F.I.F.A. – Dispute Resolution Chamber / Camera di Risoluzione delle Controversie – labour disputes / controversie di lavoro (2018-2019) – fifa.com – atto non ufficiale – Decision 10 août 2018

Décision de la
Chambre de Résolution des Litiges
ayant siégé, le 10 août 2018 à Zurich, en Suisse,
composée comme suit:
Geoff Thompson (Angleterre), Président
Carlos González Puche (Colombie), membre
Eirik Monsen (Norvège), membre
Juan Bautista Mahiques (Argentine), membre
Daan de Jong (Pays-Bas), membre
dans l’affaire opposant le joueur,
Joueur, du pays A
ci-après, le demandeur / défendeur reconventionnel
au club,
Club B, du pays B
ci-après, le défendeur / demandeur reconventionnel
et au club,
Club X, du pays X
ci-après, la partie intervenante
concernant un litige contractuel survenu entre les parties
I. Faits
1. Le 10 janvier 2015, le joueur A, du pays A (ci-après : le joueur), et le club du pays B, Club B (ci-après : Club B), ont signé un contrat de travail (ci-après : le contrat) valable du 15 janvier 2015 au 31 décembre 2018.
2. L’art. 5 du contrat stipule, inter alia, que le joueur recevra la rémunération suivante, étant précisé que les salaires sont payables en fin de mois :
a. Un salaire mensuel de 10,000 pour toute la durée du contrat ;
b. Des « primes de signature du contrat », ventilées comme suit :
i. USD 20,000 payable au 30 janvier 2015
ii. USD 25,000 payable au 30 juin 2015
iii. USD 88,000 payable au 3 juin 2016
iv. USD 108,000 payable au 30 juin 2017
v. USD 108,000 payable au 30 juin 2018
vi. USD 54,000 payable au 31 décembre 2018
3. L’article 10 du contrat stipule par ailleurs que « pendant la durée du contrat et si le [joueur] reçoit une proposition émanant d’un club étranger supérieur à 10,000 pour le [Club B], le [Club B] s’engage à le libérer ».
4. Le 14 décembre 2015, le joueur et le Club B ont signé un avenant au contrat de travail, lequel prenait effet « à compter du 17 décembre 2015 » et prévoyait à son article 5 que « paragraphe b) Prime de signature qui devient désormais comme suit », i.e :
a. Pour la saison sportive 2015/2016, un total de USD 70,000 ou l’équivalent de 640,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 200,000 au 5 janvier 2016 ;
ii. 240,000 au 30 mars 2016 ;
iii. 200,000 au 30 juin 2016
b. Pour la saison sportive 2016-2017, un total de USD 140,000 ou l’équivalent de 1,280,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 320,000 au 5 janvier 2017 ;
ii. 320,000 au 30 avril 2017 ;
iii. 320,000 au 30 juillet 2017 ;
iv. 320,000 au 30 octobre 2017 ;
c. Pour la saison sportive 2017-2018, un total de USD 150,000 ou l’équivalent de 1,360,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 340,000 au 5 janvier 2018 ;
ii. 340,000 au 5 avril 2018 ;
iii. 340,000 au 5 juillet 2018 ;
iv. 340,000 au 5 octobre 2018 ;
d. Pour la saison sportive 2018-2019, un total de USD 160,000 ou l’équivalent de 1,480,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 370,000 « au … janvier 2019 » ;
ii. 370,000 « au … avril 2019 » ;
iii. 370,000 « au … juillet 2019 » ;
iv. 370,000 « au … octobre 2019 » ;
5. Le contrat ainsi que l’avenant au contrat ne contiennent aucune clause de compensation relative au cas de rupture de contrat.
6. Le 11 juillet 2015, le joueur, par l’intermédiaire de son agent, mettait le Club B via email en demeure de payer « tous ses arriérés de rémunération » dans un délai de sept jours sous peine de résilier le contrat de travail.
7. Le 1 août 2016, le joueur a notifié par écrit au Club B la rupture du contrat, estimant que ce dernier avait manqué à son obligation de lui payer l’entièreté de ses émoluments. Selon le joueur, le Club B « s’étant engagé à payer les arriérés financiers du [joueur] le 14 décembre 2015, le [joueur] a signé un avenant au premier contrat professionnel ». A cet égard, le joueur ajoutait que le Club B « n’a de nouveau pas respecté pleinement ses obligations financières » et considérait, dès lors, avoir une juste cause pour résilier unilatéralement le contrat.
