS a rejeté la demande de reconsidération de l’Intimé du 28 mars 2014 concernant la langue de la procédure au motif que le délai pour déposer des observations n’a pas été respecté. Le TAS a, de plus, invité l’Appelant à déposer ses observations quant à une procédure bilingue d’ici au 7 avril 2014. 37. Par courrier du 3 avril 2014, l’Appelant a informé le TAS de son refus d’une procédure bilingue. 38. Le 7 avril 2014, le TAS a informé les parties que le français restait la l angue officielle de la procédure et que toutes les pièces et courriers devaient être transmis en français. 39. Le 10 avril 2014, le TAS a informé les parties que, conformément à l’article R54 du Code, Me Olivier Carrard, avocat à Genève, Suisse, a été nommé Arbitre unique. 40. Le 25 avril 2014, l’Intimé a déposé son mémoire de réponse et a formulé les conclusions suivantes [sic]: “CONCLUSIONS Cela dit, sur la base de tous ces éléments et peu importe l’angle d’analyse de la question, la décision DRC FIFA ne mérite pas de réforme déjà qu’il n’y avait eu aucune violation des dispositions du RSTJ FIFA, du droit suisse ou même de toute disposition contractuelle qui est basée sur les principes généraux du Droit et du DROIT du travail. Ainsi, on arrive au TOTAL REJET des arguments et par conséquent, des demandes d’appel soumis, à cause de leur PARFAITE INCONSISTENCE, car ils ont été arbitrés par la plus honnête et crédible JUSTICE qu’est cette Cour Honorable. D’où la décision juste et cohérente prise par la DRC FIFA est maintenue, et y compris 5% d’intérêt et les coûts de l’arbitrage et les honoraires des arbitres, et y honoraires avocats des représentants du DEMANDEUR/INTIME”. 41. Le 5 mai 2014, le TAS a accusé réception de la réponse de l’Intimé datée du 25 avril 2014 et informé les parties qu’elles ne seraient pas admises à compléter ou modifier leurs conclusions, leur argumentation, ni à produire de nouvelles pièces, à formuler de nouvelles offres de preuves après la soumission de la motivation d’appel et de la réponse, conformément à l’article R56 du Code. De plus, le TAS a invité les parties à confirmer au 12 mai 2014 si elles sollicitaient que le TAS tienne une audience. 42. Le 7 mai 2014, l’Appelant a informé le TAS qu’il ne sollicitait pas la tenue d’une audience. 43. Par courrier du 9 mai 2014, l’Intimé a également renoncé à solliciter la tenue d’une audience. 44. Par courrier du 9 juillet 2014, le TAS a informé les parties que l’Arbitre unique souhaitait entendre les parties sur plusieurs points litigieux et qu’il était disposé de tenir une audience à Abu Dhabi (Emirats Arabes Unis). Dans le même courrier, le TAS invitait les parties à informer son Greffe au 14 juillet 2014, de leurs disponibilités le 27, 28 et 29 août 2014. 45. Par courrier du 10 juillet 2014, l’Appelant a informé le TAS qu’il ne pouvait pas assister à l’audience aux dates proposées tout en rappelant qu’il avait opté pour une procédure écrite au sens de l’article R31 du Code. 46. Le 14 juillet 2014, le TAS a accusé réception du courrier du 10 juillet 2014 de l’Appelant en lui rappelant que conformément à l’article R57 du Code, il incombait en dernier lieu à l’Arbitre unique de décider de la tenue d’audiences et qu’en conséquence d’autres dates seront proposées. 47. Le 18 juillet 2014, l’Intimé a informé le TAS qu’elle ne considérait pas nécessaire la tenue de l’audience à Abu Dhabi. 48. Par courrier du 21 juillet 2014, le TAS a informé les parties que l’Intimé n’avait pas répondu quant à ses disponibilité par la tenue de l’audience à Abu Dhabi tout en proposant au parties la possibilité de faire entendre leurs témoins par vidéo-conférence. Dans le même courrier, le TAS invitait l’Intimé à informer son Greffe au 24 juillet 2014 de ses disponibilités le 27, 28 et 29 août 2014. 49. Par courrier du 28 juillet 2014, le TAS a invité l’Appelant à confirmer, au 11 août 2014, sa présence à l’audience à Abu Dhabi du 27 août 2014, date convenant également à l’Intimé qui y assistera par vidéo-conférence. 50. Suite au courriel de l’Appelant du 11 août 2014 et au courrier de l’Intimé du même jour, le TAS a informé les parties en date du 14 août 2014 de la décision de l’Arbitre unique d’annuler l’audience du 27 août 2014 à Abu Dhabi. 51. Souhaitant néanmoins avoir des explications supplémentaires des parties sur plusieurs points litigieux et dès lors que ces dernières avaient renoncé à tenir une audience, le TAS a informé les parties, en date du 27 août 2014, de la décision de l’Arbitre unique d’octroyer un second tour d’écritures permettant de répondre à certaines questions bien précises. Pour ce faire, un délai au vendredi 12 septembre 2014 a été accordé aux parties. 52. En date respectivement du 10 et 12 septembre 2014, l’Appelant et l’Intimé ont adressé au TAS leur mémoire de second tour. 53. En date du 19 octobre 2014, l’Appelant a adressé au TAS l’Ordonnance de procédure, dûment signée par ce dernier. 54. Le 23 octobre 2014, l’Intimé a signé et retourné l’Ordonnance de procédure au Greffe du TAS. IV. POSITIONS DES PARTIES 55. L’objectif de la présente section est de résumer les positions des parties et de donner un aperçu des principaux arguments. A. ARGUMENTS PRINCIPAUX DES PARTIES a) Position de l’Appelant 56. Dans sa déclaration d’appel du 17 février 2014, l’Appelant conteste la décision de la CRL du 31 octobre 2013, en demandant à ce que celle-ci soit annulée et à ce que l’Intimé soit condamné au versement d’un montant d’USD 500’000 au titre de dommage “pour perte de saison sportive et abus de droit d’ester en justice sans fondement légal”. 