F.I.F.A. – Players’ Status Committee / Commissione per lo Status dei Calciatori – coach disputes / controversie allenatori (2019-2020) – fifa.com – atto non ufficiale – Decision 25 mai 2020

Décision du juge unique de la
Commission du Statut du Joueur
le 25 mai 2020
concernant un litige contractuel relatif à l'entraineur Faouzi Benzarti
PAR:
Roy Vermeer (Pays-Bas), Juge unique de la Commission du Statut du Joueur
DEMANDEUR / DÉFENDEUR RECONVENTIONNEL:
Faouzi Benzarti, Tunisie
Représenté par M. Ali Abbes
DÉFENDEUR / DEMANDEUR RECONVENTIONNEL:
Wydad Athlétique Club, Maroc
I. FAITS
1. Le 19 novembre 2018, l’entraîneur tunisien, M. Faouzi Benzarti (ci-après : l’entraîneur ou le demandeur/défendeur-reconventionnel) et le club marocain, Wydad Athlétique Club (ci-après : le club ou le défendeur/demandeur-reconventionnel) ont conclu un « avenant au contrat de travail » (ci-après : le contrat) valide à compter de la date de signature pour une durée de deux saisons, i.e. 2018/2019 et 2019/2020.
2. L’article 4 du contrat prévoyait la rémunération suivante :
i. Pour la saison 2018/2019 :
- Une prime de signature de 600,000 MAD payable en deux tranches égales de 300,000 MAD le 1 Janvier 2019 et le 30 avril 2019 ;
- Un salaire mensuel net de 250,000 MAD ;
- Un bonus de 10,000 MAD en cas de victoire du championnat national ;
- Un bonus de 20,000 MAD en cas de victoire de la Ligue des champions de la CAF.
ii. Pour la saison 2019/2020 :
- Une prime de signature de 1,000,000 MAD payable en deux tranches égales de 500,000 MAD en septembre 2019 et en avril 2020 ;
- Un salaire mensuel net de 250,000 MAD ;
- Un bonus de 10,000 MAD en cas de victoire du championnat national ;
- Un bonus de 20,000 MAD en cas de victoire de la Ligue des champions de la CAF.
iii. De plus, durant les deux saisons, l’entraîneur avait droit aux bénéfices suivants :
- Un bonus de 1,000,000 MAD net si l’équipe gagne le championnat national ;
- Un bonus de 500,000 MAD net si l’équipe est vice-championne ;
- Un bonus de 800,000 MAD net si l’équipe gagne la Coupe du Trône ;
- Un bonus de 2,000,000 MAD net si l’équipe gagne la Ligue des champions de la CAF ;
- Un bonus de 500,000 MAD net si l’équipe arrive en demi-finale de la Ligue des champions de la CAF ;
- Un véhicule 4x4 de 2018 ;
- 3 billets d’avion aller-retour en classe affaire Casablanca-Tunis-Casablanca ;
- Une villa de haut standing avec un ameublement de qualité.
3. De plus, l’article 5 du contrat prévoyait que chaque partie au contrat était en mesure de résilier le contrat dans les conditions suivantes :
- Si l’entraîneur souhaite mettre fin au contrat : il devra payer 4 mois de salaire au club.
- Si le club souhaite résilier le contrat : il devra payer 2 mois de salaire à l’entraîneur.
4. Par ailleurs, l’article 7 du contrat stipulait que : « Tout litige devra être réglé à l’amiable entre les deux parties, ou, à défaut, être soumis à l’arbitrage de FRMF et TAS (Lausanne) ».
5. Le 27 janvier 2020, l’entraîneur a rappelé au club que le contrat avait été résilié d'un commun accord à la fin de la saison 2018/2019 et a accordé à ce dernier 10 jours pour payer le montant restant dû de 2.050.000 MAD, correspondant au salaire de juin 2019, à la deuxième tranche de la prime de signature due le 30 avril 2019, aux bonus pour la victoire du championnat national et pour avoir atteint la demi-finale de la Ligue des champions de la CAF.
