TAS-CAS – Tribunal Arbitral du Sport/Tribunale Arbitrale dello Sport – Court of Arbitration for Sport/Corte Arbitrale dello Sport (2017-2018) – tas-cas.org – atto non ufficiale – Arbitrage TAS 2017/A/4960 Raphaël Hamidi c. Wydad Athletic Club, sentence du 22 décembre 2017

Tribunal Arbitral du Sport Court of Arbitration for Sport
Arbitrage TAS 2017/A/4960 Raphaël Hamidi c. Wydad Athletic Club, sentence du 22 décembre 2017
Formation: M. le Juge Pierre Muller (Suisse), Arbitre unique
Football
Résiliation du contrat de travail d’un directeur technique sans juste cause par le club
Exception d’incompétence
Faculté d’opter pour une nouvelle décision en vertu du principe d’examen de novo
Prohibition du formalisme excessif
Indemnité pour tort moral
1. Il résulte d’un principe général de procédure qu’une exception d’incompétence doit être soulevée préalablement à toute défense au fond. Il s’agit là d’un cas d’application du principe de la bonne foi, qui constitue un principe général du droit. Aussi l’autorité devant laquelle le défendeur procède au fond sans faire de réserve est compétente de ce seul fait, le défendeur perdant définitivement le droit d’exciper de son incompétence. Cette règle générale peut également être rattachée en matière d’arbitrage international au principe dit “d’estoppel”, qui interdit à une partie de se prévaloir d’une position contraire à celle qu’elle a prise antérieurement.
2. En vertu de l’art. R57 du Code TAS, une formation arbitrale est habilitée, lorsqu’elle est saisie d’un appel contre une décision de refus d’ouverture d’une procédure disciplinaire et qu’elle juge cette décision injustifiée, à statuer elle-même sur le fond et infliger une sanction disciplinaire. Le fait d’opter en faveur de la solution consistant à rendre une nouvelle décision – plutôt que pour celle de renvoyer la cause à l’autorité qui a statué en dernier – est parfaitement compatible avec la nature de la procédure d’appel; c’est l’une de ses caractéristiques de ce moyen de droit que d’être une voie de réforme permettant à l’instance supérieure de statuer elle-même sur le fond. Une telle solution est également propre à favoriser une liquidation rapide des litiges, notamment en matière de dopage.
3. L’organe juridictionnel qui prévoit la possibilité de régler les frais de procédure par un versement bancaire, mais ne rend pas aisément accessible les coordonnées bancaires permettant à la partie instante d’opérer ledit versement, ne peut pas ensuite déclarer l’acte de procédure irrecevable au motif que le règlement des frais n’est pas intervenu dans un délai aussi court qu’un délai de 5 jours. Admettre le contraire contreviendrait manifestement au principe général de procédure qui prohibe le formalisme excessif.
4. Un manque de délicatesse dans la manière dont il a été mis fin au contrat de travail ne suffit pas, en l’absence d’une atteinte dont la gravité objective et subjective engendrait un droit à être indemnisé et, en particulier, en l’absence d’une souffrance ou perturbation psychique concrète, à justifier une prétention en réparation d’un préjudice moral.
I. PARTIES
1.
1.1. Raphaël Hamidi (ci-après: “l’Appelant”) est un entraîneur professionnel de nationalité espagnole, titulaire du diplôme d’entraîneur de football grade A de l’UEFA.
1.2. Le Wydad Athletic Club (ci-après: “le Club”, “l’Intimé” ou “le WAC”) est un club de football affilié à la Fédération Royale Marocaine de Football (ci-après: “la FRMF”), laquelle est affiliée à la Fédération Internationale de Football Association (ci-après: “FIFA”).
II. FAITS ESSENTIELS
2.
Le 13 juillet 2010, l’Appelant et le WAC ont signé un contrat, intitulé “contrat d’engagement”, qui stipule notamment ce qui suit:
“Article 1: Engagement
Le Directeur technique est engagé par le WAC aux termes du présent Contrat pour une durée de quatre saisons sportives fermes à compter du 13 juillet 2010 et jusqu’au 30 juin 2014. Il est renouvelable par tacite reconduction. Le Directeur Technique, qui accepte cet engagement, déclare formellement n’être lié à aucun autre Club et être libre de tout engagement en vigueur envers ses précédents employeurs et n’avoir aucun antécédent judiciaire.
Article 2: Fonctions et Attributions
Le Directeur Technique exercera pleinement les missions et responsabilités suivantes, sous l’Autorité du Président du Club et/ou d’une personne formellement mandatée par le Président du Club:
2-1 Détection
- Mise en place d’un réseau de détection de joueurs,
- Supervision des tests de détection et de recrutement des joueurs,
- Mise en place et supervision de tests de détection au sein de l’Ecole du WAC.
2-2 Formation sportive
A l’Attention du personnel technique (Educateurs, Préparateurs Physiques et Staff Médical)
- Conception des programmes et des plans de formation pluriannuels,
- Animation de séminaires et de séances pratiques de formation,
- Affectation du personnel technique,
- Formation, Suivi et Evaluation des Performances individuelles Concernant les joueurs du Club
- Définition de la Politique Sportive de l’Ecole du WAC,
- Conception des Programmes annuels de Formation par tranche d’âge,
- Animation de Séances de formation et d’Entraînement,
- Mise en place et Formation d’un suivi individualisé pour chaque joueur intégrant notamment les aspects physiques, techniques, tactiques et psychologiques,
- Audit des équipes de jeunes du Club (Minimes, Cadets et Juniors) et classement des éléments selon 3 catégories: Excellent, potentiel à confirmer, Qualités insuffisantes.
Article 3- Obligations du Directeur Technique
En acceptant le Présent Contrat, le Directeur Technique s’engage pendant toute la durée du contrat à se consacrer à l’association, à respecter les décisions du Comité et le règlement intérieur (joint en annexe). […]
Article 4: Rémunération
En contrepartie des engagements du Directeur Technique définis aux articles 2 et 3 et dans le règlement intérieur du Club, le WAC s’engage, au titre du présent contrat, à verser au Directeur Technique un salaire mensuel de 48.500,00 DHS net […].
Le WAC s’engage également, à prendre à sa charge les frais engendrés par la mission du Directeur Technique tels que:
 La mise à disposition d’une voiture et du carburant nécessaire.
 Un abonnement téléphonique d’un montant de 1.000 DHS […] mensuel.
 Quatre billets d’avion aller/retour Casablanca/Paris, par saison sportive.
Aussi le WAC s’engage également à mettre à disposition le Directeur Technique pour sa formation d’entraîneur et assurer la prise en charge des frais engendrés.
Article 5: Conditions de résiliation
Le Présent contrat peut être résilié de plein droit et sans préavis en cas d’inexécution par l’une des parties de ses obligations et dans les cas suivants:
- Le Directeur Technique est radié du corps des entraîneurs,
- L’inaptitude physique définitive du Directeur Technique est dûment établie,
- Le Directeur Technique est déchu de ses droits civiques,
- Le Directeur Technique se rend coupable d’une faute grave.
En cas résiliation de ce contrat par l’une des deux parties pour quelques motifs que ce soit, l’intégralité des sommes dû [sic] jusqu’au terme du contrat (30 juin 2014) seront payées en totalité dans un délai de quinze (15) jours par la partie qui souhaite mettre un terme à ce contrat.
Article 6: Litige
Tout litige devra être réglé à l’amiable entre les deux parties ou, à défaut, être soumis à l’arbitrage du WAC et éventuellement à celui de la FIFA, en cas de résiliation à l’amiable du présent contrat, le Club et le Directeur Technique établiront et signeront conjointement un procès-verbal indiquant l’acceptation mutuelle de cette résiliation, sa date d’effet et, éventuellement, les conditions matérielles qui l’accompagnent.
Ce contrat faisait suite à un premier contrat, conclu en 2008, entre les Parties.
3.
Par courrier du 24 avril 2012, la Fédération Française de Football a adressé à l’Appelant sa licence “UEFA A”, indiquant qu’il s’agissait de “l’équivalence européenne de [son] D.E.F (Diplôme d’Entraîneur de Football) obtenu le 06/01/2004”.
4.
4.1. Par lettre recommandée du 23 août 2012 adressée au Président du Club, l’Appelant a rappelé que ses salaires des mois de juin, juillet et août ne lui avaient toujours pas été versés. L’Appelant exposait en outre, notamment, avoir été surpris de constater que les entraînements de l’équipe “espoir” avaient repris au début du mois, sans qu’il en ait été averti et que deux personnes avaient été mises à l’essai, lesquelles donnaient des directives et exerçaient sa fonction.
Le 4 septembre 2012, l’Appelant, constatant que le courrier recommandé du 23 août 2012 avait été refusé, a adressé au Club une lettre de mise en demeure du paiement des salaires afférents aux mois de juin, juillet et août 2012 dans un délai au 10 septembre 2012. L’Appelant exposait qu’à défaut, il se verrait dans l’obligation de cesser son travail au sein du Club et d’agir par toute voie judiciaire pour faire constater la résiliation aux torts exclusifs du Club.
Il résulte d’un constat d’huissier de justice établi le 5 septembre 2012 qu’à cette date, l’Appelant s’est vu interdire par le gardien de sortir de l’enceinte du Club avec le véhicule de marque KYA avec lequel il y était entré. Ce gardien a déclaré avoir reçu des consignes de la part des responsables du Club lui enjoignant de ne pas permettre à l’Appelant de sortir ce véhicule et de lui demander de lui remettre les clés, ce qui a été fait.
Un constat d’huissier établi le 6 septembre 2012 atteste que l’Appelant s’est vu interdire l’accès à son lieu de travail par le gardien, conformément aux instructions reçues par celui-ci des responsables du Club.
4.2. Par courrier du 6 septembre 2012, l’Appelant, se référant au non-paiement de ses salaires et exposant les faits décrits ci-dessus, a notamment fait savoir au Club qu’il ne pouvait que constater que le contrat les liant avait été unilatéralement rompu par le WAC et ce, sans motif et sans respect d’une quelconque procédure ou préavis.
Par acte d’huissier du 11 septembre 2012, l’Appelant a mis le Club en demeure de lui verser dans les 15 jours: l’intégralité de ses rémunérations de juin 2012 jusqu’au 30 juin 2014, soit un montant de 1.164.000 MAD, conformément à l’art. 5 du contrat; un montant de 500.000 MAD au titre des frais de rapatriement et déménagement dans son pays d’origine; un montant de 200.000 MAD en réparation de son préjudice moral et un montant de 500.000 MAD au titre des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat.
5.
Par courrier 12 septembre 2012, dont copie à la FIFA et à la FRMF, le Club s’est adressé en ces termes à l’Appelant:
“Nous accusons réception à votre notification par huissier datée du 06/09/2012 relative à notre décision de mettre fin à votre exercice comme Directeur Technique au sein du WAC.
Cette décision a été prise à la suite de l’invalidation par les membres de l’Organe de Première Instance (OPI) pour l’évaluation du dossier de demande de licence de participation au Championnat Professionnel au titre de la saison 2012/2013, de votre Diplôme pour assurer la fonction de Directeur Technique du Club.