8. En date du 3 octobre 2016, le joueur déposait une requête devant la FIFA, affirmant avoir rompu son contrat de travail pour juste cause et demandant à ce qu’il lui soit versé un montant total de 5,210,000, comme suit :
a. A titre d’arriérés de rémunération :
i. 110,000 à titre de salaires impayés de janvier 2015 à mars 2015 (i.e. 3 x 10,000), de juillet 2015 à décembre 2015 (i.e. 6 x 10,000) et de juin 2016 à juillet 2016 (i.e. 2 x 10,000) ;
ii. 690,000 à titre de primes impayées, à savoir :
1. « 50,000 au 28 décembre 2015 », correspondant « au reste de la prime de signature pour la saison 2014-2015 » ;
2. « 200,000 au 5 janvier 2016 » ;
3. « 240,000 au 30 mars 2016 » ;
4. « 200,000 au 30 juin 2016 »
b. A titre de compensation pour rupture de contrat :
i. 290,000, correspondant « aux salaires fixes d’août 2016 jusqu’à décembre 2018 » (i.e. 29 x 10,000) ;
ii. 4,120,000 correspondant aux primes de signature « conformément à l’avenant » (i.e. 1,280,000 pour la saison sportive 2016-2017 + 1,360,000 pour la saison sportive 2017-2018 + 1,480,000 pour la saison sportive 2018-2019, cf. point I.4 b), I.c) et I.d) ci-dessus).
Le joueur demandait également à ce qu’un intérêt de 5% l’an soit appliqué sur les montants exigés depuis « leur date d’exigibilité respective jusqu’à parfait paiement ».
9. Dans son argumentation, le joueur affirmait avoir mis le Club B en demeure « à des occasions répétées, entre autres par un email du 11 juillet 2015 » et observait que la conclusion de l’avenant était intervenue après qu’il « ait dû faire remarquer au [Club B] de manière répétée ses manquements financiers ». Dès lors, le joueur soutenait « qu’en dépit des correspondances précitées, le [Club B] n’a daigné réagir de quelque façon » et estimait en conséquence avoir eu une juste cause pour résilier son contrat de travail le 1er août 2016.
10. Dans sa réponse à la plainte du joueur, le Club B rejetait dans son ensemble les conclusions de ce dernier et affirmait qu’il « a bien respecté les termes du contrat » et que le joueur avait tenté « de créer un climat de tensions afin de se détacher de ses obligations contractuelles présumant le non-paiement de ses primes et salaires ».
11. Selon le Club B, en date du 10 juin 2015, le joueur aurait bénéficié de son congé-annuel « soit du 09/06/2015 au 30/06/2015 » mais il ne se serait pas présenté pour la reprise à la fin de ses vacances, ce qui a conduit le Club B à déposer une requête devant la FIFA le 3 septembre 2015 au motif que le joueur aurait rompu unilatéralement son contrat sans juste cause. Toutefois, en date du 3 février 2016, le Club B notifiait la FIFA du retrait de ladite plainte puisque le joueur aurait, entre temps, regagné le club.
12. A cet égard, le Club B confirmait que le joueur était retourné au club en date du 15 décembre 2015, ce qui, d’après le Club B, rend le document du 11 juillet 2015 nul et non avenu. De plus, le Club B affirmait que les parties avaient signé un avenant au contrat le 14 décembre 2015 et relevait également que le joueur « n’a formulé aucune réserve sur les arriérés lors de la signature de l’avenant en date du 15 décembre 2015 ».
13. Par ailleurs, le Club B affirmait que le joueur était devenu « plus agressif » à la fin de la saison sportive 2015-2016 et qu’il avait, le jour de l’inhumation d’un ex-Président du Club B, « bloqué avec sa voiture la sortie de l’autocar empêchant ainsi l’ensemble des joueurs d’assister aux funérailles ». Le Club B soulignait que le joueur avait reçu une amende « pour ce geste inhumain condamnable » à hauteur de 80,000 par la commission de discipline du Club B. De plus, le Club B affirmait que le joueur « a perçu la totalité de son dû (en tenant compte de la pénalité qui lui a été infligée soit 80,000 »).
14. Le Club B soulignait également que le joueur avait été informé que son « congé commence du 23 juin 2016 au 15 juillet 2016 » et alléguait que ce dernier aurait récidivé une deuxième fois en quittant le pays B sans autorisation.
15. De plus, le Club B relevait avoir bien reçu la lettre de résiliation du contrat par l’intermédiaire d’ « Uniqum Advocaten » en date du 21 août 2016 mais relevait que « cette lettre n’a pas été appuyée ni par un mandat, ni par une procuration » et n’a pas jugé utile d’y répondre « pour vice de forme ».
