F.I.F.A. – Dispute Resolution Chamber / Camera di Risoluzione delle Controversie – labour disputes / controversie di lavoro (2017-2018) – fifa.com – atto non ufficiale – Decision 15 février 2018

Décision de la
Chambre de Résolution des Litiges
ayant siégé à Zurich, Suisse, le 15 février 2018,
dans la composition suivante :
Thomas Grimm (Suisse), Vice-président
Eirik Monsen (Norvège), membre
Philippe Diallo (France), membre
dans l’affaire opposant le joueur,
Joueur A, Pays B
ci-après, le demandeur
au club,
Club C, Pays D
ci-après, le défendeur
concernant un litige contractuel survenu entre les parties
I. Faits
1. En date du 1 juillet 2015, le Joueur du Pays B, Joueur A (ci-après : le demandeur) prétend avoir signé avec le Club du Pays D, Club C (ci-après : le défendeur) un contrat de travail (ci-après : le contrat) valable du 1er juillet 2015 au 30 juin 2018.
2. Le prétendu contrat prévoyait que le demandeur était, inter alia, en droit de recevoir du défendeur les sommes suivantes :
a. 11,000 à titre de « salaire net mensuel, payable mensuellement en fin de mois » pour la durée du contrat ;
b. Une prime de match « dont le montant est fixé par le barème des primes du club » ;
c. Une prime annuelle de signature de 550,000 pour la saison sportive 2015-2016, payable en trois tranches (250,000 payable à la signature du contrat ; 150,000 payable à la fin du mois de janvier 2016 ; 150,000 payable à la fin du mois de juin 2016) ;
d. Une prime d’engagement de 550,000 pour la saison sportive 2016-2017, payable en trois tranches (250,000 payable au début du championnat de la saison sportive 2016-2017 ; 150,000 payable à la fin du mois de janvier 2017 ; 150,000 payable à la fin du mois de juin 2017) ;
e. Une prime d’engagement de 550,000 pour la saison sportive 2017-2018, payable en trois tranches (250,000 payable au début du championnat de la saison sportive 2017-2018 ; 150,000 payable à la fin du mois de janvier 2018 ; 150,000 payable à la fin du mois de juin 2018) ;
f. Une prime de championnat, « dont le montant et les critères d’exigibilité sont fixés par le barème des primes du club » ;
g. Une prime de Championnat E, « dont le montant et les critères d’exigibilité sont fixés par le barème des primes du club » ;
h. « loyer à la charge du Club C » ;
3. Le prétendu contrat ne contient aucune clause de compensation relative au cas de rupture de contrat.
4. Le 30 novembre 2015, le demandeur adressait au défendeur une « offre de règlement amiable » considérant qu’il « n’a à ce jour perçu aucun salaire » et qu’il ne bénéficiait pas « d’une licence lui permettant de participer au championnat d’élite du Pays D ».
5. Le 28 janvier 2016, le demandeur mis le défendeur en demeure du paiement de la somme totale de 1,488,000, correspondant au « reliquat prime de signature » à hauteur de 1,400,000 ainsi qu’aux « arriérés de salaires » à hauteur de 88,000. Le demandeur a imposé un délai de dix jours au défendeur pour payer ladite somme.
6. En date du 5 février 2016, le défendeur soutenait qu’il avait fait passer au demandeur des tests techniques et médicaux « en vue de son éventuel transfert » et « afin d’être intégré au sein de notre club » mais que ceux-ci se sont avérés non concluants. Le défendeur ajoutait que le demandeur « n’a pas fait partie de notre effectif actuel de joueurs » et enjoignait celui-ci à fournir le prétendu contrat original « pour plus d’éclaircissement sur cette situation ».
7. Après une nouvelle mise en demeure en date du 22 juillet 2016, le demandeur a notifié le 3 août 2016 le défendeur de la rupture unilatérale du prétendu contrat de travail.
8. Le 22 août 2016, le demandeur a déposé une plainte à l’encontre du défendeur devant la FIFA, aux fins de voir enjoindre le défendeur à lui régler la somme totale de EUR 805,760.82, ventilée comme suit :
a. EUR 129,212.22 (= 1,400,000) à titre de « reliquat de la prime d’engagement » ;
b. EUR 36,548.60 (= 396,000 soit 36 x 11,000) à titre de « Rémunérations exigibles durant toute la durée du contrat des parties » ;
c. EUR 40,000 à titre de « Frais divers exposés par le requérant (voyage et séjour à Ville F, courriers, frais de procédure et constitution d’Avocat etc.) » ;
d. EUR 600,000 à titre de « Compensation (dommages et intérêts) pour rupture abusive de contrat, mauvaise foi et résistance abusive du défendeur, souffrances et humiliations endurées par le demandeur » ;
9. Dans sa plainte, le demandeur affirmait que du fait de la réglementation de la Fédération de Football du Pays D pour la saison 2015-2016, laquelle n’autorisait que l’enregistrement de quatre joueurs étrangers, « le club s’est abstenu de solliciter l’homologation et l’enregistrement de son contrat de travail ». Le demandeur considérait également que le défendeur « n’a entrepris aucune démarche administrative pour l’octroi d’une carte de séjour au demandeur dont le visa court séjour obtenu a expiré depuis le 24 juillet 2015 ». Enfin, le demandeur affirmait que « seule la première tranche soit 250,000 a été payée » et qu’aucun salaire ne lui avait été versé.