57. En substance, les arguments de l’Appelant peuvent être résumés de la manière suivante: i. L’Appelant soutient tout d’abord que c’est à tort que la CRL a considéré que l’article 10 du Contrat était abusif sous prétexte que seul le Club pourrait en bénéficier. Se référant tant à l’article 1 du Code des Obligations suisse (ci-après “CO”) qu’aux articles 1101 et 1134 du Code Civil français, l’Appelant considère en effet que le principe de la liberté contractuelle veut que les parties soient tenues par les clauses qu’elles signent. Ainsi, étant donné que le Joueur avait signé sciemment et sans pression le Contrat, il avait de ce fait bien accepté la “clause [du Contrat] de l’indemnisation en cas de rupture prématuré du contrat pour blessure ou maladie”. Considérant ainsi l’article 10 du Contrat comme étant parfaitement valable, l’Appelant était dans son droit le plus complet en résiliant ce dernier avant l’expiration de son terme, en échange du versement à l’Intimé d’un montant équivalent à deux mois de salaire. ii. L’Appelant considère également que c’est à tort que la CRL a retenu qu’il y avait eu une “rupture abusive du contrat” de sa part. Se prévalant en effet de l’article 14 du Règlement FIFA selon lequel en présence d’un cas de juste cause, un contrat peut être résilié par l’une ou l’autre des parties sans entraîner de conséquences (ni paiement d’indemnités, ni sanctions sportives), l’Appelant considère ainsi que le principe de stabilité contractuelle entre professionnels et clubs n’est pas immuable et qu’il ne privait pas une partie de la possibilité de rompre de manière prématurée un contrat pour juste cause. Au vu de l’incapacité professionnelle du Joueur certifiée médicalement et s’étendant à plus de six mois et du fait que ce dernier n’était plus en mesure de retourner “au jeu” avant une longue période, l’Appelant considère que c’est pour de justes motifs que le Contrat a été résilié et dans le respect des provisions prévues à l’article 7 de ce dernier. Par ailleurs, au vu de l’absence de réserves de l’Intimé quant au contenu du Contrat lors de sa signature, c’est en se fondant sur des clauses contractuelles acceptées et reconnues par les parties ainsi que sur la base d’un rapport médical digne de foi que l’Appelant a résilié prématurément le Contrat. iii. Quant à l’éventuel dommage subi par l’Intimé suite à la résiliation du Contrat, l’Appelant rappelle non seulement que l’Intimé avait été pris en charge à ses frais à la clinique Aspetar de Doha, l’un des meilleurs centres hospitaliers, mais que de toute manière il ne pouvait être tenu responsable des blessures de l’Intimé. Selon l’Appelant, il résulte de ce qui précède qu’il n’était “aucunement obligé de maintenir un contrat avec un joueur devenu incapable de donner le rendement” pour lequel il était rémunéré, sans quoi il s’agirait d’un cas typique d’“enrichissement sans causes”. Bien au contraire, étant donné que l’Appelant avait investi plus de USD 500’000 lors de l’achat de l’Intimé, il était en droit de demander une indemnisation étant donné qu’au vu de la blessure de l’Intimé, il ne pouvait plus bénéficier de ses services pour les saisons sportives pour lesquelles il était encore sous contrat. L’Appelant considère également qu’étant donné que la résiliation du Contrat a eu lieu en juillet 2001, avant donc la fin de la saison sportive 2010/2011, la carrière de l’Intimé n’avait pas pu être affectée et qu’en conséquence sa demande d’indemnisation pour résiliation de contrat en cours de saison n’était pas fondée. A ce sujet, l’Appelant rappelle que selon l’article 16 du Règlement FIFA, l’interdiction de résiliation de contrat en cours de saison n’est valable qu’en “absence d’incapacité physique” du joueur. iv. Enfin, l’Appelant se prévaut de l’article R48 du Code pour nominer M. JALAL EL AHDAB en tant qu’Arbitre unique. b) Position de l’Intimé 58. Dans son Mémoire de réponse du 25 avril 2014, l’Intimé persiste dans ses conclusions déposées le 2 juin 2011 auprès de la CRL, rappelle la validité de la décision de la CRL du 31 octobre 2013 et demande le rejet total de l’appel de l’Appelant. 59. En substance, les arguments de l’Intimé peuvent être résumés de la manière suivante: i. L’Intimé rappelle tout d’abord que contrairement à ce qui est avancé par l’Appelant, la décision de la CRL ne viole en rien les termes du contrat. Bien au contraire, dite décision s’est basée sur l’analyse de la validité des différents articles pertinents de ce dernier. C’est ainsi dans le respect des relations contractuelles que la CRL a non seulement invalidé la clause léonine de l’article 10 du Contrat en tant qu’elle violait le principe de stabilité contractuelle instauré par le Règlement FIFA, mais qu’elle a également réfuté les arguments de l’Appelant tendant à trouver un juste motif à la résiliation du Contrat. L’Intimé souligne encore la cohérence dont a fait preuve la CRL dans le calcul de l’indemnité auquel il a eu droit. Ainsi selon l’Intimé, la décision du 31 octobre 2013 ne contient aucune “violation, illégalité ou même un quelconque vice” et doit de ce fait être maintenue. ii. L’Intimé conteste également les arguments de l’Appelant dénonçant la violation du principe “pacta sunt servanda”. Selon l’Intimé, ce principe ne saurait être considéré comme étant absolu dans les transactions juridiques et dans les contrats de travail qui produisent des effets dans le football fédéré. En effet, un contrat doit toujours être interprété en fonction des différents aspects sportifs et sociaux, en gardant à l’esprit le rôle social de celui-ci, de la bonne foi objective et de l’équilibre entre les parties sans oublier qu’en cas de doute, le contrat doit être interprété en faveur du travailleur. iii. L’Intimé rappelle également que contrairement à ce que l’Appelant avance, les conditions contractuelles n’ont guère pu être négociées, étant donné qu’elles avaient déjà été rédigées “avant même l’acceptation de l’offre” assimilant ce Contrat à un contrat “d’adhésion”. De plus le Contrat doit être interprété sous l’égide des différents règlements FIFA ainsi que, selon l’article 60 alinéa 2 des Statuts de la FIFA (ci-après les “Statuts”), du droit suisse et de ses principes généraux. C’est ainsi à tort que l’Appelant interprète l’article 10 du Contrat sous l’égide du