16. Finalement, le Club B déposait une demande reconventionnelle à l’encontre du joueur et affirmait que ce dernier « a violé les termes de son contrat sans juste cause et pendant la période protégée, a quitté le club sans autorisation et sans explication valable et a manqué à ses obligations contractuelles ». Le Club B affirmait que le joueur a rompu unilatéralement son contrat de travail sans juste cause et réclamait ainsi le montant « à titre d’indemnité pour rupture de contrat sans juste cause et pendant la période protégée » de USD 1,000,000 en application de la clause libératoire fixée dans le contrat à son art. 10. Le Club B condamnait également le joueur à des sanctions sportives et à des « intérêts moratoires au taux de 5% à compter du 1er juillet 2016 jusqu’à la date de son paiement effectif ».
17. Au soutien de sa demande reconventionnelle, le Club B joignait au dossier les annexes suivantes :
a. Un « ordre de virement » adressé au joueur et daté du 18 décembre 2015 d’un montant de 142,000 ;
b. Une « décharge » du joueur confirmant avoir reçu du Club B la somme de 5,000 représentant « la prime de signature de 2014-2015 » payé le 15 décembre 2015 ;
c. Une « décharge » du joueur datée du 7 janvier 2016 confirmant avoir reçu du Club B la somme de 200,000 ;
d. Un « ordre de virement du salaire » pour le mois de janvier 2016 à l’attention du joueur pour un montant de 10,000 daté du 5 février 2016 ;
e. Un chèque non daté adressé au joueur d’un montant de 10,000 ;
f. Un chèque daté du « 10 avril » adressé au joueur d’un montant de 12,500 ;
g. Une « décharge » du joueur confirmant avoir reçu du Club B la somme de EUR 18,000 représentant « la prime de signature de 2014/2015 » payé le 15 mai 2016 ;
h. Une « décharge » du joueur confirmant avoir reçu du Club B la somme de 30,000 représentant « partie de la prime de signature » payé le 20 mai 2016 ;
i. Une « décharge » du joueur confirmant avoir reçu du Club B la somme totale de 40,000 représentant le « salaire du mois d’avril 2016 » (i.e. 10,000) ainsi que des « primes de matchs » du joueur (i.e. 30,000), payé le 20 mai 2016.
18. Dans sa réponse à la demande reconventionnelle du Club B, le joueur a souhaité modifier sa demande « vu les extraits de compte communiqués », et sollicite le paiement des montants suivants, « augmentés d’un intérêt de 5% l’an depuis leur date d’exigibilité » :
a. Un montant total de 355,000 à titre d’arriérés de salaires et de primes :
i. 110,000 à titre de salaires impayés de Janvier 2015 à mars 2015 (i.e. 3 x 10,000), de juillet 2015 à décembre 2015 (i.e. 6 x 10,000) et de juin 2016 à juillet 2016 (i.e. 2 x 10,000) ;
ii. 245,000 à titre de primes impayées, à savoir :
1. « 45,000 au 28 décembre 2015 », correspondant « au reste de la prime de signature pour la saison 2014-2015 » ;
2. « 200,000 au 30 juin 2016 ».
b. A titre de compensation pour rupture de contrat :
i. 290,000 net, correspondant « aux salaires fixes d’août 2016 jusqu’à décembre 2018 » (i.e. 29 x 10,000) ;
ii. 4,120,000 correspondant aux primes de signature « conformément à l’avenant » (i.e.1,280,000 pour la saison sportive 2016-2017 + 1,360,000 pour la saison sportive 2017-2018 + 1,480,000 pour la saison sportive 2018-2019, cf. point I.4 b), c) et d) ci-dessus).
19. A cet égard, le joueur soutenait « qu’une prime de signature de 200.000 (20.000 USD) était due le 31 janvier 2015 » et soulignait que le Club B n’avait payé qu’un montant partiel de 160,000 en date du 23 mars 2015, « soit 40.000 trop peu ». De plus, le joueur notait que « pour la prime de signature de 250.000 (25.000 USD) due le 30 juin 2015, seul un montant de 100,000 a été payé, de sorte qu’il reste un solde de 150.000 ». Ainsi, le joueur affirmait que le Club B a « un arriéré de 190.000, soit 19 fois le salaire mensuel, au 1er juillet 2015 ».
20. En outre, le joueur admettait qu’il ne s’était pas présenté en date du 1er juillet 2015 à la reprise de l’entrainement pour préparer la saison 2015-2016 « dans le but de contester le non-paiement par le [Club B] de tous ses émoluments financiers de la saison 2014-2015 ».