Eu égard aux prescriptions du règlement de la Fédération d’Octroi de licence aux Clubs, en vue de leur participation au Championnat Professionnel au titre de la saison 2012/2013, nous avons été dans l’obligation de vous signifier notre décision de mettre fin à votre mission au sein du Club à dater du 30/06/2012 comme Directeur Technique.
Par ailleurs, vous n’êtes pas sans savoir que votre recrutement au sein du WAC eut lieu à un moment où les Clubs du Maroc n’étaient guère astreints à certaines exigences rigoureuses notamment la conformité du diplôme de directeur technique avec les critères exigés pour assurer cette fonction quand vint l’ère de l’entrée du football marocain dans le monde du professionnalisme.
Pour marquer notre sens de la communication et dans l’esprit de vous entourer du maximum d’informations relatives à la décision des membres de l’OPI d’invalider votre Diplôme pour continuer d’exercer au WAC en tant que Directeur Technique, nous vous avons adressé une correspondance le 04 Juin 2012 pour étayer cette décision ainsi que les considérants qui vous empêchent d’exercer cette fonction. […]”.
6.
6.1. Le courrier du 4 juin 2012 auquel fait référence la lettre susmentionnée a été versé au dossier de la présente cause.
Ce courrier expose ce qui suit:
“Objet: Evaluation du dossier de demande de licence de participation au Championnat Professionnel au titre de la saison sportive 2012/2013
Nous portons à votre connaissance que lors de la visite en date du 17 Mai 2012 confirmée par lettre du 31 mai 2012 de [l’OPI] […], les membres de cette instance nous ont notifié, en votre présence, que le diplôme de qualification que vous avez présenté ne répond pas aux critères exigés pour assurer la fonction de Directeur Technique pour laquelle vous avez été engagé, cette notification nous a été confirmée par lettre du 26 juin 2012 n° 19 OPI 12-13.
Eu égard aux prescriptions de règlement de la Fédération d’Octroi de Licence aux Clubs, cette dernière nous invite à prendre les dispositions nécessaires pour satisfaire à ce critère.
Aussi sommes-nous au regret de vous informer qu’en application de ce règlement nous sommes dans l’obligation de mettre fin à votre mission au sein du WAC à dater du 30 Juin 2012”.
6.2. L’Appelant expose que ce courrier, produit par l’Intimé à l’appui de sa réponse, ne lui a jamais été adressé.
Il relève qu’alors qu’il est censé avoir été écrit le 4 juin 2012, il se réfère à une lettre du 26 juin 2012 de l’Organe de Première Instance pour l’Octroi de Licence Club (“OPI”). Or, il ne peut pas s’agir là d’une simple erreur de plume, en ce sens que la date du 26 juin serait fausse, dès lors qu’il existe bien un courrier du 26 juin 2012 de l’OPI, lequel comporte effectivement la référence “n° 19 OPI 12-13”.
6.3. Le courrier n° 19 OPI 12-13 du 26 juin 2012 adressé par le Président de l’OPI, Abderrahman Bekkaoui, se réfère à une lettre n° 14 OPI 12-13.
Il rappelle que l’OPI a notifié au Club que le Diplôme de qualification présenté par son responsable de formation, soit l’Appelant, ne répond pas au critère exigé pour assurer cette fonction. Le Club est ainsi invité par l’OPI à prendre les dispositions nécessaires pour satisfaire à ce critère dans les meilleurs délais.
6.4. La référence à un courrier référencé postérieur (courrier de l’OPI du 26 juin 2012) est un élément qui conduit à retenir que la date indiquée du 4 juin 2012, répétée dans le courrier du 12 septembre 2012, est erronée; ce courrier a très vraisemblablement été rédigé postérieurement au 26 juin 2012.
Cela étant, il n’est pas établi que ce courrier daté du 4 juin 2012 ait jamais été adressé à l’Appelant à l’époque des faits.
L’Arbitre unique retient ainsi que l’Appelant n’a pas été informé de l’intention du WAC de mettre fin au contrat de travail avant de recevoir le courrier du 12 septembre 2012.
L’on ne voit d’ailleurs pas pourquoi l’Appelant se serait évertué à faire constater par huissier, début septembre 2012, que le Club se comportait comme s’il ne voulait plus exécuter le contrat de travail s’il avait déjà reçu de sa part une lettre lui signifiant cette volonté. Cet élément vient confirmer le fait que le courrier du 12 septembre 2012 est la première lettre reçue du Club par l’Appelant ensuite de ses différentes mises en demeure.
Enfin, il n’est pas non plus établi que le courrier de l’OPI du 26 juin 2012 précité aurait été adressé à l’Appelant à l’époque des faits.
7.
Il résulte du témoignage de Abderrahman Bekkaoui, recueilli lors de l’audience, que le diplôme d’entraîneur établi par la Fédération Française de Football qui a été soumis par le WAC à l’OPI présentait, pour l’OPI, une double difficulté: (1) il indiquait avoir été délivré à Rachide Hamidi et non à Raphaël Hamidi et (2) il ne spécifiait pas le niveau de qualification (A, B, etc.) atteint par son titulaire.
L’Arbitre unique retient que ces deux points (titularité du diplôme et niveau de qualification) faisaient que la documentation fournie à l’OPI par le Club était en l’état insuffisante; ces deux points devaient être éclaircis par le Club dans le cadre du processus d’obtention de sa licence pour la saison à venir afin qu’il se mette en conformité avec la réglementation de l’OPI.
En ce qui concerne le premier point, l’Appelant a immédiatement expliqué lors de l’audience qu’il porte les deux prénoms de Rachide et de Raphaël; les documents officiels en attestent.
8.
Le 15 janvier 2013, la FIFA, sous la signature du Directeur des Services Juridiques et de la Cheffe du Statut du Joueur, a adressé à l’Appelant le courrier suivant:
“Nous […] accusons réception de votre courrier daté du 2 octobre 2012, dont le contenu a retenu toute notre attention.
A ce sujet, nous avons remarqué que vous souhaiteriez porter plainte à la FIFA à l’encontre du club marocain du Wydad Athletic Club, dans la mesure où ce dernier aurait prétendument manqué à ses obligations contractuelles.
Après une étude minutieuse de la documentation reçue à cet effet, nous avons constaté que, conformément au contrat de travail que vous avez conclu avec le club marocain du Wydad Athletic Club, vous avez été engagé en tant que directeur technique sportif.
A cet égard, nous attirons votre attention sur le fait que les litiges entre un directeur technique sportif et un club ou une Association ne relève pas de la compétence de la FIFA. En effet, l’article 22 c) du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs stipule que la compétence de la FIFA s’étend “… aux litiges relatifs au travail entre … un club ou une association et un entraîneur…”.
De plus, nous souhaiterions vous renvoyer au contenu de l’article 6 al. 1 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges qui prévoit que seuls les clubs, les joueurs, les entraîneurs ou les agents organisateurs de matchs et les agents de joueurs licenciés sont membres de la FIFA et peuvent, le cas échéant, être une partie dans les procédures devant les instances de la FIFA.
Par conséquent, nous sommes au regret de devoir vous informer que nous ne semblons pas être en mesure de considérer votre demande.
Finalement, veuillez noter que ces informations, basées sur la documentation en notre possession, sont de nature générale et sans aucun préjudice quelconque”.
9.
Le 19 février 2013, l’Appelant a saisi la Commission Spéciale de Résolution des Litiges de la FRMF (ci-après: “la CSRL”) d’une requête dirigée contre le WAC, dont les conclusions sont les suivantes:
“Il est demandé à la Commission de Règlement des Litiges de la FRMF de:
Dire et juger la requête de Monsieur Hamidi recevable et bien fondée;
Constater que le WAC n’a pas respecté ses engagements contractuels et commis une faute grave;
Constater que le contrat conclu entre le WAC et Monsieur Hamidi prévoit que quel que soit le motif de la rupture, Monsieur Hamidi percevra son salaire jusqu’au terme du contrat.
En conséquence:
- Dire et juger la résiliation du contrat aux torts exclusifs du WAC;
- Condamner le WAC au paiement de 1.212.500 MAD au titre des salaires restant dus jusqu’au 30 juin 2014, terme prévu par son contrat, ainsi qu’à 185.000 MAD au titre des avantages en nature dus;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 500.000 MAD en réparation du préjudice de carrière de Monsieur Hamidi;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 200.000 MAD en réparation du préjudice moral de Monsieur Hamidi;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 100.000 MAD correspondant aux frais de sa défense;
- Dire qu’à défaut de paiement de l’ensemble des condamnations dans les 30 jours suivant la notification de la décision à intervenir les sommes porteront intérêt à 5% l’an;
- Dire qu’à défaut de paiement de l’ensemble des condamnations dans les 30 jours suivant la notification de la décision à intervenir, l’affaire sera soumise à la Commission de Discipline de la FRMF en vue d’une sanction à l’encontre du WAC”.
Dans le cadre de cette procédure, le Club s’est déterminé sur le fond par courrier du 5 mars 2013, dans lequel il expose – en substance – la position exposée dans sa lettre à l’Appelant du 12 septembre 2012, précitée (ch. 5 ci-dessus).
Par décision communiquée à l’Appelant le 22 avril 2014, la CSRL a statué comme suit sur cette requête:
“2: RECEVABILITE
Attendu que le litige est en rapport au maintien de la stabilité contractuelle entre un club national et un cadre sportif.
3: EXPOSE DES MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que M. Raphaël Hamidi réclame les salaires correspondant au mois de juin 2012 jusqu’au 30-06-2014.
Attendu que l’OPI a confirmé que le diplôme de qualification de M. Raphaël Hamidi ne répond pas aux critères exigés pour exercer la fonction de Directeur Technique.
PAR CES MOTIFS
Vu la Réglementation de la FIFA,
Vu le règlement de la FRMF,
Vu le règlement de la CSRL,
vu les dispositions du contrat liant les deux parties,
La Commission statuant en premier ressort:
- M. Raphaël Hamidi ne peut pas réclamer ses dus financiers auprès du club WAC.
- Cette décision est susceptible d’appel devant la Commission Centrale d’Appel. L’appel devra être interjeté dans un délai de 05 jours à compter de la notification de la décision”.
10.
10.1. Le 28 avril 2014, l’Appelant a adressé à la Commission Centrale d’Appel de la FRMF (ci-après: “la CCA”) un appel contre cette décision. Le courrier d’accompagnement de cet appel rédigé par son conseil mentionne notamment “concernant l’avance des frais de procédure d’un montant de 2.000 MAD, je vous remercie de m’indiquer les coordonnées bancaires de la FRMF afin que mon client puisse effectuer un virement de cette somme”.
L’Appelant allègue que la FRMF lui a adressé les coordonnées bancaires par courriel du 5 mai 2014, reçu le 9 mai 2014 et qu’il procédé au paiement requis le même jour. L’Arbitre unique considère que les pièces au dossier ne permettent pas de retenir ces éléments de fait; les conséquences juridiques en seront examinées dans la partie “droit” dans la mesure utile.