6. Le 7 février 2020, l’entraîneur a introduit une requête auprès de la FIFA et a demandé le paiement de la somme de 2,050,000 MAD, ventilée comme suit :
- 250,000 MAD au titre du salaire de Juin 2019, plus un intérêt de 5% par année à compter du 1ier juillet 2019 ;
- 300,000 MAD au titre de la seconde tranche de la prime de signature due le 30 avril 2019, plus un intérêt de 5% par année à compter du 1ier mai 2019 ;
- 1,000,000 MAD au titre de bonus pour la victoire du championnat national, plus un intérêt de 5% par année à compter du 27 janvier 2020 ;
- 500,000 MAD au titre de bonus pour avoir atteint la demi-finale de la Ligue des champions de la CAF, plus un intérêt de 5% par année à compter du 27 janvier 2020.
7. De plus, l’entraîneur a également requis l'imposition au club d'une interdiction de transfert pendant deux périodes d'enregistrement en vertu de l'art. 12bis du Règlement.
8. Selon l’entraîneur, les parties ont mutuellement résilié le contrat à la fin de la saison 2018/2019, à la demande du club. Selon l’entraîneur, la résiliation était implicite, car il n'y avait pas de confirmation écrite.
9. De plus, l’entraîneur a également soutenu que le club devait payer les salaires impayés ainsi que les bonus pour avoir remporté le championnat national et atteint la demi-finale de la Ligue des champions de la CAF.
10. Dans sa réponse à la requête de l’entraîneur, le club a tout d’abord contesté la compétence de la FIFA et a fait référence à l’article 7 du contrat en soutenant à cet égard que, conformément à la clause susmentionnée, la Chambre nationale de résolution des litiges marocaine serait compétente en l'espèce. Cela, conformément à l'article. 71.2 des statuts de la Fédération Royale Marocaine de Football FRMF qui stipule que les litiges liés à la stabilité contractuelle concernent l'examen de la Chambre nationale de résolutions des litiges et à l'article 230 du code des obligations et contrats au Maroc qui stipule que « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui tes ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi ».
11. De plus et quant au fond, le club s’est référé au principe de bonne foi reconnu en droit national et par la FIFA et a soutenu qu'aucun accord de résiliation mutuelle n'avait implicitement eu lieu comme expliqué par l’entraîneur. À cet égard, le club a soutenu qu'à la fin de la saison 2018/2019, l’entraîneur n'est pas revenu au club pour préparer la saison suivante, prétextant qu'il était en vacances.
12. Par ailleurs, le club a expliqué qu'il a été informé le 5 juillet 2019 de la signature de l’entraîneur avec le club tunisien, l'Etoile Sportive du Sahel et, par conséquent, a répondu le 10 février 2020 à la mise en demeure de l’entraîneur du 27 janvier 2020 en rejetant ses demandes et en l'informant de sa volonté de déposer une réclamation devant la FRMF.
13. Ainsi, le club a soutenu que l’entraîneur n'avait pas respecté la clause de résiliation contenue dans l'article 5 du contrat et, en outre, qu’il a signé un contrat de travail avec un autre club alors qu'il était toujours lié contractuellement au club. En conséquence, le club a rejeté les demandes financières de l’entraîneur et a introduit une requête reconventionnelle à son encontre pour rupture de contrat demandant une compensation d’un montant de 1,000,000 MAD conformément à l'at. 5 du contrat, soit 4 salaires mensuels, ainsi que 1,500,000 MAD au titre de dommages et intérêts, plus 5% d'intérêts p.a. sur ces deux montants à compter du 1er juillet 2019. Enfin, le club a également demandé que les frais de procédure soient à la charge de l’entraîneur et que des sanctions sportives soient appliquées.
14. En réponse à la demande reconventionnelle introduite à son encontre par le club, l’entraîneur a tout d’abord soutenu que ce dernier n’avait pas fourni de preuves démontrant que la Chambre nationale de résolution des litiges marocaine remplissait les critères de la FIFA concernant le tribunal national arbitral indépendant conformément aux circulaires 1010 de la FIFA du 20 décembre 2005 et du 28 décembre 2007. En conséquence, l’entraîneur a estimé que la FIFA était compétente.