21. Par ailleurs, le joueur soutenait qu’il avait signé l’avenant au contrat le 14 décembre 2015, « moyennant le paiement d’un chèque daté du 18 décembre 2015 d’une valeur de 142.000 pour éponger une partie des arriérés du joueur pour la saison 2014/2015 » mais indiquait que « seul un montant de 140.000 apparait sur le bank statement de décembre du joueur et que le [Club B] devait donc bien de l’argent à son joueur et il reste un solde d’au moins 45.000 pour la saison 2014-2015 (190.000 – 5.000 – 140.000 = 45.000) ».
22. Enfin, le joueur affirmait que le Club B « continue de prétendre dans son mémoire de réponse que le 18 décembre 2016, un montant de 142.000,00 a été payé, mais il convient de constater qu’il s’agit du 18 décembre 2015, et que seul un montant de 140.000,00 a été payé, que cela concerne la saison 2014-2015 (arriérés) et que cela ne peut donc pas être imputé sur les primes de signature de la saison 2015-2016 ».
23. De plus, le joueur affirmait que le Club B avait imposé « unilatéralement une amende non prévue contractuellement égale à pas moins de 8 fois le salaire mensuel » et soulignait que l’amende « n’a pas été signifiée au joueur, en raison de quoi il n’a pas pu se défendre » et « qu’il ne peut dès lors être imposé aucune amende ».
24. Dans ses conclusions finales, le Club B affirmait que la réplique du joueur « est dénuée de tout fondement » et que l’amende infligée au joueur dépendait de la gravité de son comportement. De plus, le Club B soulignait que « la prime de signature 2014-2015 a été modifiée par l’avenant signé en date du 14 décembre 2015 ».
25. En réponse à la requête de la FIFA, le joueur a indiqué avoir signé un contrat de travail avec le club, Club X, du pays X en date du 30 août 2016, valable du 1er septembre 2016 jusqu’au 30 juin 2017, prévoyant une rémunération mensuelle brute fixe de EUR 5,000 brut.
26. Le joueur a également indiqué avoir signé en date du 29 août 2017 un autre contrat de travail avec le club, Club Y, du pays X valable du 29 août 2017 jusqu’au 30 juin 2018, prévoyant une rémunération mensuelle nette fixe de EUR 4,000.
27. Après avoir été invité par la FIFA à présenter ses commentaires relatifs à la présente affaire, Club X, du pays X affirmait « n’avoir jamais contacté elle-même le [joueur], ni ne l’a incité à procéder à la rupture de son contrat avec le [Club B]» De plus, Club X soulignait n’avoir fait la connaissance du joueur « que fin août 2016, à un moment où le joueur avait déjà depuis longtemps mis fin à son contrat avec le [Club B] ».
II. Considérants de la Chambre de Résolution des Litiges
1. En premier lieu, la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après : la Chambre ou CRL) a analysé si sa compétence à traiter le présent litige était acquise. À cet égard, la Chambre a pris note que la présente demande a été soumise à la FIFA le 3 octobre 2016. Par conséquent, la Chambre a conclu que l’édition 2015 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après: les Règles de procédure) était applicable au présent litige (cf. art. 21 des Règles de procédure, éditions 2015, 2017 et 2018).
2. Par la suite, la Chambre s’est référée à l’art. 3 al. 1 des Règles de procédure et a confirmé qu’en application de l’art. 24 al. 1 et de l’art. 22 let. b) du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (édition 2018), elle est l’organe décisionnel compétent pour connaître du présent litige contractuel entre un joueur et un club.
3. De plus, la CRL a analysé quelle édition du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (ci-après : le Règlement) est applicable quant au droit matériel. A cet égard, elle s’est référée, d’une part, à l’article 26 al. 1 et 2 du Règlement (éditions 2016 et 2018) et, d’autre part, au fait que la plainte ait été déposée auprès de la FIFA le 3 octobre 2016. Au vu de ce qui précède, la CRL a conclu que l’édition 2016 du Règlement est applicable au présent litige quant au droit matériel.
4. Une fois sa compétence et la réglementation applicable établies, la CRL a soigneusement pris en considération et analysé les arguments ainsi que tous les documents présentés lors de l’instruction du présent dossier. Toutefois, elle a souligné que dans les considérants qui suivent, elle ne se réfèrerait qu’aux faits, arguments et documentation pertinents pour l’analyse de la présente affaire. En particulier, la Chambre a rappelé que conformément à l’art. 6 al. 3 de l’Annexe 3 du Règlement, dans le cadre des procédures relatives à l’application du présent règlement, la FIFA peut utiliser tous documents ou preuves contenus dans le Système de régulation des transferts (TMS).