10.2. Par courriel du 7 octobre 2014, l’Appelant a relancé à la CCA au sujet de cette procédure d’appel en communiquant pour rappel les références de son virement de 2.000 MAD indiquant qu’il avait eu lieu le 9 mai 2014.
Par courriel du 1er juillet 2014, l’Appelant a à nouveau interpellé la FRMF pour connaître état d’avancement de la procédure, indiquant avoir effectué un virement le 10 mai 2014 conformément aux instructions reçues.
Par courrier du 12 janvier 2015, transmis par fax le 14 janvier 2015, l’Appelant est intervenu auprès du Président de la FRMF pour le mettre en demeure de lui fournir des informations au sujet de cette procédure, se plaignant d’un déni de justice.
10.3. Par courrier du 3 juillet 2015, destiné à être adressé au conseil de l’Appelant par courriel, le Secrétaire Général adjoint de la FRMF, Mohamed Horrane, l’a informé que la CCA tiendrait sa réunion le 8 juillet 2015 à 11h00 au siège de la FRMF.
L’Appelant était prié “de bien vouloir prendre les dispositions nécessaires pour prendre part ou [se] faire représenter à cette séance”, étant précisé “qu’il [était] impératif que [l’Appelant] soit présent à cette réunion”.
Il est établi que ce courriel a été adressé à une adresse électronique erronée, soit invalide.
L’Arbitre unique retient ainsi que cette convocation n’est jamais parvenue à l’Appelant, comme le confirment du reste les démarches effectuées par celui-ci aux fins d’obtenir des informations sur l’avancement de la procédure d’appel, dont il n’avait aucune nouvelle (ch. 10.6. ci-dessous).
10.4. Le 8 juillet 2015, la CCA a rendu une décision dont le contenu est en particulier le suivant:
“[…] Les Faits:
- Le 22/04/2014, la décision de la CSRL a été notifiée à l’appelant et aucune contestation n’a été enregistrée.
- Le 28/04/2014, une requête d’appel a été adressée à la FRMF. Elle n’était pas accompagnée d’un versement des droits d’appel d’un montant de Deux Milles Dirhams (2.000,00 DHM).
- Le 12/05/2014, la FRMF reçoit un justificatif concernant le paiement des droits d’appel.
- L’appelant, dans son email du 1er juillet 2014 prétendait que le paiement a été effectué le 10/05/2014 en réponse à un écrit reçu de la FRMF le 05/05/2014.
- Le 03/07/2015, une convocation en bonne et due forme a été adressée à l’appelant de se présenter devant la Commission Centrale d’Appel au siège de la FRMF le 08/07/2015.
- Le 08/07/2015, la Commission Centrale d’Appel, constatant la non présence de l’appelant, décide de statuer en estimant qu’elle a les éléments nécessaires.
Les Considérations:
- Vu que l’appel n’est recevable devant la Commission Centrale d’Appel que dans le cas où il est formulé dans un délai de cinq (05) jours suivant la notification et accompagné d’un versement des droits d’appel selon les règlements de la FRMF relatifs à la procédure d’appel.
- Vu que si cette requête d’appel a été enregistrée à la FRMF dans le délai prescrit, les droits d’appel n’ont été effectués qu’après l’expiration de ce délai.
- Vu que l’appelant était dans l’obligation de formuler sa requête selon les formes et délai prescrits par le règlement de la FRMF en se basant sur le principe que personne n’est censé ignorer les règlements en vigueur, et que ces écrits échangés avec la FRMF tardivement, après l’expiration de ce délai, ne le dispense pas légalement de cette obligation”.
10.5. La FRMF a procédé aux démarches destinées à la notification par fax de cette décision aux Parties le 20 juillet 2015.
Le Club l’a reçue à cette date.
Il n’est en revanche pas établi que le fax destiné au conseil de l’Appelant lui soit parvenu.
L’Arbitre unique retient ainsi que cette décision n’a pas été communiquée à l’Appelant à cette occasion et que l’Appelant n’en avait pas connaissance au moment d’entreprendre les démarches devant lui permettre d’obtenir des informations sur le sort donné à son appel (ch. 10.6 ci-après).
10.6. L’Appelant a continué à tenter d’obtenir de la FRMF des informations sur la procédure par courriel du 20 octobre 2015, par courrier recommandé du 30 juin 2016, par mise en demeure formelle du 28 septembre 2016 et mise en demeure par voie d’huissier de justice du 4 octobre 2016.
Le 8 novembre 2016, l’Appelant a déposé devant le Tribunal administratif de Rabat une requête en référé contre la FRMF tendant à ce qu’il soit ordonné à celle-ci, sous menace de sanction en cas d’inexécution, de lui faire connaître le sort de son appel.
Lors de l’audience, l’Appelant a confirmé et précisé les explications fournies par courriel du 20 septembre 2017, ensuite d’une demande de production de cette ordonnance émise par courrier du Greffe du TAS du 15 septembre 2017, à savoir que le tribunal saisi avait rendu une décision sur le siège mais qu’aucune ordonnance ne lui avait encore été adressée à ce jour.
Il a également expliqué qu’après que le juge ait statué sur le siège, le greffe du tribunal avait informé son conseil qu’une décision avait été produite par la FRMF. Le clerc qui s’est rendu sur place le 27 décembre 2016 n’a pas pu obtenir de photocopie de cette décision mais a pu la photographier avec son téléphone portable.
C’est dans ces circonstances que l’Appelant a eu connaissance pour la première fois de la Décision attaquée.
L’Arbitre unique considère que ces allégations sont suffisamment corroborées par les pièces du dossier et qu’elles doivent être ainsi être tenues pour établies. On ne saurait en particulier faire grief à l’Appelant, compte tenu de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, de ne pas avoir apporté de plus amples éléments concernant la date à laquelle le clerc s’est rendu sur place.
III. PROCEDURE DEVANT LE TAS
11.
Les principaux éléments de la procédure devant le TAS sont les suivants:
11.1. Le 13 janvier 2017, conformément aux dispositions des art. R47 et R48 du Code de l’arbitrage en matière de sport (ci-après: “le Code”), Raphaël Hamidi a déposé une déclaration d’appel au Greffe du TAS contre la décision de la CCA rendue le 8 juillet 2015 (ci-après: la “Décision attaquée”). Il a conclu à ce que cette décision soit réformée comme suit:
“- Dire et juger la résiliation du contrat aux torts exclusifs du WAC;
- Condamner le WAC au paiement de 1.212.500 MAD (Dirham Marocain) au titre des salaires restant dus jusqu’au 30 juin 2014, terme prévu par son contrat, ainsi qu’à 185.000 MAD au titre des avantages en nature dus;
- Dire et juger que ces sommes sont assorties d’intérêts de retard au taux de 5% l’an à compter de la date de rupture du contrat;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 500.000 MAD en réparation du préjudice de carrière de Monsieur Hamidi;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 100.000 MAD en réparation du préjudice moral de Monsieur Hamidi;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 200.000 MAD correspondant aux frais de sa défense;
- Condamner le WAC au paiement des frais de la procédure et droit de greffe”.
11.2. Le 16 février 2017, le Greffe du TAS a informé les Parties que, vu la requête de l’Appelant et l’absence d’objection de l’Intimé, la Présidente de la Chambre arbitrale d’appel du TAS avait décidé de soumettre la présente procédure à un arbitre unique.
Par courrier du 22 février 2017, les Parties ont été informées que Pierre Muller, Juge, à Lausanne, avait été désigné en cette qualité.
Le 27 février 2017, à la suite d’une requête probatoire de l’Appelant, tacitement acceptée par l’Intimé, la FRMF a adressé une copie de son dossier, lequel a été transmis aux Parties le 28 février 2017.
A la suite d’une réquisition de l’Appelant acceptée par l’Arbitre unique, la FRMF a adressé, le 16 mars 2017, une copie du Règlement procédural de la CSRL tel qu’en vigueur à compter du 14 mars 2013, ainsi qu’une copie du Règlement procédural disciplinaire applicable à compter de la saison 2010/2011.
Ces règlements ont été transmis aux Parties le 17 mars 2017, l’échéance du délai imparti à l’Appelant pour déposer son mémoire d’appel étant fixée au 27 mars 2017.
Le Greffe du TAS a également confirmé aux Parties qu’en l’absence de toute objection de leur part au courrier qui leur avait été adressé à ce sujet le 14 mars 2017, l’appel provisoire déposé par l’Appelant le 3 mars 2017 et les pièces déposées le 9 mars 2017 ne seraient pas prises en compte dans le cadre de la présente procédure.
11.3. Le 26 mars 2017, l’Appelant a déposé son mémoire d’appel, dont les conclusions sont les suivantes:
“- Réformer la décision de la Commission Centrale d’appel de la FRMF du 20 juillet 2015;
- Dire et juger la résiliation du contrat aux torts exclusifs du WAC;
- Condamner le WAC au paiement de 1.212.500 MAD (Dirham Marocain) au titre des salaires restant dus jusqu’au 30 juin 2014, terme prévu de son contrat, ainsi qu’à 99.000 MAD au titre des avantages en nature dus;
- Dire et juger que ces sommes sont assorties d’intérêts de retard au taux de 5% l’an à compter de la date de rupture du contrat;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 500.000 MAD en réparation du préjudice de carrière de Monsieur Hamidi;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 200.000 MAD en réparation du préjudice moral de Monsieur Hamidi;
- Condamner le WAC au paiement de la somme de 200.000 MAD correspondant aux frais de sa défense;
- Condamner le WAC au paiement des frais de la procédure et droit de greffe et au remboursement des frais de procédure devant la CCA d’un montant de 2.000 MAD
- Dire qu’à défaut de paiement de l’ensemble des condamnations dans les 30 jours le prononcé de la sentence à intervenir, les sommes porteront intérêt au taux de 5% l’an”.
Le 16 juin 2017, l’Intimé a déposé sa réponse, concluant à ce que le TAS:
“In limine litis:
- Que la déclaration d’appel de l’Appelant soit déclarée irrecevable;
- Qu’il se déclare incompétent pour statuer sur le présent litige;
- Que l’ensemble des moyens et prétentions de l’Appelant soit en conséquence rejeté;
A titre subsidiaire:
- Que la décision d’irrecevabilité de la Commission Centrale d’Appel soit jugée parfaitement fondée;
- Que l’ensemble des moyens et prétentions de l’Appelant soit en conséquence rejeté.
A titre plus subsidiaire:
- Qu’il reconnaisse la validité de la résiliation du contrat d’engagement de l’Appelant par l’Intimé;
- Que l’ensemble des moyens et prétentions de l’Appelant soit en conséquence rejeté;
- A défaut, que le montant des dommages et intérêts de l’Appelant soit limité à la somme de 1 164 000 DHS en application de l’article 5 du contrat conclu le 13 juillet 2010.
A titre plus subsidiaire:
- Que la cause soit renvoyée à la Commission Centrale d’Appel de la FRMF;
- Que l’ensemble des moyens et prétentions de l’Appelant soit en conséquence rejeté.
