F.I.F.A. – Dispute Resolution Chamber / Camera di Risoluzione delle Controversie – labour disputes / controversie di lavoro (2019-2020) – fifa.com – atto non ufficiale – Decision 4 juin 2020

Décision de la
Chambre de Résolution des Litiges
rendue via videoconference, le 4 juin 2020
dans le cadre d’un litige contractuel concernant le joueur Fabrice Ondama
COMPOSITION:
Clifford J. Hendel (USA/France), Vice-Président Elvis Chetty (Seychelles), membre Tomislav Kasalo (Croatie), membre
DEMANDEUR
Fabrice Ondama, République du Congo
représenté par M. Antoine Semeria
DEFENDEUR
Club Ahtlétique Youssoufia Berrechid, Maroc
I. FAITS
1. Prétendument, le 20 mai 2019, le joueur Congolais, Fabrice Ondama (ci-après : le joueur ou le demandeur) et le club Marocain, Athlétique Youssoufia Berrechid (ci-après : le club ou le demandeur) aurait signé un contrat de travail (ci-après : le contrat) valide à partir du 1er juillet 2019 jusqu’au 1er juillet 2021.
2. Conformément au contrat, le joueur avait le droit aux rémunérations suivantes :
 MAD 8,000 comme salaire mensuel payable à la fin du mois ;
 MAD 450,000 comme prime de signature payable à la date de signature ;
 MAD 500,000 comme prime annuelle de rendement pour la saison 2020/2021.
3. Conformément au contrat, en cas de résiliation sans motif valable par l'une des parties, la partie non fautive a droit à la valeur résiduelle du contrat, comme suit : « en cas de résiliation unilatérale avant terme non motivé par la faute grave de l’autre partie ou par un cas de force majeure, et dans ce cas uniquement, des dommages et intérêt dont le montant équivaut au montant des rémunérations correspondant à la période allant de la date de la résiliation jusqu’au terme fixé par le présent contrat, seront dus à la partie qui n’est pas à l’origine de la résiliation unilatérale ».
4. Selon les documents versés au dossier, le 14 septembre 2019, le joueur a mis le club en demeure en faisant valoir qu’il s’entraînait avec le club depuis le début de la saison 2019/2020, mais qu’il n’aurait reçu qu’une partie de la prime de signature pour une valeur de MAD 225,000 et aucune autre rémunération. Il a demandé à être payé ce qui lui était dû et a donné 10 jours au club pour remédier à son défaut. Le joueur a réitéré sa mise en demeure le 19 septembre 2019.
5. Le 1er octobre 2019, le joueur a résilié unilatéralement le contrat en faisant valoir qu’en dépit de ses deux mises en demeures, il n’avait reçu aucune réponse et aucun salaire en dehors d’une partie de la prime de signature pour un montant de MAD 225,000. Il a en outre soutenu qu’il avait été retiré de l’équipe professionnelle et forcé à s’entraîner seul. Le joueur a en outre soutenu qu’en réponse à ses plaintes orales au club, celui-ci lui avait répondu qu’il était un joueur libre puisque le président du club n’avait pas signé le contrat.
6. Selon le joueur, au moment de la résiliation du contrat, le club lui devait MAD 249,000 correspondant à :
 MAD 225,000 comme partie restante de la prime de signature ;
 MAD 24,000 correspondant aux salaires mensuels de juillet, août et septembre 2019.
7. Le 17 octobre 2019, le joueur a porté plainte contre le club devant la FIFA pour arriérés de salaires et compensation pour rupture du contrat et réclamant le montant total de MD 527,000 correspondant à :
 MAD 427,000 à titre d’indemnisation ;
 MAD 100,000 « au titre du préjudice financiers, matériels, sportif et moraux subi du fait du comportement fautif du club ».
8. Le joueur a soutenu qu’il n’avait reçu que MAD 225,000 depuis le début du contrat et qu’il avait dû mettre fin au contrat puisqu’il me recevait pas de salaire et était obligé de s’entraîner seul.
9. Le joueur a également soutenu que, bien que le contrat n’ait pas été signé par le club, il a été tamponné par la ville de Berrechid, signé par le joueur et exécuté puisqu’il a rempli ses obligations et a reçu une partie de la prime de signature.