15. De plus, l’entraîneur a expliqué que le club l'aurait informé qu'il ne compterait pas sur ses services pour les années 2019-2020 et qu'il lui paierait ses arriérés correspondant à près de 50% de la valeur du contrat, raison pour laquelle l’entraîneur n'aurait, à son avis, pas correctement résilié le contrat, avec juste cause, ce qui prouverait sa bonne foi. De plus, l’entraîneur a soutenu que le club n'a jamais contesté les faits susmentionnés jusqu’à réception de la mise en demeure de l’entraîneur, c'est-à-dire que le club n'a réagi qu’en février 2020, à savoir 8 mois après (aucune contestation de juillet 2019 à février 2020).
16. En outre, l’entraîneur a soutenu qu'aucune preuve des prétendus dommages subis par le club n'avait été fournie et, de plus, que le club avait engagé un nouvel entraîneur le 17 juillet 2020 sans avoir demandé ou réclamé quoi que ce soit à son ancien entraîneur.
17. Par ailleurs, l’entraîneur a rejeté le montant réclamé par le club sur la base de la clause de résiliation du contrat. A cet égard, l’entraîneur a estimé que ladite clause était disproportionnée et non équilibrée et a fait référence à la seule application possible de la clause de résiliation contenue dans le contrat initial signé entre les parties qui pourrait en théorie être considérée comme valable, document qui n’était pas à la base de la présente requête.
18. Enfin, l’entraîneur a précisé avoir signé un contrat de travail avec le club tunisien, Etoile Sportive du Sahel, le 8 juillet 2019, mutuellement résilié le 26 septembre 2019 et dont la valeur totale était de 1,400,000 Dinars Tunisiens (env. 4,699,440 MAD).
II. CONSIDERANTS DU JUGE UNIQUE DE LA COMMISSION DU STATUT DU JOUEUR
1. En premier lieu, le juge unique de la Commission du Statut du Joueur (ci-après également : le juge unique) a analysé s’il était compétent pour traiter le présent litige. À cet égard, il s’est référé à l’article 21 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges (édition 2019). Le présent litige ayant été soumis à la FIFA le 7 février 2020, le juge unique a par conséquent conclu que l’édition 2019 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après : les Règles de Procédure) est applicable au présent litige.
2. Par la suite, sur la base de l’article 3 alinéa 1 et 2 dudit Règlement en conjonction avec les articles 23 alinéa 1 et 3 et 22 lit. c) du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (édition mars 2020), le juge unique a conclu qu’il relève de sa compétence d’examiner le cas présent, puisqu’il s’agit d’un litige entre un entraîneur tunisien et un club marocain.
3. A titre préliminaire, le juge unique a pris note du fait que, dans sa réponse, le club a contesté la compétence de la FIFA pour juger de la présente affaire en se fondant sur l’art. 7 du contrat, alléguant à cet égard que, conformément à la clause susmentionnée, la Chambre nationale de résolution des litiges marocaine serait compétente en l'espèce, conformément à l'article. 71.2 des statuts de la Fédération Royale Marocaine de Football FRMF et à l'article 230 du code des obligations et contrats au Maroc. De plus, le juge unique a également pris note des arguments soulevés par l’entraîneur tendant à soutenir que la FIFA était bien compétente pour se prononcer sur le fond de la présente affaire.
4. Compte tenu de ce qui précède, le juge unique a d’abord souligné que, conformément à l'art. 22 lit. c) du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs, il était compétent pour connaître d'une telle affaire, à moins qu’un tribunal arbitral indépendant garantissant une procédure équitable existe au niveau national.
5. Revenant à la question relative à la compétence du juge unique pour se prononcer sur la présente affaire, celui-ci a tout d’abord considéré essentiel de vérifier si le contrat de travail conclu entre les parties au litige contenait effectivement une clause de juridiction, attribuant à un organe spécifique la compétence exclusive pour trancher le présent litige.
6. Dans ce contexte, le juge unique s’est référé à l’art. 7 du contrat sur le fondement duquel le club conteste la compétence de la FIFA, et lequel stipule ce qui suit :
« Tout litige devra être réglé à l’amiable entre les deux parties, ou, à défaut, être soumis à l’arbitrage de FRMF et TAS (Lausanne) ».