En tout état de cause:
- la mise à la charge de l’Appelant des frais de la procédure devant le TAS;
- le remboursement des frais et honoraires d’avocat de l’Intimé y afférant”.
Le 31 juillet 2017, l’Appelant a déposé sa réponse au sujet des exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité soulevées par l’Intimé.
11.4. Par courrier du 15 août 2017, les Parties ont été informées que l’Arbitre unique avait décidé de tenir une audience qui aurait lieu le 26 octobre 2017.
Les Parties ont signé l’ordonnance de procédure, l’Intimé ayant toutefois tracé le paragraphe introductif énonçant que “conformément aux termes de cette ordonnance, les parties acceptent de soumettre le présent litige au [TAS] pour qu’il soit tranché suivant le [Code]. Au surplus, les dispositions du chapitre 12 de la Loi suisse sur le droit international privé (LDIP) sont applicables, à l’exclusion de toute autre loi”, indiquant en lieu et place que “le WAC s’oppose à l’application de ces dispositions. Le WAC conteste leur application au présent cas d’espèce”.
12.
12.1. L’audience du 26 octobre 2017 s’est déroulée en présence de l’Arbitre unique, assisté de Me Pauline Pellaux, Conseillère au TAS.
L’Appelant s’est présenté personnellement, accompagné de son conseil, Me Redouane Mahrach.
L’Intimé a pour sa part été représenté par Me Nicolas Bône.
Lors de l’introduction de l’audience, les Parties ont confirmé qu’elles n’avaient aucune objection à émettre concernant le déroulement de la procédure arbitrale à ce jour, ni au sujet de la désignation et de l’indépendance de l’Arbitre unique, la compétence du TAS étant en revanche, comme exposé, contestée par l’Intimé.
12.2. Les Parties ont été entendues dans leurs moyens de fait et de droit et ont pu répondre aux questions de l’Arbitre unique.
Dans le cadre de l’instruction, Mohamed Horrane et Abderrahman Bekkaoui ont été entendus comme témoins par vidéo-conférence et ont pu répondre aux questions des Parties et de l’Arbitre unique. Leurs déclarations sont reprises, dans la mesure utile, dans la présente sentence.
L’instruction a été close sans autre réquisition des Parties.
Au titre des plaidoiries, les Parties se sont référées aux développements qu’elles avaient déjà exposés au cours de l’audience.
L’audience a été levée sans autre réquisition des Parties.
IV. RESUME DES ARGUMENTS DES PARTIES
13.
13.1. Les principaux moyens développés par l’Appelant, dans ses écritures et lors de l’audience, sont, en résumé – non exhaustif -, les suivants:
(a) Compétence et recevabilité
(i) Compétence du TAS et compétence des organes de la FRMF par rapport à ceux de la FIFA
- la compétence du TAS résulte de l’art. 70 des Statuts de la FRMF;
- l’incompétence prétendue de la FRMF, soulevée par l’Intimé devant le TAS, est un moyen nouveau qui n’a jamais été émis précédemment, alors qu’il aurait dû être immédiatement invoquée selon le principe de la bonne foi ou de l’Estoppel;
- la CSRL ne s’est pas déclarée incompétente alors qu’elle était tenue d’examiner d’office sa compétence en vertu de l’art. 4 du Règlement procédural de la CSRL; il en va de même de la CCA;
- à cela s’ajoute que, par courrier du 15 janvier 2013, la FIFA a exposé qu’elle n’était pas compétente pour se saisir de ce litige;
(ii) Respect du délai d’appel devant le TAS
- l’Intimé soutient que l’appel n’aurait pas été formé devant le TAS dans le délai de 21 jours applicable (art. R49 du Code), mais il n’apporte pas la preuve de la date de la notification de la Décision attaquée;
- en tout état de cause, la Décision attaquée n’a jamais été notifiée à l’Appelant; il n’en a eu connaissance que parce que le clerc de l’étude de son conseil est allé consulté le dossier auprès du tribunal qu’il avait dû saisir en référé et qu’il en a pris une photographie le 27 décembre 2016;
- la Décision attaquée n’indique pas les voies de recours, de sorte qu’aucun délai d’appel ne peut lui être opposé;
- le principe de la bonne foi commandait à l’Intimé, qui déclare avoir reçu notification de la décision, de s’assurer que son adversaire l’avait également réceptionnée et de faire courir les délais à son encontre;
- l’appel formé le 12 janvier 2017 et réceptionné le 13 janvier 2017 par le Greffe du TAS a été formé dans un délai de 21 jours depuis le moment où l’Appelant a eu connaissance de la Décision attaquée dans les circonstances décrites ci-dessus;
(iii) Absence de mise en cause de la FRMF
- contrairement à ce que soutient l’Intimé, la FRMF n’avait pas à être mise en cause dans le cadre de la présente procédure; l’Appelant n’est en effet pas en litige avec la FRMF;
- l’Intimé aurait du reste eu tout loisir de l’appeler en cause s’il considérait que sa participation à la procédure était nécessaire (art. 41.2 du Code);
(b) Droit applicable
- il résulte de l’art. R58 du Code qu’il y a lieu d’appliquer à titre principal les règlements sportifs en vigueur au moment des faits et, à titre subsidiaire, le droit du pays dans lequel la fédération ayant rendu la décision attaquée a son siège, soit le droit marocain;
(c) Décision attaquée
(i) Notification de la décision de la CSRL;
- communiquée par courriel du 22 avril 2014, cette décision n’a jamais été notifiée valablement, soit conformément à l’art. 15 du Règlement de procédure de la CSRL, qui prévoit la notification par lettre avec accusé de réception ou par fax;
- en l’absence de notification en bonne et due forme, aucun délai d’appel n’est opposable à l’Appelant (art. 16 du Règlement de procédure de la CSRL);
(ii) Respect du délai de 5 jours pour saisir la CCA
- même à considérer que la décision de la CSRL aurait été valablement notifiée par courriel, l’appel a été formé en temps utile, le 28 avril 2014, dès lors que l’art. 17 du Règlement de procédure de la CSRL prévoit, en substance, que les délais commencent à courir le lendemain du jour de la notification et que le 27 avril 2014 était un dimanche, l’échéance du délai étant ainsi reportée au lundi 28 avril 2014;
(iii) Versement des frais d’appel exigés par la CCA
- le Règlement procédural de la CSRL ne subordonne pas la faculté de faire appel au paiement d’une quelconque somme d’argent;
- le Règlement procédural disciplinaire, qui prévoit à son art. 25 le versement d’un montant de 2.000 MAD, n’a pas vocation à s’appliquer en l’espèce, puisque le contentieux n’est pas de nature disciplinaire et que ce Règlement s’applique à la Commission disciplinaire d’appel de la FRMF et non à la CSRL ni à la CCA;
- au surplus, ayant entendu parler de la possibilité qu’il ait à payer des frais de procédure, le conseil de l’Appelant a appris le montant de 2.000 MAD, mentionné dans son courrier 28 avril 2014, des services de la FRMF, par téléphone,
- ce courrier comporte sa demande d’indication des coordonnées bancaires lui permettant de s’acquitter de ce montant, étant précisé qu’étant alors à l’étranger, il ne pouvait procéder à un tel paiement avant que la FRMF ne lui transmette cette information;
- la CCA ne pouvait pas lui reprocher de ne pas avoir procédé à ce versement avant de lui avoir fourni lesdites coordonnées bancaires et le délai de 5 jours ne pouvait pas commencer à courir avant réception, le 9 mai 2014, du courriel du 5 mai 2014;
- une fois les coordonnées bancaires obtenues, il a immédiatement procédé au versement de la somme en question;
(iv) Partialité de la décision de la CCA
- la décision de la CCA est partiale;
- on peut douter de l’existence d’une décision rendue le 20 juillet 2015, compte tenu des démarches effectuées par le conseil de l’Appelant, auxquelles la FRMF n’a jamais répondu; ce n’est qu’après l’introduction de la procédure de référé que la FRMF a “sorti d’un chapeau” cette décision;
- si une telle décision avait existé, elle aurait été notifiée conformément à la réglementation en vigueur;
(d) Prétentions de l’Appelant envers l’Intimé
(i) Motif de rupture du contrat invoqué par l’Intimé
- s’il est vrai qu’à compter de la saison 2011-2012 la FRMF a introduit un nouveau règlement intitulé “Règlement pour l’octroi des licences aux clubs”, celui-ci ne soumet pas la fonction de directeur technique à une obligation de diplôme; de toute manière, il n’est pas démontré que le diplôme dont disposait l’Appelant n’était pas susceptible d’être reconnu par la FRMF;
- de surcroît, l’Intimé n’a rien fait pour contester la décision de l’OPI alors qu’un appel aurait été possible; en outre il appartient au besoin à l’employeur de former ses salariés afin qu’ils disposent des qualifications nécessaires, comme cela résulte en l’espèce de l’art. 4 du contrat et de l’art. 105 du Code marocain du travail, dispositions que l’Intimé n’a pas respectées;
(ii) Absence de cause contractuelle de licenciement et non-respect de la procédure de licenciement pour faute grave
- aucun des cas de résiliation prévus contractuellement n’est réalisé en l’espèce;
- la décision de l’Intimé de mettre fin au contrat que celui-ci a prise le 30 juin 2012 n’a jamais été communiquée à l’Appelant;
- l’Intimé n’a ainsi pas respecté le Code marocain du travail, qui prévoit qu’avant le licenciement du salarié, il doit pouvoir se défendre et être entendu – dans un délai ne dépassant pas huit jours à compter de la date de la constatation de l’acte qui lui est imposé - par l’employeur ou le représentant de celui-ci en présence du délégué des salariés ou d’un représentant syndical; ce Code n’a pas non plus été respecté en ce qu’il exige l’établissement d’un procès-verbal de cet entretien;
- l’Intimé ne s’est pas davantage conformé aux art. 63 et 64 du Code marocain du travail: l’Appelant ne s’est pas vu remettre une décision de licenciement et une telle décision n’a pas non plus été transmise à l’inspection du travail;
- cette violation par l’Intimé de son devoir légal d’information fait revêtir au licenciement un caractère abusif, quelle que soit la gravité de la faute commise par le salarié;
(iii) Détail des prétentions de l’Appelant
Le détail des prétentions de l’Appelant sera repris, si nécessaire, dans le cadre de la discussion y relative.