5. Celant étant, la CRL a observé que les parties au litige ont signé un contrat de travail valable du 15 janvier 2015 au 31 décembre 2018, en vertu duquel le joueur était, inter alia, en droit de recevoir du Club B la rémunération suivante :
a. Un salaire mensuel de 10,000 pour toute la durée du contrat ;
b. Des primes de signature du contrat, ventilées comme suit :
i. USD 20,000 payable au 30 janvier 2015
ii. USD 25,000 payable au 30 juin 2015
iii. USD 88,000 payable au 3 juin 2016
iv. USD 108,000 payable au 30 juin 2017
v. USD 108,000 payable au 30 juin 2018
vi. USD 54,000 payable au 31 décembre 2018.
6. Par ailleurs, la CRL a noté que les parties ont signé un avenant au contrat en date du 14 décembre 2015, lequel prenait effet à compter du 17 décembre 2015 et stipulait que le joueur était en droit de recevoir du Club B la rémunération suivante :
a. Pour la saison sportive 2015/2016, un total de USD 70,000 ou l’équivalent de 640,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 200,000 au 5 janvier 2016 ;
ii. 240,000 au 30 mars 2016 ;
iii. 200,000 au 30 juin 2016
b. Pour la saison sportive 2016-2017, un total de USD 140,000 ou l’équivalent de 1,280,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 320,000 au 5 janvier 2017 ;
ii. 320,000 au 30 avril 2017 ;
iii. 320,000 au 30 juillet 2017 ;
iv. 320,000 au 30 octobre 2017 ;
c. Pour la saison sportive 2017-2018, un total de USD 150,000 ou l’équivalent de 1,360,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 340,000 au 5 janvier 2018 ;
ii. 340,000 au 5 avril 2018 ;
iii. 340,000 au 5 juillet 2018 ;
iv. 340,000 au 5 octobre 2018 ;
d. Pour la saison sportive 2018-2019, un total de USD 160,000 ou l’équivalent de 1,480,000 « y compris le salaire », payable comme suit :
i. 370,000 « au … janvier 2019 » ;
ii. 370,000 « au … avril 2019 » ;
iii. 370,000 « au … juillet 2019 » ;
iv. 370,000 « au … octobre 2019 » ;
7. La Chambre a ensuite observé qu’en date du 3 octobre 2016, le joueur a déposé une plainte à l’encontre du Club B devant la FIFA, affirmant avoir mis fin au contrat pour juste cause le 1er août 2016 du fait des « manquements répétés » du Club B de lui verser la totalité de sa rémunération due d’après le contrat et l’avenant du contrat signé le 14 décembre 2015.
8. La Chambre a observé dans un deuxième temps que d’après le Club B, le joueur aurait bénéficié de son congé annuel du 9 juin 2015 au 30 juin 2015 mais ne se serait pas présenté pour la reprise de ses activités professionnelles à la fin de ses vacances, ce qui constitue selon le Club B, une absence injustifiée et ce qui a conduit ce dernier à déposer une requête devant la FIFA le 3 septembre 2015 au motif que le joueur aurait rompu unilatéralement son contrat sans juste cause. La Chambre a toutefois observé qu’en date du 3 février 2016, le Club B avait notifié la FIFA du retrait de ladite plainte puisque le joueur aurait, entre temps, rejoint le Club B.
9. La Chambre a par ailleurs noté que selon le Club B, le joueur était retourné au Club B le 15 décembre 2015 et avait consenti à la signature d’un avenant au contrat de travail, lequel fut signé par les parties le même jour. Par ailleurs, le Club B affirmait que le joueur n’avait formulé aucune réserve sur ses arriérés de rémunération lors de la signature de l’avenant.
10. Les membres de la CRL ont également noté que selon le Club B, le joueur aurait une nouvelle fois quitté le pays B sans autorisation après avoir été prétendument informé que son congé commençait le 23 juin 2016 et se terminait le 15 juillet 2016. Par ailleurs, le Club B affirmait que le joueur était devenu « plus agressif » à la fin de la saison 2015-2016 et qu’il avait été sanctionné par une amende à hauteur de 80,000 par la commission de discipline du Club B pour comportement déplacé. A cet égard, la Chambre a observé que le Club B affirmait que le joueur aurait perçu « la totalité de son dû en tenant compte de la pénalité qui lui a été infligée ».
11. Les membres de la CRL ont enfin noté que le Club B déposait une demande reconventionnelle à l’encontre du joueur soutenant que celui-ci avait dès lors mis fin au contrat sans juste cause. Dans ce contexte, la Chambre a observé que le Club B avait joint au dossier diverses preuves de paiement au soutien de sa demande reconventionnelle (cf. point I.17 ci-dessus).