7. Cela étant dit, le juge unique a premièrement souligné que l’art. 7 ne semblait pas attribuer de façon exclusive la compétence à un organe puisque cette clause mentionne aussi bien un arbitrage au sein de la FRMF que le TAS. Dans un second temps, le juge unique a mis en avant que le club ne précisait pas à quelle procédure arbitrale il faisait exactement référence en estimant que la Chambre nationale de résolution des litiges marocaine serait compétente en l'espèce. Par ailleurs, le juge unique a également noté que le club avait soumis une documentation incomplète relative à ladite procédure arbitrale, à savoir, qu’en sus des arguments développés au point I./10. ci-dessus, il s’était limité à fournir des extraits des Status de la FRMF, du code des obligations et contrats au Maroc et du Règlement de la Chambre nationale de résolution des litiges marocaine.
8. De ce fait, le juge unique a conclu qu’en l’absence d’indications claires et complètes quant aux règles de procédure applicables à la procédure arbitrale invoquée, il n’était pas possible d’établir si le tribunal arbitral concerné est indépendant et régulièrement constitué au niveau national.
9. De plus, le juge unique a également pris note que le club, tout en contestant la compétence de la FIFA, avait dans le même temps déposé une requête reconventionnelle contre l’entraîneur devant la FIFA. Par conséquent, le juge unique a considéré que par sa démarche de déposer une requête reconventionnelle devant elle, le club avait par cet acte consenti à la compétence de la FIFA.
10. Par conséquent, l’argumentation du club ne pouvait être suivie sur ce point et, de ce fait, le juge unique s’est déclaré compétent pour juger du présent litige. Ainsi, la demande de l’entraîneur est admissible.
11. Par la suite, le juge unique a analysé quelle édition du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs devrait être appliquée quant au droit matériel. À cet égard, le juge unique s’est référé, d’une part, à l’article 26 alinéa 1 et 2 du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (édition mars 2020) et, d’autre part, au fait que la plainte a été déposée auprès de la FIFA le 7 février 2020. Au vu de ce qui précède, le juge unique a conclu que l’édition de janvier 2020 du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (ci-après : le Règlement) est applicable au présent litige quant au droit matériel.
12. Une fois sa compétence et la réglementation applicable établies, le juge unique a statué sur le fond de l’affaire. Ce faisant, il a commencé par reconnaître les faits mentionnés ci-dessus ainsi que la documentation contenue dans le dossier. Toutefois, le juge unique a souligné que dans les considérants qui suivent, il ne se référerait qu’aux faits, arguments et documents pertinents pour l’analyse de la présente affaire.
13. En premier lieu, le juge unique a rappelé que les parties ont conclu le 18 novembre 2018 un « avenant au contrat de travail » valable pour les saisons 2018/2019 et 2019/2020 en vertu duquel l’entraîneur était en droit de percevoir les salaires et bénéfices tels que détaillées à l’article 4 du contrat (v. point I./2. ci-dessus), à savoir :
« i. Pour la saison 2018/2019 :
- Une prime de signature de 600,000 MAD payable en deux tranches égales de 300,000 MAD le 1 Janvier 2019 et le 30 avril 2019 ;
- Un salaire mensuel net de 250,000 MAD ;
- Un bonus de 10,000 MAD en cas de victoire du championnat national ;
- Un bonus de 20,000 MAD en cas de victoire de la Ligue des champions de la CAF.
ii. Pour la saison 2019/2020 :
- Une prime de signature de 1,000,000 MAD payable en deux tranches égales de 500,000 MAD en septembre 2019 et en avril 2020 ;
- Un salaire mensuel net de 250,000 MAD ;
- Un bonus de 10,000 MAD en cas de victoire du championnat national ;
- Un bonus de 20,000 MAD en cas de victoire de la Ligue des champions de la CAF.
iii. De plus, durant les deux saisons, l’entraîneur avait droit aux bénéfices suivants :
- Un bonus de 1,000,000 MAD net si l’équipe gagne le championnat national ;
- Un bonus de 500,000 MAD net si l’équipe est vice-championne ;
- Un bonus de 800,000 MAD net si l’équipe gagne la Coupe du Trône ;
- Un bonus de 2,000,000 MAD net si l’équipe gagne la Ligue des champions de la CAF ;
- Un bonus de 500,000 MAD net si l’équipe arrive en demi-finale de la Ligue des champions de la CAF ;
- Un véhicule 4x4 de 2018 ;
- 3 billets d’avion aller-retour en classe affaire Casablanca-Tunis-Casablanca ;
- Une villa de haut standing avec un ameublement de qualité. »
14. Le juge unique a également noté que chaque partie au contrat était en mesure de résilier le contrat dans les conditions suivantes : contre un paiement de 4 mois de salaire si l’entraîneur souhaitait y mettre fin ; contre un paiement de deux mois de salaires si le club souhaitait y mettre fin.