13.2. Les principaux moyens développés par l’Intimé, dans ses écritures et lors de l’audience, sont, en résumé – non exhaustif -, les suivants:
(a) Compétence et recevabilité
(i) Non-respect du délai d’appel au TAS
- l’Appelant ne démontre pas avoir respecté le délai d’appel de 21 jours applicable en l’espèce (art. R49 du Code); il ne démontre notamment pas à quelle date il a pris connaissance de la Décision attaquée;
- dans la mesure où l’Intimé n’était pas partie à la procédure devant le Tribunal administratif de Rabat et que l’Appelant a choisi de ne pas mettre en cause la FRMF dans la présente procédure en tant que partie intimée, il lui appartenait de justifier qu’il avait bien respecté le délai en question;
- sa déclaration d’appel est ainsi tardive et, à ce titre, irrecevable;
(ii) Incompétence du TAS
- s’il devait considérer que la déclaration d’appel n’est pas tardive, le TAS devrait constater son incompétence: il résulte en effet de l’art. 6 du contrat que les parties ont convenu de soumettre leur éventuel litige à l’arbitrage du WAC et, à défaut, à celui de la FIFA, à l’exclusion de toute autre juridiction;
- cette disposition, qui s’applique aux Parties en vertu du principe “pacta sunt servanda”, est en parfaite adéquation avec les dispositions de l’art. 22 du Règlement du Statut et Transfert des Joueur de la FIFA (“RSTJ”) (édition 2010). Cette disposition prévoit notamment que la compétence de la FIFA s’étend “aux litiges de dimension internationale entre un club ou une association et un entraîneur relatifs au travail, à moins qu’un tribunal arbitral indépendant garantissant une procédure équitable existe au niveau national”; dès lors qu’un tel tribunal n’existe pas dans le cas présent, seule la FIFA était compétente pour statuer en première instance et aurait dû être saisie;
- par conséquent, l’Appelant n’a pas épuisé les voies de recours internes comme l’exige l’art. R47 du Code; cette condition de recevabilité n’ayant pas été respectée, son appel est irrecevable;
- lors de l’audience, l’Intimé a également exposé que la compétence du TAS ne peut pas se fonder sur l’art. 70.1 des Statuts de la FRMF, car cette disposition prévoit que “conformément aux Statuts de la FIFA, tout appel interjeté contre une décision définitive et contraignante sera entendu par le [TAS]”; or – si l’on comprend bien - les termes “conformément aux Statuts de la FIFA” signifient que l’appel n’est ouvert que si les Statuts de la FIFA le prévoient; tel n’est pas le cas en l’espèce, l’Appelant ne pouvant se prévaloir d’aucune disposition statutaire de la FIFA pour saisir le TAS in casu;
- l’appel est donc irrecevable pour ce motif également;
(iii) Absence de mise en cause de la FRMF comme partie intimée
- l’absence de mise en cause de la FRMF comme partie intimée est particulièrement préjudiciable aux intérêts du WAC, dans la mesure où l’Appelant critique l’irrecevabilité de son appel devant la CCA; or, il est difficile pour l’Intimé, qui n’a pas instruit ni conduit les procédures de première instance et d’appel, de défendre la validité de la décision de la CCA sans disposer des documents et éléments de preuve détenus par la FRMF;
- la décision de l’Appelant de ne pas attraire la FRMF en tant que partie devant le TAS empêche l’Intimé de défendre efficacement ses intérêts, ce qui doit entraîner le rejet de l’intégralité des
moyens soulevés par l’Appelant;
(b) Décision attaquée
(i) Notification de la décision de la CSRL
- il résulte du dossier, notamment des courriers du conseil de l’Appelant, que cette décision a été notifiée le 22 avril 2014 audit conseil; l’Appelant ne peut dès lors invoquer le fait que cette décision ne lui aurait pas été notifiée selon les formes requises;
- c’est donc à partir du 22 avril 2014 qu’il convient de computer le délai d’appel à la CCA;
(ii) Non-paiement des frais d’appel exigés par la CCA
- c’est à tort que l’Appelant soutient qu’aucun droit d’appel ne pouvait être exigé de lui dans la mesure où le Règlement procédural disciplinaire qui le prévoit n’aurait pas vocation à s’appliquer ici;
- l’art. 34 du Règlement procédural de la CSRL prévoit en effet que “les décisions de la CSRL peuvent faire l’objet, en dernier ressort, d’un recours auprès de la [CCA]. Le délai de recours est fixé à 5 jours ouvrables à partir de la notification de la décision de la CSRL”; or, l’art. 35 des Statuts de la FRMF prévoit que “[…] la [CCA] fonctionne et statue conformément au Code Disciplinaire […], dont l’art. 25, qui s’applique dès lors par renvoi des Statuts de la FRMF, exige que “toute demande d’appel [soit] accompagnée, au titre de paiement des droits d’appel, d’un chèque de banque ou de la copie du bordereau de versement bancaire dans le compte de la FRMF ou, le cas échéant de la Ligue nationale de football professionnel, d’un montant de 2.000 MAD […]”;
- l’Appelant avait du reste parfaitement conscience de cette exigence puisqu’il mentionne le montant de 2.000 MAD dans son courrier du 28 avril 2014;
- de surcroît, le conseil de l’Appelant n’a interrogé la FRMF par fax pour connaître les coordonnées bancaires que le 28 avril 2014 à 17h00 alors qu’il aurait pu l’interroger dès la notification de la décision;
- l’Intimé émet également des réserves sur le fait que l’Appelant ait ignoré lesdites coordonnées bancaires étant donné qu’il a dû verser des frais par 1.500 MAD dans le cadre de la procédure devant la CSRL;
- enfin, l’argument de l’Appelant selon lequel le délai d’appel de 5 jours prévu le Règlement procédural de la CSRL ne pouvait commencer à courir qu’à compter de la réception des coordonnées bancaires doit être rejeté dans la mesure où un tel report n’est pas prévu réglementairement; on ne voit d’ailleurs pas, dans ce contexte, pourquoi il faudrait tenir compte de la date prétendue de réception de ces coordonnées (9 mai 2014) plutôt que de sa date d’envoi (5 mai 2014);
- en tout état de cause, l’Appelant n’a informé la FRMF qu’il avait procédé au paiement des droits d’appel que le 1er juillet 2014; et il n’a jamais transmis à la FRMF de copie du bordereau du versement bancaire dans les comptes de la FRMF;
(iii) Partialité de la décision de la CCA
- outre que l’Appelant a choisi - à tort - de saisir la FRMF plutôt que la FIFA, comme le prévoyait le contrat, il n’a pas déposé de requête de récusation à l’encontre des membres de la CCA;
(c) Renvoi de la cause à la CCA et droit applicable
- dans l’hypothèse où le TAS devrait annuler la décision d’irrecevabilité prises par la CCA, il lui appartiendrait de renvoyer la cause à cet organe en application de l’art. R57 du Code;
- la CCA n’a en effet pas statué sur le fond du dossier, lequel est soumis au droit marocain, comme le mentionne l’Appelant;
- or, il ne semble pas que l’Arbitre unique dispose d’une connaissance suffisante du droit marocain, notamment pour se prononcer sur la validité du diplôme d’entraîneur ou sur la validité de la rupture du contrat au regard du droit marocain;
(d) Prétentions de l’Appelant envers l’Intimé
(i) Validité de la rupture du contrat
- les missions et responsabilités que devait assumer l’Appelant dans l’exécution du contrat impliquaient qu’il détienne un diplôme d’entraîneur reconnu par la FRMF, élément qui était donc déterminant pour son engagement et pour le maintien de son contrat de travail; c’est pour cette raison que le contrat d’engagement prévoit à son art. 5 qu’il sera résilié de plein droit et sans préavis en cas si le Directeur technique est radié du corps des entraîneurs;
- tel a malheureusement été le cas; l’Appelant ne remplissait pas les critères impératifs exigés pour le responsable du programme de formation des jeunes joueurs et entraîneur des jeunes joueurs selon le Règlement de la FRMF sur la procédure pour l’octroi de Licences aux clubs du Championnat professionnel, à savoir:
“P. 07 – Responsable du Programme de Formation des Jeunes Joueurs
Le club doit avoir nommé un entraîneur en chef chargé des questions relatives au football de l’équipe première. L’entraîneur en chef doit:
a) être titulaire du diplôme d’entraîneur requis par la FRMF; ou
b) être titulaire de tout autre diplôme étranger valide ou reconnu comme tel par la FRMF; ou
c) être inscrit en session de formation en vue d’obtenir le diplôme requis.
P. 08 – Entraîneurs de jeunes joueurs
Le club doit avoir nommé pour chaque équipe de jeunes joueurs obligatoire [sic] au moins un entraîneur responsable, pour la dite équipe, de toutes les questions footballistiques.
Tous les entraîneurs, préparateurs physiques et entraîneurs de gardiens de jeunes joueurs doivent disposer des qualifications minimales définies par la FRMF. Ils doivent être dûment inscrits auprès de la FRMF ou de la LNFP”;
- l’Appelant n’a pas contesté la décision de l’OPI, de sorte que l’Intimé n’a pas eu d’autre choix que de résilier le contrat de travail avec effet au 30 juin 2012, en application de l’art. 5 de ce contrat;
- cette résiliation intervient de plein droit et sans indemnité; en effet la mention de l’art. 5 al. 2 du contrat selon laquelle “en cas de résiliation de ce contrat par l’une des deux parties pour quelques motifs que ce soit, l’intégralité des sommes dû [sic] jusqu’au terme du contrat (30 juin 2014) seront payées en totalité dans un délai de quinze (15) jours par la partie qui souhaite mettre un terme à ce contrat” ne s’applique que dans les cas de résiliation pour des motifs non prévus par le contrat;
- il ne serait en effet pas légitime que l’Appelant puisse réclamer l’intégralité de ses salaires alors même qu’il se rendrait coupable d’une faute grave; or, ce qui vaut pour la faute grave vaut également pour les motifs de rupture du contrat expressément prévus, comme la radiation du corps des entraîneurs;
- c’est donc à juste titre que la CSRL n’a pas alloué d’indemnité à l’Appelant;
(ii) Montant du préjudice: clause pénale
- dans l’hypothèse où le TAS considérerait que le contrat a été rompu abusivement par l’Intimé, il limitera le montant des dommages et intérêts à la somme de 1 164 000 MAD correspondant aux salaires courant du mois de juillet 2012 à juin 2014;
- l’art. 5 al. 2 du contrat permet en effet à l’Appelant de réclamer le salaire mensuel de 48.500 MAD courant du mois de juillet 2012 à juin 2014, à l’exclusion des frais, que l’Appelant n’a pas supporté durant cette période puisque son contrat était résilié;
- cette disposition constitue une clause pénale, convenue conformément au droit marocain, qui prévoit notamment que “les dommages sont la perte effective que le créancier a éprouvée et le gain dont il a été privé et qui sont la conséquence directe de l’inexécution de l’obligation. L’appréciation des circonstances spéciales de chaque espèce est remise à la prudence du tribunal: il doit évaluer différemment la mesure des dommages-intérêts, selon qu’il s’agit de la faute du débiteur ou de son dol. Les parties contractantes peuvent convenir des dommages-intérêts dus au titre du préjudice que subirait le créancier en raison de l’inexécution totale ou partielle de l’obligation initiale ou en raison du retard porté à son exécution. Le tribunal peut réduire le montant des dommages-intérêts convenus s’il est excessif ou augmenter sa valeur s’il est minoré comme il peut réduire le montant des dommages-intérêts convenu, compte tenu du profit que le créancier en aurait retiré du fait de l’exécution partielle de l’obligation. Toute clause contraire est nulle”.