Code Civil français. iv. En rappelant une jurisprudence du TAS, l’Intimé considère que la blessure survenue au cours d’un match le 25 mars 2011 ne saurait en aucun cas être considérée comme étant un juste motif autorisant une résiliation anticipée du Contrat étant donné que l’article 18 alinéa 4 du Règlement FIFA précise que la validité d’un contrat ne peut dépendre du résultat positif d’un examen médical. v. L’Intimé dénonce l’argumentation de l’“enrichissement sans causes”de l’Appelant en tant qu’il y a un lien de causalité entre le comportement de l’Appelant et le dommage subi par l’Intimé et que la réparation de celui-ci est expressément prévu par l’article 17 du Règlement FIFA. Par ailleurs, l’Intimé rappelle que les montants reçus par celui-ci dans le cadre de ses contrats de travail subséquents avaient déjà été comptabilisés par la CRL dans le cadre du calcul de l’indemnité. vi. Enfin, c’est à tort que l’Appelant considère que l’Intimé a abusé de son droit d’ester en justice en tant qu’il n’avait pas de fondement légal. Au contraire, la demande de l’Intimé est des plus légitimée car elle se base sur la violation des articles 13 et 17 alinéa 1 et 2 du Règlement FIFA et que la compétence de la FIFA est expressément prévue à l’article 22 lettre b de ce même règlement. B. ARGUMENTS COMPLÉMENTAIRES DES PARTIES a) Les questions posées 60. Souhaitant néanmoins avoir des explications supplémentaires sur le contexte de la résiliation du contrat du Joueur et sur la procédure du présent arbitrage, l’Arbitre unique a ordonné, en date du 27 août 2014, un deuxième tour d’écriture devant permettre d’éclaircir, entre autre, les éléments suivants: i. Raisons contractuelles de la résiliation du contrat du Joueur ii. La durée réelle de l’incapacité de joueur du Joueur iii. Période protégée et résiliation pour justes motifs iv. Droit applicable au fond b) Position de l’Appelant 61. En substance, l’Appelant reprend dans son mémoire de second tour du 10 septembre 20142 les mêmes arguments que dans ses précédentes écritures. 62. Il rappelle que la résiliation du contrat de travail du Joueur s’est faite sur la base de l’article 7 dudit Contrat prévoyant qu’en cas d’incapacité du Joueur pour des raisons de maladie ou d’accident pour une période allant de trois à six mois, le Club est autorisé à réduire le salaire mensuel du Joueur à hauteur de 50% et même à résilier son contrat si son incapacité devait durer pour une période supérieure à 6 mois. 63. Selon l’Appelant, le Joueur s’était blessé le 25 mars 2011. Au vu de l’ampleur de la blessure et de l’incapacité de continuer à jouer de ce dernier, l’Appelant l’a informé le 25 mai 2011 de la résiliation du Contrat, en conformité avec l’article 7 alinéa 4 du Contrat. 64. Au sujet la durée réelle de l’incapacité de jouer de l’Intimé, l’Appelant avance que le rapport médical du 19 mai 2011 indiquait “clairement que le joueur n’était plus en mesure de retourner au jeu avant une longue période…” et que l’incapacité du Joueur de plus de 6 mois avait été certifiée par le rapport médical. 65. Concernant la validité de l’article 10 du Contrat, l’Appelant rappelle que ce dernier est valable étant donné qu’il émane de la volonté commune des parties. Il en résulterait selon l’Appelant qu’au vu du principe de la liberté contractuelle selon lequel les parties à un contrat sont tenues par les clauses qu’elles signent (pacta sunt servanda), le Joueur – en signant le Contrat – acceptait non seulement la teneur de l’article 7 mais également celle de l’article 10 permettant au Club de résilier le Contrat avant l’expiration de son terme en versant au Joueur un montant équivalent à deux mois de son salaire. 2 Mémoire de second tour du Club du 10 septembre 2014. 66. Quant au droit applicable au fond du litige, l’Appelant est d’avis qu’au vu du lieu de la conclusion et de l’exécution du Contrat, ce dernier devrait être le droit qatari. c) Position de l’Intimé 67. Dans son mémoire de second tour du 12 septembre 2014, l’Intimé reprend également les mêmes arguments présentés dans ses précédentes écritures. 68. Ainsi, il conteste l’interprétation absolue faite par l’Appelant du principe pacta sunt servanda. Selon l’Intimé, la liberté contractuelle doit être appliquée dans le respect de valeurs juridiques reprises et codifiées tant par la réglementation FIFA que le droit suisse. 69. Selon l’Intimé, l’article 10 du Contrat ne peut être considéré que comme “un abus de droit manifeste” abusif étant donné qu’il offre de manière unilatérale au Club la possibilité de résilier le Contrat avant l’expiration de son terme, en violation du principe de l’égalité entre les parties. L’Intimé rappelle également qu’il ne pouvait en rien négocier le Contrat – qu’il qualifie de contrat d’adhésion -, ce dernier ayant été déjà préparé par l’Appelant avant même l’acceptation de l’offre. 70. Au sujet de la durée réelle de son incapacité de jouer, l’Intimé rappelle que s’il est vrai qu’il s’était blessé le 25 mars 2011 et qu’il a dû subir un traitement médical, il a pu néanmoins rapidement jouer à nouveau avec son ancien Club, São Bernardo, qui l’avait réengagé et ce, dès le 27 juillet 2011, date à laquelle il a participé au match São Bernardo contre GE Osasco FC. 71. Ainsi et malgré l’interruption de son traitement médical occasionné par la résiliation anticipée par l’Appelant, sa réelle incapacité du jouer s’est avérée de n’être d’une durée que de 4 mois. 72. Concernant l’existence d’un juste motif sur laquelle l’Appelant aurait pu se fonder pour résilier le Contrat, l’Intimé se réfère à la pratique de la FIFA en la matière, codifiée à l’article 14 du Règlement FIFA. Il conclut que la résiliation unilatérale du Contrat par l’Appelant, avant l’expiration de son terme, ne pouvait se fonder sur aucune juste cause. 73. Au sujet des sanctions sportives devant être appliquée à l’Appelant, l’Intimé se réfère à l’article 17 du Règlement FIFA et demande à ce que l’Appelant se voit interdire l’engagement de joueur durant deux saisons. 