12. Au vu des allégations et arguments présentés par chacune des parties, la Chambre a considéré qu’en l’espèce, il convenait d’établir dans un premier temps si la résiliation du contrat par le joueur était fondée ou non sur une juste cause.
13. Ainsi, la Chambre a été amenée à déterminer si les arguments et preuves avancés par le joueur pour justifier la résiliation unilatérale du contrat pouvaient constituer une juste cause pour rompre le contrat avant le terme contractuellement établi par les parties.
14. Compte tenu des considérations qui précèdent, la Chambre a premièrement noté qu’il est établi et incontesté que les parties ont signé un avenant au contrat le 14 décembre 2015, lequel avait pour unique but de modifier la clause b) de l’art. 5 du contrat relative aux « primes de signature ». En conséquence, la Chambre a établi que la conclusion de l’avenant au contrat n’avait pas modifié l’obligation contractuelle du Club B de verser au joueur un salaire mensuel de 10,000 en plus des primes de signature telles que prévues dans l’avenant au contrat.
15. Par ailleurs, la CRL a noté que l’avenant au contrat ne contenait aucune clause stipulant que le joueur renonçait à réclamer des arriérés de rémunération dérivant du contrat. Par conséquent, la Chambre a estimé que le joueur n’avait aucunement, de par la signature de l’avenant, renoncé à réclamer ses arriérés de rémunération dus avant la signature de l’avenant.
16. La Chambre a ensuite noté que le joueur admettait qu’il ne s’était pas présenté aux entrainements en date du 1er juillet 2015 et ne contestait pas avoir été absent du Club B jusqu’en décembre 2015, date à laquelle les parties ont signé l’avenant. Par conséquent, les membres de la CRL ont considéré que le joueur ne pouvait réclamer, à titre d’arriérés de rémunération, de salaires pour les mois de juillet 2015 à décembre 2015, étant donné que le joueur n’avait lui-même pas respecté ses obligations contractuelles durant cette même période.
17. A ce stade, la Chambre a souhaité rappeler aux parties le principe de la charge de la preuve, tel qu’établi par l’art. 12 par. 3 des Règles de procédure, selon lequel la charge de la preuve incombe à la partie qui invoque un droit découlant d’un fait qu’elle allègue. En application de ce principe, la Chambre a noté qu’en l’espèce, la charge de la preuve incombe au Club B, à qui il appartient dès lors d’établir qu’il disposait d’une juste cause de nature à justifier le non-paiement de la rémunération précitée.
18. Dans ce contexte, La CRL a pris note de la documentation ainsi que des preuves de paiements présentées par le Club B au soutien de ses allégations et a constaté que le Club B n’avait pas apporté de preuve suffisante pour établir que le joueur avait effectivement commis une violation disciplinaire, qu’il avait participé à un procès disciplinaire relatif à cette violation ou qu’il avait été dûment notifié de la prétendue sanction imposée à son encontre, soit l’imposition d’une amende de 80,000. Par conséquent, la Chambre a conclu que l’argument du Club B ne pouvait être suivi sur ce point et que ce dernier ne pouvait valablement déduire le montant de la prétendue amende de 80,000 des sommes dues au joueur à titre d’arriérés de rémunération.
19. Au vu de ce qui précède, tout en prenant en considération les preuves de paiement présentées par le Club B ainsi que la modification ultérieure de la demande du joueur « vu les extraits de compte communiqués » par le Club B, la Chambre a relevé qu’au moment de la résiliation du contrat en date du 1er août 2016, le Club B avait manqué à son obligation de verser au joueur (i) la somme de 50,000, correspondant à ses salaires des mois de janvier 2015 à mars 2015 ainsi que des mois de juin 2016 et juillet 2016, (ii) la somme de 45,000, correspondant au montant restant de sa prime de signature pour la saison 2014-2015, (iii) ainsi que la somme de 200,000, correspondant à la troisième prime de signature pour la saison 2015-2016 payable au 30 juin 2016.
20. Dès lors, bien que le joueur n’ait pas mis en demeure le défendeur / demandeur reconventionnel avant de rompre le contrat en date du 1er août 2016, les membres de la CRL ont conclu, au vu des importants retards constatés dans le paiement de la rémunération due au joueur, que ce dernier pouvait de bonne foi croire que le Club B aurait persisté à violer ses obligations financières découlant du contrat et de l’avenant au contrat, et ce, même si ce dernier avait été hypothétiquement mis en demeure.