- la clause pénale est définie par la doctrine marocaine comme étant “la clause par laquelle les parties fixent elles-mêmes et de manière forfaitaire le montant d’indemnité qui sera due en cas d’inexécution. Le débiteur devra donc payer la somme fixée par le contrat même si elle est supérieure ou inférieure au préjudice réel”;
- le TAS ne pourrait donc modifier le montant des dommages-intérêts prévus par l’art. 5 que s’il était manifestement minoré, ce qui n’est pas le cas;
(iii) Détail des prétentions de l’Appelant
Les remarques de l’Intimé relatives aux prétentions de l’Appelant seront reprises, si nécessaire, dans le cadre de la discussion y relative.
13.3. Lors de l’audience, l’Appelant a encore exposé qu’il n’aurait pas été tenu de saisir la CCA dès lors que, selon les Statuts de la FRMF, les décisions de la CSRL peuvent directement faire l’objet d’un appel au TAS. Il ne pouvait toutefois encourir le risque de ne pas suivre aux indications figurant dans la décision attaquée, en particulier celui de laisser échoir le délai d’appel de 5 jours, ce d’autant que ce délai est très court.
S’exprimant sur la question du renvoi de la cause à la FRMF, requis à titre subsidiaire par le Club, l’Appelant a exposé que compte tenu du temps déjà écoulé depuis la résiliation du contrat de travail, il ne saurait se voir imposer un tel allongement de la procédure.
Enfin, abordant le moyen de l’Intimé tiré de l’existence d’une clause pénale, l’Appelant a fait valoir que si la clause pénale était valable sur le principe, elle ne pouvait, en matière de droit social, avoir pour effet de priver le salarié de la possibilité de réclamer la réparation de la totalité de son dommage, la renonciation anticipée à une telle faculté n’étant pas licite en droit marocain.
V. DROIT
A. Compétence du TAS et recevabilité de l’appel
14.
14.1. Dès lors que le TAS se trouve en Suisse et que l’Intimé a son siège au Maroc, le présent arbitrage est de nature internationale (art. 176 al. 1 de la loi sur le droit international privé [“LDIP”]); partant, il est régi par le chapitre 12 de la LDIP.
Conformément à l’art. 186 al. 1 LDIP, le tribunal arbitral statue sur sa propre compétence. L’exception d’incompétence doit être soulevée préalablement à toute défense sur le fond (al. 2).
En l’espèce, il n’est pas contesté que l’Intimé a excipé de l’incompétence du TAS de manière conforme à l’art. 186 al. 2 LDIP et à l’art. R55 du Code.
14.2. Aux termes de l’art. R47 al. 1 du Code, “un appel contre une décision d’une fédération, association ou autre organisme sportif peut être déposé au TAS si les statuts ou règlements dudit organisme sportif le prévoient ou si les parties ont conclu une convention d’arbitrage particulière et dans la mesure où la partie appelante a épuisé les voies de droit préalables à l’appel dont il dispose en vertu des statuts ou règlements dudit organisme sportif”.
En l’espèce, la Décision attaquée a été rendue par un organe de la FRMF.
L’art. 70 des Statuts de la FRMF prévoit que “conformément aux Statuts de la FIFA, tout appel interjeté contre une décision définitive et contraignante sera entendu par le [TAS]. Le TAS ne traite pas des recours relatifs à la violation des Lois du jeu, à une suspension inférieure ou égale à quatre matches ou trois mois ou à une décision d’un tribunal arbitral d’une association ou d’une confédération, indépendant et régulièrement constitué”.
L’interprétation que fait l’Intimé de cette disposition, laquelle supposerait – si l’on comprend bien – d’examiner si les Statuts de la FIFA prévoient ou non la possibilité de faire appel au TAS dans le cas d’espèce ne saurait être suivie. Les termes “conformément aux Statuts de la FIFA” doivent être compris en ce sens que la FRMF indique se mettre en conformité avec les Statuts de la FIFA, lesquels exigent que les associations qui veulent en devenir membres reconnaissent dans leurs statuts la juridiction du TAS. On ne saurait voir ici d’autre lien avec les Statuts de la FIFA.
Cela posé, la Décision attaquée constitue sans nul doute une décision définitive et contraignante au sens de l’art. 70 des Statuts de la FRMF.
Elle est donc susceptible de faire l’objet d’un appel au TAS sur la base de cette disposition statutaire.
14.3. Il convient à ce stade d’examiner le moyen – soulevé par l’Intimé et qui touche à la recevabilité de l’appel - selon lequel le contentieux n’aurait pas dû être soumis à la FRMF mais à la FIFA en vertu de l’art. 6 du contrat.
Par cette disposition, les Parties ont clairement opté pour l’arbitrage aux fins de résoudre un éventuel litige.
Elles ont d’abord opté pour un arbitrage du WAC, dont on ne sait pas exactement quelle forme il aurait pu prendre. Peu importe toutefois, l’Intimé n’ayant jamais soutenu, ni partant démontré, qu’un tel arbitrage fût possible.
Elles ont ensuite évoqué, à titre éventuel, un arbitrage au sein de la FIFA.
La question pourrait donc en effet se poser de savoir si, en cas de litige, la voie arbitrale à suivre était celle de la FIFA – ce qui ne semble pas être le cas d’après le courrier adressé par la FIFA à l’Appelant le 15 janvier 2013 - ou celle de la FRMF.
Cette question n’est toutefois plus décisive.
C’est en effet pour la première fois devant le TAS que l’Intimé soulève cette prétendue incompétence de la FRMF.
Il résulte à cet égard du dossier que l’Intimé a pris position sur le fond du litige, en exposant à la CSRL, par courrier du 5 mars 2013, les motifs justifiant selon lui le licenciement de l’Appelant (cf. ch. 9 ci-dessus).
Or il résulte d’un principe général de procédure que l’exception d’incompétence doit être soulevée préalablement à toute défense au fond (cf. art. 186 al. 2 LDIP). Selon le Tribunal fédéral, il s’agit là d’un cas d’application du principe de la bonne foi, qui constitue un principe général du droit. Aussi l’autorité devant laquelle le défendeur procède au fond sans faire de réserve est compétente de ce seul fait, le défendeur perdant définitivement le droit d’exciper de son incompétence (TF 4A_98/2017, du 20 juillet 2017; 4A_634/2014, du 21 mai 2015; ATF 128 III 50). Cette règle générale, qui peut également être rattachée en matière d’arbitrage international au principe dit “d’estoppel” (cf. TF 4A_682/2011) et qui interdit à une partie de se prévaloir d’une position contraire à celle qu’elle a prise antérieurement, imposait à l’Intimé de soulever cette exception devant la CSRL déjà, lorsque celle-ci a été saisie par l’Appelant, ce qu’il n’a pas fait.
Il en résulte que l’Intimé est déchu du droit de contester la compétence de la FRMF à ce stade.
On observera de surcroît que, selon l’art. 4 du Règlement procédural de la CSRL en vigueur depuis le 14 mars 2013, “la CSRL examine d’office sa compétence pour tout litige qui lui est soumis conformément au présent règlement, à la règlementation de la FRMF, la FIFA et du code national du travail”. La CSRL ne s’est nullement considérée comme incompétente en l’espèce.
Il n’est au surplus pas allégué que l’Appelant aurait pu saisir un organe supplémentaire au sein de la FRMF, de sorte que la condition de recevabilité relative à l’épuisement des voies de droit interne est remplie.
14.4. Les Parties s’accordent, à juste titre, à considérer que le délai d’appel applicable en l’espèce est le délai de 21 jours prévu par l’art. R49 du Code.
Appréciant les preuves au dossier, l’Arbitre unique a retenu, dans la partie “faits” de la présente sentence, que l’Appelant a pris connaissance – au plus tôt - de la Décision attaquée le 27 décembre 2016, ensuite de la photographie prise par le clerc de l’étude de son conseil qui s’est rendu au greffe du Tribunal administratif de Rabat. Comme exposé (ch. 10.6 en particulier), cette appréciation se fonde sur le fait que la preuve de la notification de la Décision du 20 juillet 2015 à l’Appelant n’est pas rapportée et qu’il est démontré que celui-ci n’en avait pas connaissance au moment d’entreprendre les démarches devant lui permettre d’obtenir des informations sur le sort donné à son appel (courriel du 20 octobre 2015, courrier recommandé du 30 juin 2016, mise en demeure formelle du 28 septembre 2016, mise en demeure par voie d’huissier de justice du 4 octobre 2016 et dépôt d’une requête en référé devant le Tribunal administratif de Rabat le 8 novembre 2016). L’Arbitre unique a également tenu compte du fait qu’aucun élément ne vient infirmer les déclarations de l’Appelant au sujet de cette date de prise de connaissance de la décision (27 décembre 2016), de sorte que ses explications sont suffisamment corroborées par les pièces du dossier pour que l’Arbitre unique soit convaincu de leur véracité.
L’appel reçu par le Greffe du TAS le 13 janvier 2017 a ainsi été formé en temps utile, même si on l’admet – ce qui est pour le moins discutable - qu’une prise de connaissance de la décision en question dans les circonstances décrites ci-dessus suffit à faire courir le délai d’appel.
14.5. Enfin, l’Appelant s’est conformé aux règles de forme prévues par les art. R48 et R51 du Code.
Le TAS est dès lors compétent et l’appel formé par Raphaël Hamidi recevable.
B. Droit applicable
15.
Le siège du TAS se trouvant en Suisse, la question du droit applicable relève du droit suisse (lex arbitri).
L’art. 187 LDIP prévoit que “le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits (al. 1). Les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à statuer en équité (al. 2)”.
Selon l’art. R58 du Code, “la Formation statue selon les règlements applicables et, subsidiairement, selon les règles de droit choisies par les parties, ou à défaut de choix, selon le droit du pays dans lequel la fédération, association ou autre organisme sportif ayant rendu la décision attaquée a son domicile ou selon les règles de droit que la Formation estime appropriées. Dans ce dernier cas, la décision de la Formation doit être motivée”.
En l’espèce, les Parties s’accordent à dire que la cause doit être tranchée au regard de la réglementation sportive marocaine applicable et du droit marocain.
A cet égard, il convient de préciser que c’est la version du Règlement procédural de la CSRL entrée en vigueur le 14 mars 2013 qui est déterminante et non pas celle, également versée au dossier, entrée en vigueur le 1er septembre 2015, qui est sans pertinence dans la présente cause.
C. Pouvoir d’examen du TAS
16.
16.1. L’art. R57, première phrase, du Code définit comme suit le pouvoir d’examen de la Formation: “La Formation revoit les faits et le droit avec plein pouvoir d’examen. Elle peut soit rendre une nouvelle décision se substituant à la décision attaquée, soit annuler cette dernière et renvoyer la cause à l’autorité qui a statué en dernier”.
La Formation peut ainsi statuer de novo sur l’objet de la décision attaquée. Elle n’est pas limitée à un simple examen de la légalité de cette décision, mais peut rendre une nouvelle décision sur la base des dispositions réglementaires ou légales applicables (cf. MAVROMATI/REEB, The Code of the Court of Arbitration for Sport, 2015, p. 507, N 12).