74. Quant au droit applicable au fond du litige, l’Intimé est d’avis que l’Arbitre unique devrait appliquer en premier lieu les différents règlements FIFA et subsidiairement le droit civil suisse. V. DROIT A. COMPÉTENCE DU TAS 75. Conformément à l’article 186 de la Loi fédérale sur le droit international privé (ci-après: “LDIP”), le TAS statue sur sa propre compétence. 76. En vertu de l’article R47 du Code, “[u]n appel contre une décision d’une fédération, association ou autre organisme sportif peut être déposé au TAS si les statuts ou règlements dudit organisme sportif le prévoient ou si les parties ont conclu une convention d’arbitrage particulière et dans la mesure aussi où l’appelant a épuisé les voies de droit préalables à l’appel dont il dispose en vertu des statuts ou règlements dudit organisme sportif”. 77. De plus, selon l’article 67 alinéa 1 des Statuts, “tout recours contre des décisions prises en dernière instance par la FIFA, notamment les instances juridictionnelles, ainsi que contre des décisions prises par les confédérations, les membres ou les ligues doit être déposé auprès du TAS dans un délai de vingt-et-un jours suivant la communication de la décision”. 78. Selon l’alinéa 2 du même article, “le TAS ne peut être saisi que lorsque toutes les autres instances juridictionnelles ont été épuisées”. 79. Enfin, selon l’article 24 alinéa 2 in fine du Règlement FIFA “[…] les décisions de la Chambre de Résolution des Litiges ou du juge de la CRL peuvent faire l’objet d’un recours devant le Tribunal Arbitral du Sport (TAS)”. 80. Le recours au TAS contre une décision de la CRL étant expressément prévu à l’article 24 alinéa 2 du Règlement FIFA, la voie d’appel au TAS est ouverte, celle-ci étant au demeurant expressément prévue en marge finale de la décision de la CRL du 31 octobre 2013. 81. Par conséquent, en vertu de l’article R47 du Code, de l’article 67 des Statuts et de l’article 24 du Règlement FIFA, l’Arbitre unique constate que le TAS est compétent pour connaître du présent litige. B. DROIT APPLICABLE 82. Le siège du TAS se trouvant en Suisse et aucune des parties n’ayant, au moment de la conclusion de la convention d’arbitrage ni son domicile ni sa résidence habituelle en Suisse, les dispositions du chapitre 12 relatif à l’arbitrage international de la LDIP sont applicables au présent arbitrage conformément à l’article 176 alinéa 1 LDIP. 83. Dans le chapitre 12 de la LDIP, la question des règles de droit applicable au fond est régie par l’article 187 LDIP. Cette disposition prévoit que le “tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits”. L’alinéa 2 de l’article 187 LDIP précise que les parties peuvent autoriser le Tribunal arbitral à statuer en équité. 84. Le fait que les parties puissent notamment permettre aux arbitres de décider en équité, c ’est-à- dire en dehors de toute référence à des normes étatiques particulières, illustre la libe rté accordée aux parties par l’article 187 LDIP en ce qui concerne le choix des règles applicables au fond de leur litige. Si l’article 187 LDIP permet le recours à l’équité en lieu et place d’un système particulier de normes étatiques, il est logique de conclure qu’il permet a fortiori de se référer à un système de normes non étatiques. Le simple argument a majore, minus justifie cette conclusion. 85. L’Arbitre unique considère à cet égard que le sport est par nature un phénomène transcendant les frontières. Il est non seulement souhaitable, mais indispensable que les règles régissant le sport au niveau international aient un caractère uniforme et largement cohérent dans le monde entier. Pour en assurer un respect au niveau mondial, une telle réglementation ne doit pas être appliquée différemment d’un pays à l’autre, notamment en raison d’interférences entre droit étatique et réglementation sportive. Le principe de l’application universelle des règles de la FIFA – ou de toute autre fédération internationale – répond à des exigences de rationalité, de sécurité et de prévisibilité juridique. Tous les membres de la famille mondiale du football sont ainsi soumis aux mêmes règles, qui sont publiées. L’uniformité qui en résulte tend à assurer l’égalité de traitement entre tous les destinataires de ces normes, quel que soit le pays où ils se trouvent. 86. L’article 187 LDIP permet aux parties de choisir comme droit applicable un droit étatique, tel que, par exemple, le droit applicable au siège de la fédération internationa le concernée (voir article R58 du Code). Néanmoins, l’application directe de l’ordre juridique d’un seul pays ne convient pas forcément au sport organisé au niveau mondial. L’article 187 LDIP permet une approche moins nationale, en réservant la possibilité d’un renvoi à des règles de droit non étatiques. Comme le souligne à juste titre RIGOZZI A. (L’arbitrage international en matière de sport, Bâle et al. 2005, no 1178), “les réglementations sportives représentent l’exemple typique de “règles de droit” que les parties ou les arbitres peuvent choisir en application de l’art. 187 al. 1 LDIP”. 87. Par ailleurs, une élection de droit peut aussi être indirecte. Selon la doctrine suisse dominante, le choix des parties peut être indirect lorsqu’elles se soumettent à un règlement d’arbitrage qui contient lui-même des dispositions au sujet de la désignation du droit applicable. Une élection de droit tacite et indirecte par renvoi au règlement d’une institution d’arbitrage est admise (KARRER P., Basler Kommentar zum Internationalen Privatrecht, 1996, N. 92 et 96, ad art. 187 LDIP; POUDRET/BESSON, Droit comparé de l’arbitrage international, Zurich et al. 2002, N. 683, p. 613 et références citées; DUTOIT B., Droit international privé suisse, Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 4ème éd., Bâle et al. 2005, N. 4 ad art. 187 LDIP, p. 657; CAS 2004/A/574). 