10. Malgré la requête de l’administration de la FIFA, le club n’a pas fourni ses commentaires sur la plainte du joueur.
11. Le joueur a informé la FIFA qu’il n’avait pas retrouvé d’emploi depuis la résiliation du contrat.
II. CONSIDERANTS DE LA CHAMBRE DE RESOLUTION DES LITIGES
1. En premier lieu, la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après : la Chambre ou la CRL) a analysé si elle était compétente pour traiter le présent litige. A cet égard, elle a pris note que la présente demande a été soumise à la FIFA le 17 octobre 2019. Par conséquent, la CRL a conclu que l’édition 2019 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après : les Règles de procédure) était applicable au présent litige (cf. art. 21 des Règles de procédure).
2. Par la suite, la Chambre s’est référée à l’art. 3 al. 1 des Règles de procédure et a confirmé qu’en application de l’art. 24 al. 1 et de l’art. 22 let. b) du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (édition 2020), elle est l’organe décisionnel compétente pour connaître des litiges contractuels entre un joueur congolais et un club marocain comportant une dimension internationale.
3. En outre, la CRL a analysé quelle édition du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (ci-après : le Règlement) est applicable quant au droit matériel. A cet égard, elle s’est référée, d’une part, à l’article 26 al. 1 et 2 du Règlement (édition 2020) et, d’autre part, au fait que la plainte ait été déposée auprès de la FIFA le 17 octobre 2019. Au vu de ce qui précède, la CRL a conclu que l’édition 2019 du Règlement est applicable au présent litige quant au droit matériel.
4. Une fois sa compétence et la réglementation applicable établies, la CRL a statué sur le fond du litige. Ce faisant, elle a tout d’abord rappelé les faits mentionnés ci-dessus et étudié la documentation apportée au dossier. Toutefois, la Chambre a souligné que dans les considérants qui suivent, elle ne se référera qu’aux faits, arguments et à la documentation pertinents pour l’analyse de la présente affaire.
5. Prenant en compte les considérations mentionnées précédemment, la CRL a noté que d’après le joueur, en mai 2019, le demandeur et le défendeur aurait signé un contrat de travail valide du 1er juillet 2019 au 1er juillet 2021, en raison duquel le demandeur était, inter alia, en droit de recevoir une prime de signature de d’une valeur de MAD 450,000 payable à la signature, MAD 8,000 comme salaire mensuel et MAD 500,000 en tant que prime annuel de rendement.
6. La Chambre a pris note que le contrat présenté par le joueur n’était pas signé par le club, mais comportait un tampon de la ville de Berrechid.
7. La Chambre a pris note que les 14 et 19 septembre 2019, le joueur avait mis en demeure le club assurant n’avoir reçu depuis le début du contrat qu’une partie de la prime de signature pour un montant de MAD 225,000 et aucun salaire. Le joueur a par ailleurs réclamé à être réintégré dans l’équipe professionnelle. La Chambre pris note qu’à ses deux reprises, le joueur avait donné 10 jours au club pour qu’il rectifie ses torts. Par la suite, la Chambre a pris note que le joueur avait unilatéralement et prématurément mis fin au contrat de travail le 1er octobre 2019.
8. La Chambre a observé qu’en date du 17 octobre 2019, le demandeur avait déposé une plainte à l’encontre du défendeur devant la FIFA réclamant le montant total de MAD 527,000 arguant qu’il avait été forcé de mettre fin au contrat en raison des absences de paiement du club et son isolement du groupe professionnel.
9. De même, en l’absence de réponse à la requête du demandeur alors qu’il avait été invité à le faire par l’administration de la FIFA, la Chambre de résolution des litiges a considéré que la plainte du joueur était restée sans réponse et était donc incontestée.
10. Prenant compte de tout ce qui précède et en accord avec l’art. 9 par.3 des Règles de procédures, la Chambre a établi qu’elle rendrait une décision sur la base des documents disponibles dans le dossier.
11. Dans le même sens, eut égard à l’absence de contestation de la part du club, la CRL a considéré que malgré l’absence de signature du contrat par le club, le contrat était valide.
12. Dès lors, la Chambre a mis en avant que le point principal de cette affaire était de déterminer si le joueur avait eu juste cause pour rompre unilatéralement le contrat le 1er octobre 2019, et le cas échéant d’établir les conséquences d’une telle rupture.
13. Ceci étant dit, la CRL a conclu qu’il demeure incontesté que le club a seulement payé depuis le début du contrat la moitié de la prime de signature, laissant impayé le reste de la prime de signature ainsi que les salaires de juillet, août et septembre 2019.
14. La CRL a par ailleurs pris note que le demandeur avait mis en demeure le défendeur à deux reprises les 14 et 19 septembre 2019 et avait résilié le contrat le 1er octobre 2019, donnant de facto plus de 15 jours au défendeur pour payer les montants réclamés. La CRL a aussi pris note qu’à la date de mise en demeure, le 14 septembre 2019, deux mois de salaries (juillet et août 2019) ainsi que la part restante de la prime de signature étaient dus.