Lorsqu’elle admet un appel, en tout ou partie, la Formation peut décider soit de faire usage de son pouvoir d’annuler la décision attaquée et de la remplacer par une nouvelle décision, soit de renvoyer la cause à l’autorité qui a statué.
A titre illustratif, on relèvera que le Tribunal fédéral a notamment reconnu qu’en vertu de l’art. R57 du Code, la Formation est habilitée, lorsqu’elle est saisie d’un appel contre une décision de refus d’ouverture d’une procédure disciplinaire et qu’elle juge cette décision injustifiée, de statuer elle-même sur le fond et d’infliger une sanction disciplinaire. Le fait d’opter en faveur de la solution consistant à rendre une nouvelle décision – plutôt que pour celle de renvoyer la cause à l’autorité qui a statué en dernier – est parfaitement compatible avec la nature de la procédure d’appel; c’est l’une de ses caractéristiques de ce moyen de droit que d’être une voie de réforme permettant à l’instance supérieure de statuer elle-même sur le fond. Une telle solution est également propre à favoriser une liquidation rapide des litiges, notamment en matière de dopage (TF, 4A_386/2010, du 3 janvier 2011, consid. 5.3.4).
16.2. Le pouvoir d’examen complet en fait et en droit accordé à la Formation par l’art. R57 du Code a également pour effet de permettre la réparation des éventuelles violations du droit d’être entendu ayant pu affecter la procédure antérieure (MAVROMATI/REEB, op. cit., p. 511-512).
D. Bien-fondé de la Décision attaquée
17.
17.1. Selon l’art. 35 al. 1 des Statuts de la FRMF, tels qu’adoptés le 23 mars 2014, la CCA est “compétente pour connaître, en appel, des recours formés contre les décisions prises en 1ère instance par la Commission Centrale de Discipline, par la Commission d’Ethique, par la Commission Electorale et les décisions prises par la Commission de Contrôle de Gestion que les Règlements de la FRMF ne déclarent pas définitives”. L’al. 3 de cette disposition précise que “les décisions de la [CCA] sont définitives et contraignantes pour toutes les parties intéressées sous réserve d’un recours auprès du TAS ou de la Chambre Arbitrale du Sport le cas échéant […]”. Selon son al. 4, la CCA “fonctionne et statue conformément au Code Disciplinaire, au Règlement Procédural Disciplinaire, au Code électoral, au Code d’éthique de la FRMF et ou [sic] tout autre règlement pertinent”.
L’art. 69 de ces Statuts prévoit notamment qu’en matière contractuelle “tous les litiges entre les clubs, entre les clubs et les joueurs ou les entraîneurs et relatifs au travail, à la stabilité contractuelle […] sont de la compétence de la Chambre Nationale de Résolution des Litiges (CNRL). Ses sentences sont susceptibles d’appel devant la Chambre Arbitrale du Sport lorsqu’elle sera instituée. Dans l’attente de la création de la Chambre Arbitrale du Sport, les sentences de la CNRL pourront faire l’objet d’un recours auprès du TAS”.
Cette disposition précise également que “les règles et les procédures de fonctionnement de la CNRL sont définies par un règlement particulier édicté par la FRMF conformément aux Directives de la FIFA”.
17.2. Le Règlement procédural de la CSRL fixe les règles procédurales, d’organisation et de fonctionnement de cette commission (art. 1). Il prévoit que “dans l’exercice de sa compétence juridictionnelle, la CSRL applique les statuts et règlements de la FRMF ainsi que les statuts et règlements de la FIFA. La CSRL tient également compte de tous les accords, lois, notamment en matière de droit du travail et/ou conventions collectives nationaux ainsi que de la spécificité du droit du sport”.
Selon l’art. 3 du Règlement procédural de la CSRL, “la compétence de la CSRL s’étend […] b) aux litiges relatifs au travail entre un club et un cadre sportif”.
L’art. 34 de ce Règlement prévoit que “les décisions de la CSRL peuvent faire l’objet, en dernier ressort, d’un recours auprès de la Commission Centrale d’Appel. Le délai de recours est fixé à cinq jours ouvrables à partir de la notification de la CSRL”.
17.3. Les Statuts de la FRMF mentionnés sous chiffre 17.1 ci-dessus, en vigueur au moment où la CSRL (dénommée CNRL dans ces Statuts) a statué, ne mentionnent pas la compétence de la CCA pour connaître des appels contre les décisions de la CSRL. Cette compétence est toutefois expressément instituée par l’art. 34 du Règlement procédural de la CSRL. Or, rien ne permet d’admettre que les Statuts de la FRMF contiendraient un silence qualifié qui exclurait la possibilité pour la FRMF de prévoir une voie d’appel à la CCA dans le règlement régissant le fonctionnement de la CSRL.
L’Arbitre unique considère ainsi que c’est à juste titre que la décision de la CSRL indiquait une voie d’appel à la CCA et, partant, qu’il n’était pas erroné pour l’Appelant de saisir cette autorité.
De toute manière, compte tenu de la teneur des textes applicables et de la brièveté du délai de saisine de la CCA, l’Appelant n’avait d’autre choix, pour préserver ses droits, que de suivre aux indications données par la décision rendue par la CSRL et de saisir par conséquent la CCA dans un délai de 5 jours s’il entendait contester sa décision. Procéder différemment l’aurait inutilement exposé au risque de se voir reprocher de ne pas avoir respecté le délai d’appel à la CCA, respectivement de ne pas avoir épuisé les voies de droit internes à la FRMF.
Par conséquent, l’Arbitre unique retient que c’est à bon droit que l’Appelant a saisi la CCA d’un appel contre la décision de la CSRL du 22 avril 2014.
17.4. Il convient à ce stade d’examiner si c’est à juste titre que la CCA a déclaré irrecevable cet appel.
A cet égard, le WAC soutient que l’absence de mise en cause de la FRMF comme partie intimée serait particulièrement préjudiciable à ses intérêts, dans la mesure où il serait difficile pour lui de défendre la validité de la décision de la CCA sans disposer des documents et éléments de preuve détenus par la FRMF.
Suivant sur ce point l’Appelant, l’Arbitre unique retient que la FRMF n’avait pas à être mise en cause comme partie intimée, dès lors que l’Appelant n’est pas en litige avec cette fédération.
De surcroît, le moyen du Club tombe manifestement à faux à partir du moment où la réquisition de production du dossier de la FRMF a été admise, où ce dossier a été produit et où un responsable de la FRMF ayant oeuvré dans la procédure d’appel devant la CCA a pu être entendu comme témoin lors de l’audience.
On ne voit dès lors pas ce que la participation de la FRMF comme partie intimée aurait pu apporter de plus. Le moyen de l’Intimé est donc infondé.
18.
18.1. La CCA a déclaré irrecevable l’appel formé devant elle par l’Appelant au motif que les frais d’appel avaient été versés au-delà du délai de 5 jours applicable.
Comme exposé ci-dessus, ce délai de 5 jours est institué de l’art. 34 du Règlement procédural de la CSRL.
Cette disposition ne mentionne toutefois pas le versement de frais d’appel.
18.2. Il en va différemment du Règlement procédural disciplinaire, dont l’art. 25 prévoit que “la décision de l’Organe Disciplinaire de première instance peut être frappée d’appel par lettre recommandée avec accusé de réception ou par fax adressé dans un délai maximal de cinq (5) jours francs à compter de la date de la notification du dispositif de la décision contestée. Toute demande d’appel […] doit être accompagnée, au titre du paiement des droits d’appel d’un chèque de banque ou de la copie du bordereau de versement bancaire dans le compte de la FRMF ou, le cas échéant de la Ligue nationale de football professionnel, d’un montant de [2.000 MAD] par cas de décision contestée. Si ces délais et les droits d’appel ne sont pas respectés, le recours ne sera pas valable. L’exercice du droit d’appel ne peut être subordonné au versement d’une somme d’argent […]”.
Ce règlement s’applique toutefois “en matière disciplinaire en vue de sanctionner une ou plusieurs infractions ou une plusieurs infractions prévues et réprimées dans les termes du Code Disciplinaire de la FRMF et plus généralement de tout manquement ou violation de la règlementation de la FRMF” (art. 1 al. 1) et prévoit que “les sanctions susceptibles d’être prises par les organes disciplinaires sont celles visées au Code Disciplinaire et déterminées en fonction de l’infraction considérée” (art. 2).
Il ne constituait donc pas une base règlementaire à la perception de frais d’appel dans le cas d’un contentieux de nature contractuelle comme celui de la présente espèce.
18.3. L’Intimé fait valoir que ce règlement serait néanmoins applicable en l’espèce par renvoi de l’art. 35 al. 4 des Statuts.
Tel n’est pas le cas. Cette disposition prévoit en effet que “[…] la [CCA] fonctionne et statue conformément au Code Disciplinaire, au Règlement Procédural Disciplinaire, au Code électoral, au Code d’éthique de la FRMF et tout autre règlement pertinent”.
Dans le cas d’espèce, qui comme déjà exposé ne porte pas sur un contentieux disciplinaire, le règlement pertinent est le Règlement de procédure de la CSRL, qui régit le fonctionnement de la CSLR lorsqu’elle est appelée à trancher un litige contractuel entre un club et un cadre sportif (art. 35 al. 4 in fine des Statuts cum art. 3 let. b) dudit règlement).
Or, comme déjà exposé, le Règlement procédural de la CSRL ne contient pas à son art. 34 la même exigence d’avance de frais que celle valable en matière disciplinaire.
Par conséquent, la CCA ne pouvait pas déclarer irrecevable l’appel formé devant elle par l’Appelant au motif que les frais d’appel de 2.000 MAD n’avaient pas été versés, respectivement pas versés dans le délai d’appel de 5 jours.
Cette décision est ainsi dénuée de fondement réglementaire et, partant, infondée.
18.4. L’Arbitre unique relève que l’on arriverait au même résultat - à savoir que la CCA n’était pas fondée à déclarer l’appel irrecevable en raison d’un prétendu règlement tardif des frais – dans l’hypothèse où, contrairement à ce qui est retenu ci-dessus, on considérait que la CCA était en droit de demander à l’Appelant de s’acquitter d’un montant de 2.000 MAD pour voir traiter son appel.
En effet, l’organe juridictionnel qui prévoit la possibilité de régler les frais de procédure par un versement bancaire, mais ne rend pas aisément accessible les coordonnées bancaires permettant à la partie instante d’opérer ledit versement, ne peut pas ensuite déclarer l’acte de procédure irrecevable au motif que le règlement des frais n’est pas intervenu dans un délai aussi court qu’un délai de 5 jours. Admettre le contraire contreviendrait manifestement au principe général de procédure qui prohibe le formalisme excessif.
De surcroît, l’Arbitre unique constate que la manière de procéder de la CCA est en contradiction avec le contenu de la Décision attaquée. En effet, la communication par courriel de ses coordonnées bancaires, en réponse au courrier accompagnant l’appel déposé le 28 avril 2014, démontre au contraire que la CCA ne considérait pas, à ce moment-là, que l’appel était irrecevable faute d’avance de frais dans les 5 jours pour former appel.