88. S’agissant de la procédure applicable aux arbitrages devant le TAS, l’article R58 du Code prévoit ce qui suit: “La Formation statue selon les règlements applicables et, subsidiairement, selon les règles de droit choisies par les parties, ou à défaut de choix, selon le droit du pays dans lequel la fédération, association ou autre organisme sportif ayant rendu la décision attaquée à son domicile ou selon les règles de droit dont la Formation estime l’application appropriée. Dans ce dernier cas, la décision de la Formation doit être motivée”. 89. Par ailleurs, selon l’article 66 alinéa 2 des Statuts: “La procédure arbitrale est régie par les dispositions du Code de l’arbitrage en matière de sport du TAS. Le TAS applique en premier lieu les divers règlements de la FIFA ainsi que le droit suisse à titre supplétif ”. 90. En l’espèce, les règlements applicables sont indiscutablement les règles de la FIFA, puisque l’appel est dirigé contre une décision rendue par cette fédération internationale. En vertu de l’article 66 alinéa 2 des Statuts de la FIFA, “[l]a procédure arbitrale est régie par les dispositions du Code de l’arbitrage en matière de sport du TAS. Le TAS applique en premier lieu les divers règlements de la FIFA ainsi que le droit suisse à titre supplétif”. La première phrase citée se réfère au droit procédural, la deuxième au droit matériel. 91. In casu, l’Appelant est un club de football, membre de sa fédération nationale, elle-même affiliée à la FIFA. En tant que tels, ils ont pris l’engagement de respecter la réglementation établie par leur fédération nationale et ce faisant, ils se sont soumis indirectement aux directives de la FIFA (ATF 119 II 271; RIEMER H. P., Berner Kommentar ad art. 60-79 du Code Civil suisse, N. 511 et 515; CAS 2004/A/574). 92. De plus, l’Intimé est un joueur professionnel. En cette qualité, il est notamment tenu de respecter les Statuts et les règlements de la FIFA. 93. Ainsi, s’il est vrai que le Football Player Contract Schedule prévoit à son article 13 l’application du droit qatari, il résulte néanmoins de ce qui précède, que les parties ont, à tout le moins tacitement ou indirectement choisi de se soumettre aux divers règlements de la FIFA, lesquels doivent être appliqués en premier lieu, le droit suisse étant applicable à titre supplétif. C. RECEVABILITÉ DE L’APPEL 94. Selon l’article R49 du Code: “[e]n l’absence de délai d’appel fixé par les statuts ou règlements de la fédération, de l’association ou de l’organisme sportif concerné ou par la convention particulière préalablement conclue, le délai d’appel est de vingt-et-un jours dès la réception de la décision faisant l’objet de l’appel (…)”. 95. Conformément à l’article 67 des Statuts, un appel interjeté contre une décision prise en dernière instance par la FIFA doit être déposée auprès du TAS dans les 21 jours suivant la notification de la décision attaquée. 96. En l’espèce, la déclaration d’appel du 17 février 2014 du Club sportif Al Khor SC est dirigée contre la décision de la CRL du 31 octobre 2013. Toutefois cette dernière ayant été notifiée à l’Appelant le 2 février 2014, la déclaration d’appel déposée le 17 février 2014 l’a bien été dans un délai de vingt-et-un jours suivant la communication de la décision. 97. L’appel déposé par le Club sportif Al Khor SC est donc recevable en la forme. D. POUVOIR D’EXAMEN DE L’ARBITRE UNIQUE 98. Le pouvoir d’examen de l’Arbitre unique dans la présente procédure arbitrale d’appel est régi par les dispositions des articles R47 et suivants du Règlement de Procédure du TAS. En particulier, l’article R57 confère au TAS un pouvoir d’appréciation de plein droit des éléments de fait et de droit dans le cadre de l’instruction. Néanmoins, le TAS a le pouvoir de juger sur le différend tel que défini par la décision soumise à l’appel et sa juridiction, fondée sur la clause compromissoire contenue dans les normes des fédérations nationales, est limitée par la portée objective et subjective de la décision appelé. E. NOMINATION DE MONSIEUR JALAL EL AHDAB EN TANT QU’ARBITRE UNIQUE 99. Dans la dernière des conclusions de sa déclaration d’appel du 17 février 2014, l’Appelant a demandé à ce que Monsieur JALAL EL AHDAB, ressortissant libanais et figurant sur la liste des arbitre du TAS, soit désigné en tant qu’Arbitre unique, invoquant par ailleurs l’article R48 du Code. 100. Or, l’article R48 du Code prévoit que la déclaration d’appel doit comprendre “la désignation de l’arbitre choisi par l’appelant sur la liste des arbitres du TAS, sauf si l’appelant demande la nomination d’un arbitre unique” (mise en relief ajoutée). 101. De plus, selon l’article R54 alinéa 1 du Code, “[s]i les parties sont convenues de recourir à un arbitre unique ou si le Président de la Chambre estime que l’appel doit être soumis à un arbitre unique, le Président de la Chambre désigne l’arbitre unique dès réception de la déclaration d’appel ou dès qu’une décision sur le nombre d’arbitres est rendue. Frais et dépens” (mise en relief ajoutée). 102. Comme il l’a été précédemment mentionné, l’Appelant a demandé à ce que l’appel soit soumis à un arbitre unique. Par ailleurs, l’Intimé n’a à aucun moment demandé à ce qu’il soit fait recours à trois arbitres. 103. Il résulte de ce qui précède qu’il est du ressort du Président de la Chambre d’appel du TAS de désigner l’arbitre unique, ce qu’il a fait le 27 mars 2014 en nommant Me Olivier Carrard. 104. Partant, la requête de l’Appelant tendant à nommer Monsieur JALAL EL AHDAB en tant qu’Arbitre unique doit être rejetée. F. EXAMEN DES QUESTIONS DE FOND a) Quant à la validité de l’article 10 du Contrat 105. L’Appelant soutient que c’est à tort que la CRL a considéré que l’article 10 du Contrat était abusif car étant préférentielle au Club. 106. A titre liminaire, l’Arbitre unique considère primordial de rappeler la formulation de l’article 10 du Contrat. Dans sa version anglaise, ce dernier précise que: “The FCC [the Club] may terminate this contract before its expiring term and the first party will by to the second party amount of two month salary only”. 