15. Par conséquent, la CRL a déterminé de manière unanime que le demandeur avait eu juste cause pour rompre unilatéralement et prématurément le contrat le 1er octobre 2019 et que le défendeur devait être tenu responsable de ce qui précède.
16. La responsabilité du défendeur concernant la rupture du contrat ayant été établie, la Chambre a focalisé son attention sur les conséquences de la rupture avec juste cause par le demandeur. A cet égard et conformément à l’art. 17 al. 1 du Règlement, la Chambre a jugé que le demandeur était en droit de recevoir une indemnité à titre de compensation en sus des montants dus à titre d’arriérés de rémunération.
17. Néanmoins, et avant d’entrer dans le calcul de ladite compensation, la Chambre a déterminé le montant exact des arriérés de rémunération. Dans ce contexte, la CRL a tenu à rappeler qu’en application du contrat, le demandeur était inter alia en droit de recevoir un salaire mensuel de MAD 8,000 ainsi qu’une prime de signature d’un montant total de MAD 450,000. La chambre s’est aussi attelée à analyser la requête du demandeur, et à constater que celui-ci réclamait les salaires de juillet, août, septembre, 2019 ainsi que la partie restante de la prime de signature.
18. Dès lors et conformément au principe pacta sunt servanda, la Chambre a conclu que les salaries du demandeur pour les mois de juillet, août et septembre 2019 ainsi que la partie restante de la prime de signature étaient dus à titre d’arriérés de rémunération, soit un montant total de MAD 249,000.
19. La Chambre s’est ensuite attelée à déterminer le montant dû à titre de compensation. A ce titre, la Chambre a rappelé que conformément à l’art. 17 al. 1 du Règlement, l’indemnité pour rupture de contrat sera calculée, sous réserve de l’existence de stipulations contractuelles s’y rapportant, conformément au droit en vigueur dans le pays concerné, à la spécificité du sport et en tenant compte de tout critère objectif inhérent au cas. Ces critères comprennent notamment la rémunération et autres avantages dus au joueur en vertu du contrat en cours et/ou du nouveau contrat, la durée restante du contrat en cours jusqu’à cinq ans au plus, de même que la question de savoir si la rupture intervient pendant la période protégée.
20. Revenant au contenu du contrat, la Chambre a noté qu’en vertu de son art. 10, le contrat contenait une provision prévoyant qu’en cas de « résiliation unilatérale avant terme non motivée par la faute grave de l’autre partie ou par un cas de force majeure, et dans ce cas uniquement, des dommages-intérêts dont le montant équivaut au montant de rémunérations correspondant à la période allant de la date de la résiliation jusqu’au terme fixé par le présent contrat, seront dus à la partie qui n’est pas à l’origine de la résiliation unilatérale ».
21. A cet égard, la CRL a considéré que cette clause était réciproque et proportionnelle et pouvait par conséquent s’appliquer au cas d’espèce.
22. Ayant à l’esprit les considérations qui précèdent ainsi que la demande du joueur, la Chambre a rappelé que le contrat devait initialement expirer le 1er juillet 2021 et a procédé au calcul de la valeur résiduelle du contrat. Ainsi la CRL a établi que la somme de MAD 168,000, correspondant aux salaires du demandeur du 1er octobre 2019 jusqu’au 1er juillet 2021, constituait la base de calcul pour déterminer le montant dû à titre de compensation.
23. La CRL a précisé qu’en raison du contenu de l’article 10 du contrat qui limitait le montant des « dommages-intérêts […] au montant des rémunérations » du demandeur, la CRL a considéré que la prime annuelle de rendement ne constituait pas une rémunération mais un bonus lié à la performance du joueur pendant la durée du contrat et donc décidé de l’exclure de la base de calcul pour déterminer le montant dû à tire de compensation.
24. En conséquence, la CRL a décidé de rejeté la demande du demandeur de recevoir MAD 100,000 au titre de préjudice financiers, matériels, sportifs et moraux, étant donné que cette requête n’a aucun fondement contractuel et n’était pas suffisamment motivée.
25. En conséquence, la CRL a décidé que le défendeur doit payer la somme de MAD 168,000 au demandeur à titre de compensation pour la rupture du contrat sans juste cause par le défendeur, somme qui apparaît raisonnable et justifiée.