21. Par conséquent, la Chambre a conclu, au vu du montant considérable dû à titre d’arriérés de rémunération, que le joueur avait eu une juste cause pour rompre unilatéralement le contrat le 1er août 2016 et que le Club B devait être tenu responsable de ladite rupture anticipée du contrat. La Chambre a par ailleurs conclu au rejet de la demande reconventionnelle du Club B.
22. La responsabilité du Club B ayant été établie, la CRL a focalisé son attention sur les conséquences de la résiliation du contrat avec juste cause par le joueur. A cet égard, et conformément à l’article 17 al. 1 du Règlement, la CRL a décidé que le joueur était en droit de recevoir du Club B un certain montant à titre de compensation, en sus des sommes dues à titres d’arriérés de rémunération.
23. Avant d’entrer dans le calcul de ladite compensation, la Chambre a déterminé le montant exact des arriérés de rémunération. Dans ce contexte, la Chambre a tout d’abord fait référence à ses considérations antérieures et a souligné qu’il était établi que (i) les salaires du joueur pour les mois de janvier à mars 2015 et pour les mois de juin et juillet 2016, soit la somme totale de 50,000, (ii) la somme de 45,000, correspondant au montant restant de sa prime de signature pour la saison 2014-2015, ainsi que (iii) la somme de 200,000, correspondant à la troisième prime de signature pour la saison 2015-2016, payable au 30 juin 2016, demeuraient en souffrance.
24. Dès lors, et conformément au principe pacta sunt servanda, la Chambre a conclu que le Club B devait verser au joueur la somme totale de 295,000 due à titre d’arriérés de rémunération.
25. Par ailleurs, tenant compte de la demande du joueur, la Chambre a décidé que le Club B est également redevable d’un intérêt de 5 % par année sur la somme de 295,000 due à titre d’arriérés de rémunération, dû à compter des dates suivantes et jusqu’à la date effective du paiement :
a. 5% p.a. à compter du 1er février 2015 sur la somme de 10,000 ;
b. 5% p.a. à compter du 1er mars 2015 sur la somme de 10,000 ;
c. 5% p.a. à compter du 1er avril 2015 sur la somme de 10,000 ;
d. 5% p.a. à compter du 29 décembre 2015 sur la somme de 45,000 ;
e. 5% p.a. à compter du 1er juillet 2016 sur la somme de 10,000 ;
f. 5% p.a. à compter du 1er août 2016 sur la somme de 10,000 ;
g. 5% p.a. à compter du 1er juillet 2016 sur la somme de 200,000.
26. La Chambre s’est ensuite attelée à déterminer le montant dû à titre de compensation. A ce titre, la Chambre a rappelé que conformément à l’art. 17 al. 1 du Règlement, l’indemnité pour rupture de contrat sera calculée, sous réserve de l’existence de stipulations contractuelles s’y rapportant, conformément au droit en vigueur dans le pays concerné, à la spécificité du sport et en tenant compte de tout critère objectif inhérent au cas. Ces critères comprennent notamment la rémunération et autres avantages dus au joueur en vertu du contrat en cours et/ou du nouveau contrat, la durée restante du contrat en cours jusqu’à cinq ans au plus, de même que la question de savoir si la rupture intervient pendant la période protégée.
27. Revenant au contenu du contrat, la Chambre a noté que celui-ci ne contient aucune stipulation spécifique établissant une indemnité applicable en cas de rupture du contrat sans juste cause par l’une des parties. Par conséquent, la Chambre a considéré qu’il convenait de se référer aux autres éléments mentionnés à l’al. 1 de l’art. 17 du Règlement. A cet égard, la Chambre a rappelé que cette disposition contient une énumération non-exhaustive de critères pouvant être pris en compte dans le cadre du calcul du montant de l’indemnité devant être payée et que, de ce fait, il avait toute discrétion pour se baser sur tout autre critère objectif pour calculer le montant de ladite indemnité.
28. Ayant à l’esprit les considérations qui précèdent, la CRL a rappelé que le contrat devait initialement expirer le 30 décembre 2018 et a observé que dans le cadre de sa demande relative à la valeur résiduelle du contrat, le joueur sollicitait la somme totale de 4,410,000 à titre de compensation. Ainsi, compte tenu de la durée résiduelle du contrat du 2 août 2016 au 30 décembre 2018, la Chambre a établi que la somme de 4,410,000 constitue la base de calcul pour déterminer le montant dû à titre de compensation pour rupture du contrat.