107. La traduction libre de cet article peut être faite de la manière suivante: “Le FCC [le Club] peut résilier le contrat avant l’expiration de son terme et la première partie devra à la seconde partie un montant équivalent à deux mois de salaire seulement”. 108. Afin d’analyser la validité de l’article 10 du Contrat, il convient d’interpréter celui-ci à l’aune des dispositions idoines du Règlement FIFA et de son Commentaire. 109. Ainsi, en prévoyant expressément qu’“un contrat entre un joueur professionnel et un club peut prendre fin uniquement à son échéance ou d’un commun accord”, l’article 13 du Règlement se veut le garant du principe de stabilité contractuelle. 110. A ce sujet, le Commentaire du Règlement précise que “le règlement vise à garantir que si un club et un joueur s’engagent dans une relation contractuelle, le contrat sera honoré par les deux parties. Un contrat entre un joueur professionnel et un club ne peut par conséquent être résilié qu’à son échéance ou d’un commun accord. La rupture unilatérale du contrat sans juste cause, en particulier durant la période dite protégée, est vivement déconseillée” (Commentaire ad. article 13, p. 38). 111. Cependant, ledit principe de stabilité contractuelle n’est pas immuable. En effet, et comme le prévoit l’article 14 du Règlement “en présence d’un cas de juste cause, un contrat peut être résilié par l’une ou l’autre des parties sans entraîner de conséquences (ni paiement d’indemnités, ni sanctions sportives)”. 112. Toutefois, le Règlement ne prévoit pas les conséquences d’une disposition contractuelle octroyant la possibilité pour une partie de résilier unilatéralement le Contrat sans justes motifs. La réponse à cette problématique est à rechercher dans le droit suisse. 113. A ce sujet, l’article 19 alinéa 1 CO prévoit que “l’objet d’un contrat peut être librement déterminé, dans les limites de la loi”. Son alinéa 2 prévoit quant à lui que “la loi n’exclut les conventions des parties que lorsqu’elle édicte une règle de droit strict, ou lorsqu’une dérogation à son texte serait contraire aux mœurs, à l’ordre public ou aux droits attachés à la personnalité”. 114. Par ailleurs, l’article 20 alinéa 1 CO prévoit que “le contrat est nul s’il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux mœurs”. 115. Bien que l’article 10 du Contrat soit intitulé en anglais “termination by the club or the player” ou traduit librement en français “résiliation par le club ou le joueur”, l’absence du terme “joueur” dans le corps de l’article fait naître une telle disproportion entre les droits des deux parties qu’il en résulte un profond sentiment d’arbitraire, valeur antagoniste aux mœurs de notre société et aux principes fondamentaux de la FIFA. Elle n’offre dans les faits la possibilité qu’à l’Appelant (le Club) de résilier le Contrat avant son expiration en août 2013, qui plus est sans devoir avancer de justes causes. 116. En d’autres termes, elle autorise l’Appelant à choisir de maintenir ou de mettre un terme à la relation contractuelle avec l’Intimé. Ainsi, selon la jurisprudence du TAS, “un système qui livre un travailleur à l’arbitraire de son employeur est […] “immoral” et donc incompatible avec les valeurs fondamentales de l’ordre juridique suisse” (CAS 2005/A/983 & 984, para. 92; mise en relief ajoutée). 117. Une telle interprétation se justifie également par la disproportion évidente de la contreprestation due en cas de résiliation anticipée du Contrat par l’Appelant. L’on ne saurait retenir qu’une indemnité de deux mois serait suffisante pour effacer le caractère arbitraire de cette disposition. 118. Ainsi, grâce à une abondante jurisprudence à ce sujet (notamment CAS 2008/A/1517, para 42 ss.) et après interprétation des différentes dispositions de droit suisse susmentionnées, l’Arbitre unique considère que toutes dispositions d’un contrat contraires aux règles de la FIFA doivent être considérées comme invalides. 119. In casu, le Règlement prévoit qu’un contrat peut prendre fin “uniquement à son échéance ou d’un commun accord” (article 13 du Règlement FIFA) ou “en présence d’un cas de juste cause […] par l’une ou l’autre des parties” (article 14 du Règlement FIFA). Ainsi, étant donné que l’article 10 du Contrat octroie la possibilité pour une partie de résilier unilatéralement le Contrat sans justes causes, l’Arbitre unique arrive à la conclusion que ladite disposition est bien contraire aux règles de la FIFA et en tant que telle, doit être considérée comme invalide et non applicable au cas d’espèce. 120. L’Appelant ne pouvait donc pas invoquer un article invalide du Contrat pour résilier unilatéralement ce dernier sans justes causes. 121. Partant, le grief de l’Appelant est mal fondé. b) Quant à la résiliation unilatérale du Contrat pour juste cause 122. Il résulte de l’interprétation qui peut être faite des arguments et des conclusions soutenus par l’Appelant dans son mémoire d’appel que si d’aventure l’Arbitre unique devait considérer que l’article 10 du Contrat était invalide, l’Appelant considère qu’il disposait de toute manière de justes causes pour résilier unilatéralement le Contrat. 123. In casu, se prévalant de l’article 14 du Règlement FIFA et de l’article 7 alinéa 4 du Contrat, l’Appelant considère qu’au vu de l’incapacité professionnelle du Joueur - certifiée médicalement et s’étendant à plus de six mois - ainsi que du fait il n’était plus en mesure de retourner “au jeu” avant une longue période, il avait de justes causes pour résilier unilatéralement le Contrat. 124. A titre liminaire, l’Arbitre unique rappelle qu’en application de l’article 8 CC, “chaque partie doit […] prouver les faits qu’elle allègue pour en déduire son droit”. Il revient donc à l’Appelant de prouver en quoi le comportement de l’Intimé constitue une juste cause permettant la résiliation unilatérale du Contrat. 