26. La Chambre a enfin déclaré que toute autre demande formulée par le demandeur est rejetée.
27. En outre, la Chambre a fait référence à l'art. 24bis al. 1 et 2 du Règlement, qui stipule que, dans sa décision, l'organe de décision compétent de la FIFA statue également sur les conséquences découlant du défaut de paiement dans les délais impartis, par la partie concernée, des montants de la rémunération et/ou de l'indemnité due.
28. À cet égard, la Chambre a souligné que, à l'encontre des clubs, la conséquence du défaut de paiement des montants dus dans les délais impartis, consiste en l'interdiction de recruter des nouveaux joueurs, que ce soit au niveau national ou international, jusqu'au paiement des montants dus et pour la durée maximale de trois périodes d'enregistrement complètes et consécutives.
29. Par conséquent, compte tenu de ce qui précède, la CRL a décidé que, dans le cas où le défendeur ne paie pas les montants dus au demandeur dans un délai de 45 jours à compter de la date de notification par le demandeur des informations bancaires permettant au défendeur de procéder au paiement, le défendeur se verra interdit de recruter des nouveaux joueurs, au niveau national ou international, jusqu’à ce que les sommes dues soient payées, et pour une durée maximale de trois périodes d’enregistrement entières et consécutives, conformément à l'art. 24bis al. 2 et 4 du Règlement.
30. Enfin, la Chambre a rappelé que l'interdiction susmentionnée sera levée immédiatement, dès le paiement du montant dû, conformément à l'art. 24bis al. 3 du Règlement.
III. DECISION DE LA CHAMBRE DE RESOLUTION DES LITIGES
1. La demande du demandeur, Fabrice Ondama, est partiellement acceptée.
2. Le défendeur, Club Athlétique Youssoufia Berrechid, doit payer au demandeur la somme de 249,000 MAD au titre d’arriérés de paiement.
3. Le défendeur doit payer au demandeur comme compensation pour rupture de contrat, la somme de 168,000 MAD.
4. Toute autre demande du demandeur est rejetée.
5. Le demandeur s’engage à communiquer immédiatement et directement au défendeur, de préférence à l’adresse e-mail indiquée dans la lettre de couverture de la présente décision, les informations bancaires pour permettre au défendeur de procéder aux paiements mentionnés aux points 2 et 3 ci-dessus.
6. Le défendeur s’engage à fournir à la FIFA, la preuve de paiement des montants en accord avec les points 2 et 3 ci-dessus, à l’adresse e-mail psdfifa@fifa.org, dûment traduit, le cas échéant, dans l’une des langues officielles de la FIFA (anglais, espagnol, français et allemand).
7. Si les montants dus en accord avec les points 2 et 3 ci-dessus ne sont pas payés par le défendeur dans un délai de 45 jours à compter de la date de notification par le demandeur des informations bancaires permettant au défendeur de procéder au paiement, le défendeur se verra interdit de recruter des nouveaux joueurs, au niveau national ou international, jusqu’à ce que les sommes dues soient payées, et pour une durée maximale de trois périodes d’enregistrement entières et consécutives (cf. art. 24bis du Règlement du Statuts et du Transfert des Joueurs).
8. L’interdiction mentionnée au point 7 ci-dessus sera levée dès que les sommes totales dues auront été payées.
9. Si les sommes susmentionnées ne sont toujours pas payées d’ici la fin de l’interdiction d’enregistrement pour les trois périodes d’enregistrement entières et consécutives, le cas sera soumis, sur demande, à la Commission de Discipline de la FIFA pour considération et décision.
Au nom de la
Chambre de Résolution des Litiges:
Emilio García Silvero
Directeur juridique et conformité
NOTE CONCERNANT LA PROCEDURE D’APPEL:
Conformément à l’article 58 alinéa 1 des Statuts de la FIFA, cette décision est susceptible d’un appel au Tribunal Arbitral du Sport (TAS). L’appel devra être interjeté dans un délai de 21 jours à compter de la notification de la décision et devra comprendre tous les éléments figurant au point 2 des directives émanant du TAS..
NOTE RELATIVE A LA PUBLICATION:
L'administration de la FIFA peut publier les décisions de la Commission du Statut du Joueur ou de la CRL. Lorsque ces décisions contiennent des informations confidentielles, la FIFA peut décider, à la demande d'une partie dans les cinq jours suivant la notification de la décision motivée, de publier une version anonymisée ou une version expurgée (cf. art. 20 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges).
INFORMATION DE CONTACT:
Fédération Internationale de Football Association
FIFA-Strasse 20 P.O. Box 8044 Zurich Switzerland
www.fifa.com | legal.fifa.com | psdfifa@fifa.org | T: +41 (0)43 222 7777
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