15. Par ailleurs, le juge unique a observé qu’en date du 7 février 2020, l’entraîneur a déposé une plainte à l’encontre du club devant la FIFA affirmant que celui-ci lui était redevable d’arriérés de paiement correspondant à la somme totale de 2,050,000 MAD, à savoir: 250,000 MAD au titre du salaire de Juin 2019, 300,000 MAD au titre de la seconde tranche de la prime de signature due le 30 avril 2019, 1,000,000 MAD au titre de bonus pour la victoire du championnat national, et 500,000 MAD au titre de bonus pour avoir atteint la demi-finale de la Ligue des champions de la CAF. A ce stade, le juge unique a pris note des éléments de preuve apportés par l’entraîneur quant aux objectifs sportifs dûment remplis et donnant de ce fait droit aux bonus ci-dessus évoqués.
16. De plus, le juge unique a souligné que selon l’entraîneur, les parties avaient, à la demande du club, mutuellement résilié le contrat à la fin de la saison 2018/2019 et ce de manière implicite, à savoir sans formalisation écrite. De ce fait, malgré une mise en demeure adressée au club le 27 janvier 2020, l’entraîneur n’ayant pas été payé des arriérés de paiement réclamés dans le présente, le juge unique en a conclu que la requête de ce dernier était limitée aux seuls arriérés de paiement ci-dessus évoqués, majorés des intérêts pertinents.
17. Le juge unique a par la suite pris note des arguments du club, lequel affirmait qu'aucun accord de résiliation mutuelle n'avait implicitement eu lieu comme le soutenait l’entraîneur, ce dernier prétendant être en vacances à la fin de la saison 2018/2019 et donc n’étant par conséquent pas revenu au club.
18. En outre, le juge unique a également observé que selon le club, l’entraîneur se serait engagé le 5 juillet 2019 avec le club tunisien, l'Etoile Sportive du Sahel et, par conséquent, qu’il aurait répondu à la mise en demeure de l’entraîneur en date du 27 janvier 2020 en rejetant ses demandes et en l'informant de sa volonté de déposer une réclamation devant la FRMF. A ce point, le juge unique a observé les extraits de presse et une lettre datée du 10 février 2020 versés au dossier par le club.
19. Par après, le juge unique a pris note de la requête reconventionnelle introduite par l’entraîneur à l’encontre du club par laquelle il réclamait, entre autres, une compensation pour rupture de contrat d'un montant de 1,000,000 MAD conformément à l'at. 5 du contrat, soit 4 salaires mensuels, ainsi que 1,500,000 MAD au titre de dommages et intérêts, plus 5% d'intérêts p.a. sur ces deux montants à compter du 1er juillet 2019.
20. Enfin, le juge unique a pris note des commentaires de l’entraîneur quant à la requête reconventionnelle, ce dernier ayant notamment réaffirmé la résiliation implicite du contrat entre les parties, faute de quoi il aurait résilié le contrat avec juste cause. De plus, le juge unique a retenu que l’entraîneur avait rejeté l’application de la clause de résiliation du contrat de l’article 5 tout en soulignant le délai considérable avec lequel le club avait contesté cette résiliation implicite. Enfin, le juge unique a également observé que l’entraîneur contestait les dommages prétendument subis par le club en considération du nouvel entraîneur que ce dernier aurait embauché le 17 juillet 2019 selon l’information publiée sur le réseau social du club.
21. Au vu des allégations et arguments présentés par chacune des parties, le juge unique a considéré qu’en l’espèce, il convenait d’établir dans un premier temps si une résiliation unilatérale du contrat par l’entraîneur avait eu lieu et, auquel cas, si elle était fondée ou non sur une juste cause.
22. A ce stade, le juge unique a souhaité rappeler aux parties le principe de la charge de la preuve, tel qu’établi par l’art. 12 par. 3 des Règles de procédure, selon lequel la charge de la preuve incombe à la partie qui invoque un droit découlant d’un fait qu’elle allègue.