125. Selon l’article 14 du Règlement, “en présence d’un cas de juste cause, un contrat peut être résilié par l’une ou l’autre des parties sans entraîner de conséquences (ni paiement d’indemnités, ni sanctions sportives)”. 126. Le Commentaire précise à ce sujet qu’ “il convient de définir au cas par cas ce qu’est la juste cause et si les conditions de la juste cause sont réunies. Une infraction au contrat de travail ne constitue pas en elle-même un motif suffisant de résiliation pour juste cause. Cependant, si le comportement transgressif persiste ou si plusieurs infractions se suivent au cours d’une certaine période, le non-respect du contrat est très probablement de nature à justifier la résiliation unilatérale de celui-ci par la partie lésée” (Commentaire ad. article 14, p. 39). 127. L’Arbitre unique rappelle que les règlements de la FIFA ne définissent pas ce qui peut constituer une juste cause pour résilier unilatéralement le contrat et qu’il faut pour cela se référer à l’abondante jurisprudence du TAS à ce sujet. 128. A ce sujet et se référant à l’arrêt du TAS du 16 février 2010 (CAS 2009/A/1956), l’Arbitre unique précise qu’un [traduction libre] “athlète était dans l’obligation de faire tout le nécessaire pour maintenir sa capacité de travail. S’il devait enfreindre cette obligation, cela peut constituer un “juste motif” de résiliation unilatérale, comme cela a déjà été accepté par un Panel arbitral dans une affaire où le joueur avait fait usage de cocaïne (CAS 2005/A/876, p. 13). Toutefois, si le joueur n’est pas à même d’offrir au club sa capacité de travail à cause d’une maladie ou d’une blessure, cela ne constitue pas un manquement à une obligation pouvant être invoqué comme “juste motif” permettant une résiliation unilatérale du contrat. […] Il n’y a pas non plus de manquement à une obligation si le joueur ne joue pas au niveau souhaité par le club. (CAS 2003/O/535, p. 13)” (mise en relief ajoutée). 129. Dans le cas d’espèce, l’Arbitre unique remarque qu’il est incontesté par les parties que le Joueur s’est blessé au cours d’un match le 25 mars 2011, au cours duquel il jouait pour le compte de l’Appelant. Il est également incontesté par les parties que cette blessure est involontaire. 130. De telles blessures survenues au cours d’un match ou lors d’un entrainement faisant partie des risques quotidiens de la carrière sportive d’un joueur, l’on ne saurait reprocher au Joueur d’avoir perdu sa capacité de travail alors qu’il exerçait ni plus ni moins l’activité pour laquelle il avait été engagé par l’Appelant. 131. Si l’usage de drogue ou l’absence répétée d’un joueur lors d’entrainements peuvent, par exemple, constituer un manquement grave aux devoirs de celui-ci, pouvant justifier alors la résiliation unilatérale du contrat de la part d’un club, tel n’est pas le cas lorsque la raison de la perte de la capacité de travail d’un joueur est inhérente à son activité professionnelle d’athlète. 132. Quand bien même le Club n’a pas eu d’influence sur la blessure du Joueur, ce dernier a rempli son obligation de travail avec toute la diligence due. Ne pouvant lui reprocher un quelconque manquement, le Joueur n’a commis aucune violation grave de ses obligations, condition sine qua non pour l’existence d’une juste cause permettant résilier unilatéralement le Contrat. 133. A titre superfétatoire, l’Arbitre unique précise - comme l’a rappelé l’Intimé dans son mémoire de second tour - que s’il est vrai que ce dernier s’était blessé le 25 mars 2011 et qu’il a dû subir un traitement médical, il a pu néanmoins rapidement jouer à nouveau avec son ancien Club, São Bernardo, qui l’avait réengagé et ce, dès le 27 juillet 2011, date à laquelle il a participé au match São Bernardo contre GE Osasco FC. 134. Ainsi, contrairement à ce qu’a avancé l’Appelant, la réelle incapacité de jouer n’a pas été d’une durée supérieure à 6 mois mais bien que de 4 mois. 135. Partant, le grief de l’Appelant doit par conséquent être rejeté. c) Quant aux conséquences de la résiliation unilatérale du Contrat 136. L’Appelant conteste le fait que l’Intimé ait subi un quelconque dommage du fait de la résiliation unilatérale du Contrat étant donné qu’il avait été pris en charge à ses frais à la clinique Aspetar de Doha et que de toute manière il ne pouvait être tenu responsable des blessures de l’Intimé. 137. Dans sa déclaration d’appel devant le TAS du 17 février 2014, l’Appelant conclut, au contraire, que l’Intimé était tenu à lui verser un montant de USD 500’000 pour “perte de saison sportive” et “abus de droit d’ester en justice sans fondement légal”. 138. Concernant cette conclusion, l’Arbitre unique constate que cette dernière ne figurait pas dans la réponse du Club devant la CRL du 15 septembre 2011. L’Arbitre unique considère ainsi que dite nouvelle conclusion est irrecevable, ne rentrant par conséquent pas dans l’examen du présent appel. 139. Au sujet des dommages encourus par l’Intimé, l’article 17 du Règlement FIFA prévoit que lorsqu’un contrat est résilié sans juste cause, “dans tous les cas, la partie ayant rompu le contrat est tenue de payer une indemnité. Sous réserve des dispositions de l’article 20 et de l’annexe 4 concernant les indemnités de formation et si rien n’est prévu par le contrat, l’indemnité pour rupture de contrat est calculée en tenant compte du droit en vigueur dans le pays concerné, des spécificités du sport et de tout autre critère objectif. Ces critères comprennent notamment la rémunération et autres avantages dus au joueur en vertu du contrat en cours et/ou du nouveau contrat, la durée restante du contrat en cours jusqu’à cinq ans au plus, les frais et dépenses occasionnés ou payés par l’ancien club (amortis sur la période contractuelle) si la rupture intervient pendant une période protégée”. 