Cette appréciation est confirmée, si besoin était, par le fait que la CCA a convoqué l’Appelant à une audience du 8 juillet 2015, ce qui apparaît illogique - et contraire à l’expérience du règlement des litiges - si cette commission avait véritablement considéré qu’elle était en présence d’un motif de non-entrée en matière; une simple décision d’irrecevabilité sans fixation d’une audience (dénuée de tout objet) aurait alors suffi.
La Décision attaquée est donc également infondée pour ces différents motifs.
18.5. En conclusion des développements qui précèdent, c’est à tort que la CCA a déclaré l’appel formé le 28 avril 2014 irrecevable et sa décision doit être annulée.
Conformément à l’art. R57 du Code, il appartient à l’Arbitre unique d’opter entre la reddition d’une sentence sur le fond et un renvoi de la cause à la CCA.
Dans le cas d’espèce, l’Arbitre unique ne discerne pas de motifs commandant de renvoyer la cause à la CCA plutôt de statuer sur le fond, à propos duquel les Parties ont été amplement à même de se prononcer dans le cadre de la présente procédure, y compris en ce qui concerne les dispositions de droit marocain dont elles se prévalent à l’appui de certains de leurs moyens.
Sans que cet élément ne soit en lui-même décisif, l’on doit aussi prendre en considération le fait que l’examen du fond par le TAS répond à un objectif de célérité de la procédure, s’agissant d’un litige portant sur des prétentions fondées sur un contrat de travail résilié il y a plus de 3 ans.
La conclusion de l’Intimé tendant au renvoi de la cause à la CCA doit ainsi être rejetée.
E. Bien-fondé de la décision de la CSRL et des prétentions de l’Appelant envers l’Intimé
19.
Le contrat de travail liant les Parties a été résilié par l’Intimé avec effet au 30 juin 2012, au motif que l’Appelant s’est trouvé dans la situation, prévue contractuellement, de radiation du corps des entraîneurs.
Il n’est toutefois nullement établi que l’Appelant aurait été radié du corps des entraîneurs.
Il résulte uniquement de l’instruction que l’OPI a considéré, dans le cadre du processus d’octroi au WAC de sa licence pour la saison subséquente, que la documentation dont il disposait en ce qui concerne l’Appelant n’était pas suffisante.
D’une part parce qu’il y avait une différence de prénoms, qui créait un doute au sujet de la titularité du diplôme. Or, il eût toutefois suffi, pour lever définitivement cette incertitude, que l’Appelant soit admis à produire un document officiel comportant ses deux prénoms.
D’autre part parce que le diplôme en mains de l’OPI n’était pas suffisamment précis s’agissant du niveau de qualification (A, B, etc.) de son titulaire. Dès lors que l’Appelant s’était vu remettre par la Fédération Française de Football, par courrier du 24 avril 2012, la licence UEFA A indiquant qu’il s’agit de “l’équivalence européenne de [son] D.E.F (Diplôme d’Entraîneur de Football) obtenu le 06/01/2004”, l’Arbitre unique retient que cette incertitude aurait également pu être aisément levée. Le contraire, du moins, n’est pas démontré.
Il n’est ainsi nullement établi que le diplôme dont disposait l’Appelant à l’époque des faits n’était pas susceptible d’être reconnu par l’OPI, ni qu’il aurait incombé à l’Appelant de contester la prise de position de l’OPI pour que les éléments à même de clarifier sa situation soient portés à la connaissance de cet organisme.
Rien ne permet par conséquent non plus de retenir que l’Appelant n’était pas en mesure d’effectuer son travail en vertu du contrat conclu avec l’Intimé.
L’Arbitre unique retient ainsi que c’est à tort que l’Intimé invoque l’art. 5 du contrat pour justifier le licenciement de l’Appelant.
Aucun autre motif de rupture de la relation contractuelle n’étant au surplus réalisé, ce licenciement est injustifié.
20.
20.1. A l’art. 5 du contrat, les Parties ont réglé les conséquences d’une résiliation “pour quelques motifs que ce soit”, en prévoyant que l’intégralité des sommes dues jusqu’au terme du contrat (30 juin 2014) seraient payées en totalité dans un délai de 15 jours par la partie qui souhaite mettre un terme au contrat.
Cette disposition donne incontestablement le droit à l’Appelant de réclamer à l’Intimé les salaires afférents à cette période.
S’y ajoute le salaire du mois de juin 2012, dont il n’est pas allégué ni établi qu’il aurait été versé et qui est dû en vertu de l’art. 4 du contrat, clause qui régit le paiement du salaire tant que le contrat est en vigueur.
L’Appelant est donc en droit de réclamer à l’Intimé le paiement de 1.212.500 MAD (25 x 48.500 MAD).
20.2. L’Appelant réclame en sus de l’Intimé le versement:
(a) d’un montant de 99.000 MAD au titre des avantages en nature dus, savoir:
- voiture et carburant: env. 2.000 MAD par mois
- téléphone: 1.000 MAD par mois
- 8 aller-retour en avion Paris/Casablanca: env. 3.000 x 8 = 24.000 MAD;
(b) d’un montant de 500.000 MAD au titre de la réparation d’un préjudice de carrière. Il allègue avoir été privé, par les manquements de l’Intimé, de toute activité professionnelle et du challenge sportif en découlant. Ce challenge sportif était intéressant puisqu’il s’inscrivait dans une continuité instaurée depuis 2010 et que les deux dernières années de son contrat devaient lui permettre de récolter les fruits du travail acharné effectué depuis sa prise de poste. Privé de cette continuité, il l’est aussi de la reconnaissance en découlant et de la légitimité à laquelle il aurait pu s’attendre compte tenu de la qualité du travail effectué. Expulsé du club du jour au lendemain, son image et sa légitimité sont sérieusement entachées et rendent difficiles toute recherche d’emploi;
(c) d’un montant de 200.000 MAD à titre réparation d’un préjudice moral qu’il soutient avoir subi. Il fait valoir que la rupture du contrat de travail est intervenue de manière extrêmement brusque (cessation du versement de son salaire pendant trois mois; retrait de son véhicule; interdiction de se rendre sur son lieu de travail; embauche de son remplaçant avant même de l’informer de la rupture du contrat). Il ajoute que ces mesures n’ont pas été portées à sa connaissance par un responsable du Club mais par un concierge.
20.3. Les “avantages en nature” auxquels se réfère à l’Appelant constituent en réalité des remboursements de frais effectifs (véhicule, téléphone) liés à l’exécution du contrat de travail.
A partir du moment où l’Appelant a cessé son activité au service de l’Intimé, il n’avait plus à les assumer et il ne peut dès lors rien réclamer à ce titre.
Il en va de même en ce qui concerne les déplacements en avion qui étaient liés à son éloignement de Paris dû à l’exécution du contrat de travail.
Au demeurant, aucune pièce ne vient établir le prix des billets d’avion entre Paris et Casablanca, ni celui des frais de véhicule.
Cette prétention doit dès lors être rejetée.
20.4. L’Appelant n’apporte aucun élément de preuve de nature à établir le bien-fondé de sa prétention relative au préjudice de carrière, qui n’est ainsi prouvé ni dans son principe ni dans son quantum.
La conclusion y relative s’avère dès lors mal fondée.
20.5. Si l’on peut concéder à l’Appelant que l’Intimé a manqué de délicatesse dans la manière dont il a mis fin au contrat de travail, l’Arbitre unique ne considère pas que l’on se trouverait en l’espèce dans un cas d’atteinte illicite à la personnalité de l’Appelant ou en présence d’une atteinte dont la gravité objective et subjective engendrait un droit en faveur de l’Appelant à être indemnisé par l’Intimé; il n’est - en particulier - pas établi que l’Appelant aurait concrètement subi une souffrance ou une perturbation psychique.
La prétention de l’Appelant en réparation d’un préjudice moral doit ainsi être rejetée.
20.6. L’Appelant réclame à l’Intimé d’un montant de 200.000 MAD à titre de frais de défense, par quoi il vise ses frais de conseils, d’avocats, d’huissiers de justice, afférents à la procédure ouverte contre la FRMF afin de la contraindre à lui faire connaître l’état d’avance de son dossier. Il conclut également au paiement des frais de procédure de 2.000 MAD exigés par la CCA.
Le dossier ne comporte toutefois pas suffisamment d’éléments probants pour que ces prétentions lui soient allouées, hormis en ce qui concerne la somme de 2.000 MAD, dont il est établi qu’elle a été versée dans le cadre de la procédure devant la FRMF. Il s’avère toutefois que cette somme n’était pas due réglementairement et l’on ne saurait dès lors astreindre l’Intimé – qui n’a pas à répondre envers l’Appelant des frais potentiellement erronés réclamés par les organes de la FRMF - à la rembourser à l’Appelant.
Cette conclusion doit ainsi être rejetée.
20.7. En définitive, l’Intimé doit être astreint à verser à l’Appelant la somme de 1.212.500 MAD.
L’Appelant a conclu à ce que cette somme soit assortie d’un intérêt moratoire de 5% l’an dès de la date de rupture du contrat, soit dès le 30 juin 2012.
L’art. 32 du Règlement procédural de la CSRL prévoit qu’“en cas de retard de paiement des dus, une majoration de retard est imposée comme suit: pour les salaires mensuels, une majoration de 10% pour chaque mois de retard à partir du deuxième mois; pour les autres dus, une majoration de 1% par mois de retard, après notification de la décision définitive, avec un maximum de 5% par an”.
Il est par conséquent conforme à cette disposition d’octroyer à l’Appelant un taux d’intérêt moratoire de 5% l’an dès la date de résiliation du contrat de travail.
Il apparaît également approprié – au sens de l’art. R58 in fine du Code – d’appliquer la règle générale de droit suisse, souvent appliquée par le TAS à défaut de circonstances particulières, que consacre l’art. 104 al. 1 du Code des obligations et qui fixe le taux d’intérêt moratoire à 5% l’an. L’Intimé n’a au demeurant pas tenté de démontrer que ce taux ne devrait pas être appliqué dans le cas d’espèce.
La conclusion de l’Appelant prise en ce sens doit ainsi être admise.
Compte tenu du sort de la cause, la dernière conclusion du mémoire d’appel (qui porte également sur l’allocation d’un taux d’intérêt moratoire à 5% l’an) apparaît sans objet, respectivement sans fondement, et doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal Arbitral du Sport:
1. Admet partiellement l’appel déposé par Raphaël Hamidi le 13 janvier 2017.
2. Annule la décision rendue par la Commission Centrale d’Appel de la Fédération Royale Marocaine de Football le 8 juillet 2015.
3. Annule la décision rendue par la Commission Spéciale de Règlement des Litiges de la Fédération Royale Marocaine de Football le 22 avril 2014.
4. Ordonne le versement par Wydad Athletic Club à Raphaël Hamidi de la somme de 1.212.500 MAD avec intérêt à 5% l’an dès le 30 juin 2012.
5. (…).
6. (…).
7. Rejette toutes autres ou plus amples conclusions des Parties, dans la mesure de leur recevabilité.
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