23. Par conséquent, le juge unique a tout d’abord observé qu’aucune des parties n’avait apporté d’élément de preuve quant à une résiliation du contrat formellement opérée par l’une ou l’autre partie.
24. En outre, sur la base des éléments apportés par les parties, le juge unique a rappelé que d’une part, l’entraîneur se serait engagé avec son nouveau club le 5 ou le 8 juillet 2019, et que d’autre part, le club aurait quant à lui embauché un nouvel entraîneur autour du 17 juillet 2019.
25. Par ailleurs, le juge unique a noté qu’aucune des deux parties n’a manifesté de doléances à l’encontre de l’autre à compter de la fin de la saisons sportive 2018/2019 jusqu’à la mise en demeure de l’entraîneur en date du 27 janvier 2020 et la réponse du club à celle-ci en date du 10 février 2020.
26. Enfin, le juge unique a rappelé que la présente requête initiée par l’entraîneur est exclusivement fondée sur des arriérés de paiement et non sur une rupture de contrat avec juste cause tel que reconnu par ce dernier.
27. Ainsi, tenant compte de tout ce qui précède, le juge unique a estimé que les parties ont fait preuve d’un manque d’intérêt mutuel manifeste, l’une à l’encontre de l‘autre, dès la fin de la saison 2018/2019 et que, par conséquent, le contrat avait été mutuellement résilié par ces mêmes parties, de manière implicite, dès la fin de la saison 2018/2019.
28. A ce égard, le juge unique est arrivé à la conclusion que l’entraîneur n’avait pas résilié le contrat le liant au clubet que, par conséquent, l’entraîneurne pouvait être tenu pour responsable de ladite résiliation.
29. Dès lors, le juge unique a décidé que la demande reconventionnelle du club est rejetée.
30. Par la suite, le juge unique a poursuivi ses délibérations en établissant que le club devait s’acquitter de ses obligations contractuelles, conformément au principe juridique général de pacta sunt servanda.
31. Dans ce contexte, le juge unique a tenu à rappeler qu’en application de l’art. 4 du contrat, l’entraîneur était, inter alia, en droit de recevoir : 250,000 MAD au titre du salaire de Juin 2019, 300,000 MAD au titre de la seconde tranche de la prime de signature due le 30 avril 2019, 1,000,000 MAD au titre de bonus pour la victoire du championnat national, et 500,000 MAD au titre de bonus pour avoir atteint la demi-finale de la Ligue des champions de la CAF.
32. Sur ce point, le juge unique a jugé opportun de rappeler le principe de base de la charge de la preuve, tel que stipulé à l'art. 12 par. 3 des Règles de procédure, selon lequel la partie qui fait valoir un droit sur la base d'un fait allégué supporte la charge de la preuve correspondante.
33. A ce sujet, le juge unique a tout d’abord fait référence à ses considérations antérieures et a souligné qu’il était établi et non contesté par le club, sur la base des éléments de preuve apportés par l’entraîneur, que ce dernier était en droit de percevoir ces sommes.
34. Or, le juge unique a ensuite constaté que le club n’avait apporté aucune preuve de paiement quant aux sommes ci-dessus évoquées.
35. Par conséquent, le juge unique est arrivé à la conclusion que l’entraîneur, au contraire du club, avait pleinement étayé sa position par des preuves documentaires pertinentes conformément à l’art. 12 al. 3 des Règles de procédure.
36. Au vu de ce qui précède, et en vertu du principe juridique « pacta sunt servanda », lequel dispose que les conventions entre parties doivent être respectées, le juge unique a décidé que le club était redevable du paiement de la somme totale de 2,050,000 MAD à titre d’arriérés de rémunération, majorée d’un intérêt de 5% par année et jusqu’à parfait paiement, dû à compter de la date de paiement respective.
37. Le juge unique de la Commission du Statut du Joueur s’est ensuite référé à l’article 25 al. 2 du Règlement ainsi qu’à l’article 18 al. 1 des Règles de Procédure, selon lesquels les frais de procédure devant la Commission du Statut du Joueur ou le juge unique seront fixés au maximum à 25,000 CHF et seront payables normalement par la partie déboutée.