29. La CRL a ensuite vérifié si le joueur avait signé un nouveau contrat de travail durant la période en question, au moyen duquel il aurait pu réduire l’étendue de son dommage. En effet, conformément à la jurisprudence constante de la CRL, la rémunération perçue dans le cadre de ce nouveau contrat doit être prise en considération afin de fixer le montant de la compensation payable et ce, en vertu de l’obligation qu’a tout joueur de limiter son préjudice. En l’espèce, la Chambre a observé qu’il ressortait de la documentation au dossier que le joueur avait conclu un premier contrat de travail couvrant la période du 1er septembre 2016 jusqu’au 30 juin 2017, en application duquel le joueur était amené à percevoir une rémunération totale équivalente à 542,730 au cours de la période précitée. Par ailleurs, le joueur avait conclu un second contrat de travail couvrant la période du 29 août 2017 jusqu’au 30 juin 2018, en application duquel le joueur était amené à percevoir une rémunération totale équivalente à 440,100 au cours de la période précitée.
30. En conséquence, la CRL a décidé que le Club B doit payer la somme de 3,427,170 au joueur à titre de compensation pour la rupture du contrat sans juste cause par le Club B, somme qui apparait raisonnable et justifiée.
31. Par ailleurs, tenant compte de la demande du joueur, la Chambre a décidé que le Club B est également redevable d’un intérêt de 5 % par année sur la somme due à titre de compensation courant à compter de la date à laquelle la plainte a été déposée, i.e. le 3 octobre 2016, et jusqu’à parfait paiement.
32. La Chambre a enfin déclaré que toute autre demande formulée par le joueur est rejetée.
III. Décision de la Chambre de Résolution des Litiges
1. La demande du demandeur / défendeur reconventionnel, Joueur A, est partiellement acceptée.
2. Le défendeur / demandeur reconventionnel, Club B, doit payer au demandeur / défendeur reconventionnel, dans un délai de 30 jours à compter de la date de notification de la présente décision, la somme de 295,000 à titre d’arriérés de rémunération, majorée d’un intérêt de 5% par année et jusqu’à parfait paiement, dû à compter des dates suivantes :
a. 5% p.a. à compter du 1er février 2015 sur la somme de 10,000 ;
b. 5% p.a. à compter du 1er mars 2015 sur la somme de 10,000 ;
c. 5% p.a. à compter du 1er avril 2015 sur la somme de 10,000 ;
d. 5% p.a. à compter du 29 décembre 2015 sur la somme de 45,000 ;
e. 5% p.a. à compter du 1er juillet 2016 sur la somme de 10,000 ;
f. 5% p.a. à compter du 1er août 2016 sur la somme de 10,000 ;
g. 5% p.a. à compter du 1er juillet 2016 sur la somme de 200,000.
3. Le défendeur / demandeur reconventionnel doit payer au demandeur / défendeur reconventionnel comme compensation pour rupture de contrat, dans un délai de 30 jours à compter de la date de notification de la présente décision, la somme de 3,427,170 majorée d’un intérêt de 5% par année et jusqu’à parfait paiement, dû à compter du 3 octobre 2016.
4. Si les sommes susmentionnées ainsi que les intérêts y afférant ne sont pas payés dans le délai imparti tel qu’indiqué ci-avant, le cas sera soumis, sur demande, à la Commission de Discipline de la FIFA pour considération et décision.
5. Toute autre demande formulée par le demandeur / défendeur reconventionnel est rejetée.
6. Le demandeur / défendeur reconventionnel s’engage à communiquer immédiatement et directement au défendeur / demandeur reconventionnel le numéro de compte bancaire sur lequel le virement des sommes précitées sera effectué et d’informer la Chambre de Résolution des Litiges de chaque paiement reçu.
7. La demande reconventionnelle du défendeur / demandeur reconventionnel est rejetée.
*****
Note concernant la décision motivée (Voie de droit) :
Conformément à l’article 58, alinéa 1 des Statuts de la FIFA, cette décision est susceptible de recours auprès du Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Le recours devra être interjeté dans un délai de 21 jours à compter de la notification de la décision et devra comprendre tous les éléments figurant au point 2 des directives émanant du TAS, dont copie est jointe à la présente. Le recourant dispose de 10 jours supplémentaires à compter de l’expiration du délai de recours pour déposer son mémoire d’appel contenant une description des faits et des arguments légaux fondant le recours (cf. point 4 des directives annexées).
Les coordonnées du TAS sont les suivantes :
Tribunal Arbitral du Sport
Avenue de Beaumont 2
1012 Lausanne
Suisse
Téléphone : +41 21 613 50 00
Courrier électronique : info@tas-cas.org
Au nom de la
Chambre de Résolution des Litiges :
Omar Ongaro
Directeur de la sous-division
Réglementation du Football
Annexe : Directives du TAS
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