140. Se référant à une éventuelle indemnisation prévue par le Contrat en cas de rupture du Contrat (au sens de l’article 17 du Règlement), l’Arbitre unique considère que c’est à bon droit que la CRL a retenu que l’indemnisation de deux mois de salaire prévue à l’article 10 ne pouvait en aucun cas être applicable, ce dernier article étant invalide (cf. chap. E a) ci-dessus). Par ailleurs, l’Arbitre unique considère que c’est également à bon droit que la CRL a retenu qu’aucun paiement pour les services rendus par l’Intimé ne restait en suspens. 141. Le Commentaire ne donnant toutefois pas davantage de précisions sur la détermination du montant de l’indemnité, l’Arbitre unique se réfère au droit suisse en vue d’interpréter l’article 17 du Règlement FIFA. 142. Ainsi, selon l’article 97 alinéa 1 CO, “lorsque le créancier ne peut obtenir l’exécution de l’obligation ou ne peut l’obtenir qu’imparfaitement, le débiteur est tenu de réparer le dommage en résultant, à moins qu’il ne prouve qu’aucune faute ne lui est imputable”. 143. De jurisprudence constante, le TAS considère qu’en principe [traduction libre] “la partie ayant subi le préjudice devrait être remise dans la même situation où elle se serait trouvée si contrat avait été correctement exécuté” (CAS 2005/A/801, para 66; CAS 2006/A/1061, para. 15; et CAS 2006/A/1062, para. 22). De plus, la jurisprudence du TAS rappelle que [traduction libre] “selon la doctrine suisse, la partie lésée a droit à une réparation intégrale de ses préjudices, conformément aux principes généraux énoncés à l’article 97 CO. Ainsi, les dommages pris en compte ne sont pas seulement ceux ayant pu causer l ’acte ou l’omission justifiant la résiliation, mais également les intérêts positifs. Les dommages positifs de l ’employé sont les salaires et les autres revenus qu’il aurait obtenus si le contrat avait été exécuté jusqu’à son expiration naturelle” (CAS 2008/A/1447, para. 31). 144. Une interprétation du cas d’espèce sous l’aune de l’article 337c alinéa 1 CO est également pertinente, cette disposition de droit suisse prévoyant les conséquences de la résiliation injustifiée d’un contrat. Ainsi, selon cet article “lorsque l’employeur résilie immédiatement le contrat sans justes motifs, le travailleur a droit à ce qu’il aurait gagné, si les rapports de travail avaient pris fin à l’échéance du délai de congé ou à la cassation du contrat conclu pour une durée déterminée”. 145. Au vu de ce qui précède et étant donné que l’Appelant s’est rendu coupable de résiliation unilatérale du Contrat sans justes motifs, l’Intimé est autorisé à exiger de ce dernier, tant selon le droit suisse que selon la jurisprudence du TAS, le paiement de l’entier de la rémunération qu’il aurait pu prétendre sur la base du Contrat mais également une indemnisation pour tous l es dommages qu’il aurait pu éviter si le Contrat avait été exécuté jusqu’à son expiration naturelle. 146. En conséquence, le calcul des indemnisations dues pour résiliation unilatérale du Contrat sans juste cause peut être fait de la manière suivante. 147. L’Arbitre unique considère que c’est à bon droit que la CRL a retenu le montant de USD 900’000 - soit USD 450’000 pour les saisons 2012 et 2013 - comme base pour le calcul des indemnisations dues au Joueur par le Club. 148. En suivant le raisonnement de la CRL, l’Arbitre unique est également d’avis que de ce montant doit être déduit tout revenu que le Joueur a pu obtenir entre la résiliation unilatérale par le Club du contrat de travail en date du 24 mai 2011 et l’expiration à son terme dudit Contrat en date du 30 juin 2013. 149. En conséquence, de ce montant de USD 900’000 doit être déduit la somme de USD 57’000 que le Joueur a gagné en particulier avec les clubs São Bernardo Futebol Clube et Treze Futebol Club. 150. Enfin, s’il est indubitable que l’article 10 du Contrat doit être considéré comme invalide et non applicable au cas d’espèce, l’Arbitre unique est néanmoins d’avis que le Joueur, en signant ledit Contrat, devait s’attendre à ce que le Club s’en prévale un jour et se sente autorisé à résilier le contrat unilatéralement en versant deux mois de salaire. A ce sujet, l’Arbitre unique souhaite également rappeler aux parties le principe général selon lequel toute partie signant un contrat le fait, sous sa propre responsabilité, et doit donc être attentive aux éventuelles conséquences pouvant découler d’une telle signature. 151. Pour toutes les raisons susmentionnées, l’Arbitre unique considère que c’est à bon droit que la CRL a retenu une indemnisation d’un montant de USD 700’000 devant être versée par le Club au Joueur. 152. Ainsi, il résulte de ce qui précède que non seulement c’est à tort que l’Appelant se serait considéré en droit de demander une indemnisation de USD 500’000 pour “perte de saison sportive” et “abus de droit d’ester en justice sans fondement légal” (cette prétention étant au demeurant de toute manière irrecevable, cf. para 139 ci-dessus) mais que, bien au contraire, l’Appelant s’étant rendu coupable d’avoir résilié unilatéralement le Contrat sans juste cause, ce dernier doit à l’Intimé une indemnisation d’un montant de USD 700’000. 153. Partant, le grief de l’Appelant doit par conséquent être rejeté. d) Conclusion 154. Pour les diverses raisons exposées ci-dessus, la Formation arbitrale conclut que l’appel doit être rejeté et la décision dont appel entièrement confirmée. POUR CES MOTIFS Le Tribunal Arbitral du Sport prononce: 1. L’appel interjeté par le Club sportif Al Khor SC le 17 février 2014 contre la décision du 31 octobre 2013 rendue par la Chambre de Résolution des Litiges de la FIFA est recevable à la forme. 2. L’appel interjeté par le Club sportif Al Khor SC le 17 février 2014 contre la décision du 31 octobre 2013 rendue par la Chambre de Résolution des Litiges de la FIFA est rejeté quant au fond. 3. La décision du 31 octobre 2013 rendue par la Chambre de Résolution des Litiges de la FIFA est confirmée. (…) 6. Toutes autres ou plus amples conclusions sont rejetées.
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