38. À cet égard, le juge unique a énoncé le fait que la requête de l’entraîneur est acceptée et a donc conclu que le club devra supporter les frais de la procédure en cours devant la FIFA. Conformément à l’Annexe A des Règles de Procédure, les frais de procédure sont fixés en fonction de la valeur litigieuse. Dans la requête initiée par l’entraîneur, la somme qu’il convient de considérer est supérieure à 200,000 CHF. En conséquence, le juge unique de la Commission du Statut du Joueur a conclu que le montant maximal des frais de procédure équivalait à 25,000 CHF.
39. Étant donné le différend en question et ses circonstances particulières, le juge unique de la Commission du Statut du Joueur a évalué les coûts de la procédure actuelle à 20,000 CHF, à la charge du club.
40. Le juge unique a conclu ses délibérations dans la présente affaire en établissant que toute autre demande formulée par l’entraîneur est rejetée.
III. DÉCISION DU JUGE UNIQUE DE LA COMMISSION DU STATUT DU JOUEUR
1. La demande du demandeur / défendeur-reconventionnel, Faouzi Benzarti, est admissible.
2. La demande du demandeur / défendeur-reconventionnel est acceptée.
3. Le défendeur / demandeur-reconventionnel, Wydad Athlétique Club, doit payer au demandeur / défendeur-reconventionnel, dans un délai de 30 jours à compter de la date de notification de la présente décision, le montant arriéré de 2,050,000 MAD, plus un intérêt jusqu’à la date de paiement, comme suit :
i. à hauteur de 5% par année à compter du 1ier juillet 2019 sur le montant de 250,000 MAD ;
ii. à hauteur de 5% par année à compter du 1ier mai 2019 sur le montant de 300,000 MAD ;
iii. à hauteur de 5% par année à compter du 27 janvier 2020 sur le montant de 1,000,000 MAD ;
iv. à hauteur de 5% par année à compter du 27 janvier 2020 sur le montant de 500,000 MAD.
4. La demande reconventionnelle du défendeur / demandeur-reconventionnel est rejetée.
5. Dans l’hypothèse où le montant susmentionné, plus intérêts, n’est pas réglé dans le délai imparti, le cas sera soumis, sur demande, à la Commission de Discipline de la FIFA pour considération et décision.
6. Les frais de procédure d’un montant de CHF 20,000 doivent être payés par le défendeur / demandeur-reconventionnel de la manière suivante :
6.1 Le défendeur / demandeur-reconventionnel ayant payé un montant de CHF 5,000 au titre d’avance de frais, seul un montant de CHF 10,000 doit être payé par le défendeur / demandeur-reconventionnel à la FIFA sur le compte bancaire suivant en mentionnant la référence du cas 20-00254/sil:
UBS Zurich
Numéro de compte 366.677.01U (Statut du Joueur de la FIFA)
N° Clearing 230
IBAN : CH27 0023 0230 3666 7701U
SWIFT : UBSWCHZH80A
6.2 Le montant de CHF 5,000 doit être payé au demandeur / défendeur-reconventionnel.
7. Le demandeur / défendeur-reconventionnel s’engage à communiquer au défendeur / demandeur-reconventionnel le numéro de compte bancaire sur lequel le défendeur / demandeur-reconventionnel devra verser le montant plus intérêts alloués aux points 3 et 6.2. De même, le demandeur / défendeur-reconventionnel s’engage à informer la Commission du Statut du Joueur de tous les paiements effectués par le défendeur / demandeur-reconventionnel.
Pour le juge unique de la Commission du Status du Joueur:
Emilio García Silvero
Directeur Juridique et Conformité
NOTE RELATIVE À LA PROCÉDURE D’APPEL:
Conformément à l’article 58 al. 1 des Statuts de la FIFA, la présente décision est susceptible d’appel devant le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) dans un délai de 21 jours à compter de la notification de la présente décision.
NOTE RELATIVE À LA PUBLICATION:
La FIFA est en droit de publier la présente décision. Pour des raisons de confidentialité, la FIFA peut décider, sur requête d’une partie formulée dans les cinq jours suivants la notification de la décision motive, de publier une version anonymisée ou éditée (cf. article 20 du Règlement de Procédure).
CONTACT:
Fédération Internationale de Football Association
FIFA-Strasse 20 P.O. Box 8044 Zurich Switzerland
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