10. En réponse à la plainte du demandeur, le défendeur affirmait n’avoir jamais signé de contrat de travail avec le demandeur et affirmait que « le contrat présenté par le demandeur est une photocopie ayant été certifié par le demandeur dans son pays et dont nous contestons la photocopie et l’authenticité du contrat ».
11. Le défendeur soulignait que le demandeur a subi des tests techniques et médicaux durant la période d’essai « qui s’est étalée depuis la fin de saison sportive 2014-2015 jusqu’à la fin du mois de juillet 2015 » mais que « le staff technique n’a pas été convaincu des capacités techniques et physiques du joueur ». De plus, le défendeur soulevait que le test médical préliminaire a notamment soulevé une anomalie au niveau de son bassin et qu’il « n’a pas été retenu par le club et a été avisé de sa situation avant le 10 juillet 2015 ».
12. De plus, le défendeur affirmait que le demandeur n’avait pas pris part au stage de préparation du défendeur entre le 5 et 15 août 2015 et qu’il n’était pas qualifié pour la saison sportive 2015-2016.
13. Enfin, le défendeur soulignait que le demandeur « n’a jamais reçu de montant relatif à la première tranche de la prime de signature du club pour la saison 2015-2016 ».
14. En date du 1er mars 2017, la FIFA enjoignait le demandeur à lui adresser l’original du contrat de travail prétendument signé par le demandeur et le défendeur.
15. En réponse à la demande de la FIFA, le demandeur affirmait que « tous les trois originaux du document intitulé ‘’contrat d’engagement de joueur professionnel’’ avaient été retenus après signature par l’administration du club soit disant pour être homologué par la Fédération de Football du Pays D ». Le demandeur affirmait également que les dirigeants du club s’étaient engagés à ne mettre un original du contrat à sa disposition qu’après homologation. Enfin, le demandeur soulignait que « ce n’est qu’après avoir constaté des semaines après que rien n’était fait que sur insistance de mon client, une photocopie couleur du contrat tel que signé lui a été remise ».
16. Dans sa réplique, le demandeur amenait au dossier « une nouvelle preuve » sous forme de vidéo « tournée par la Télévision du club et montrant les parties en train de procéder à la signature du contrat ». De plus, le demandeur soulevait l’art. 12 al. 1 des Règles de Procédure et « que fort de cette disposition, le concluant entend verser au dossier une vidéo confirmant que le contrat litigieux a bien été signé par les parties ».
17. Enfin, le demandeur contestait avoir été informé avant le 10 juillet 2015 de ses tests techniques et médicaux et affirmait n’avoir été informé qu’en date du 5 février 2016, après avoir passé « neuf mois sans salaires à Ville F alors que durant tout ce temps, il s’entrainait avec l’équipe ».
18. Après avoir été invité par la FIFA à fournir ses conclusions finales, le défendeur n’a pas répondu.
19. En réponse à la requête de la FIFA, le demandeur a indiqué qu’il avait signé un contrat de travail avec le Club du Pays B, Club G en date du 29 décembre 2016, valable du 1e avril 2017 au 30 novembre 2017 et prévoyant un salaire mensuel de 200,000 pour la durée du contrat.
II. Considérants de la Chambre de Résolution des Litiges
1. En premier lieu, la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après : la Chambre ou la CRL) a analysé si elle était compétente pour traiter le présent litige. A cet égard, elle a pris note que la présente demande a été soumise à la FIFA le 22 août 2016. Par conséquent, la CRL a conclu que l’édition 2015 du Règlement de la Commission du Statut du Joueur et de la Chambre de Résolution des Litiges (ci-après : les Règles de procédure) était applicable au présent litige (cf. art. 21 des Règles de procédure).
2. Par la suite, les membres de la Chambre se sont référés à l’art. 3 al. 1 des Règles de procédure et ont confirmé que, en application de l’art. 24 al. 1 et al. 2 ainsi que de l’art. 22 lit. (b) du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (édition 2016), la Chambre de Résolution des Litiges est l’organe décisionnel compétent pour connaître du présent litige, comportant une dimension internationale, qui concerne un litige relatif au travail entre un Joueur du Pays B et un Club du Pays D.
3. De plus, la CRL a analysé quelle édition du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (ci-après : le Règlement) est applicable quant au droit matériel. A cet égard, elle s’est référée, d’une part, à l’article 26 al. 1 et 2 du Règlement (édition 2016) et, d’autre part, au fait que la plainte ait été déposée auprès de la FIFA le 22 août 2016. Au vu de ce qui précède, la CRL a conclu que l’édition 2016 du Règlement est applicable au présent litige quant au droit matériel.
4. Par ailleurs, la CRL a tenu à souligner que contrairement aux informations contenues dans la lettre de la FIFA datée du 7 février 2018 par laquelle les parties étaient informées de la composition de la Chambre, M. Joseph Bell ainsi que M. Stéphane Burchkalter n’ont pas pris part aux délibérations dans la présente affaire et ce, d’une part, en raison du fait que M. Joseph Bell possède la même nationalité que le demandeur, et, d’autre part, pour respecter le principe de la représentation paritaire des joueurs et des clubs. En conséquence, et conformément à l’art. 24 al. 2 du Règlement, la CRL a décidé en présence de trois membres.
5. Une fois sa compétence et la réglementation applicable établies, la CRL a statué sur le fond du litige. Ce faisant, elle a tout d’abord rappelé les faits mentionnés ci-dessus et étudié la documentation apportée au dossier. Toutefois, la Chambre a souligné que dans les considérants qui suivent, elle ne se référera qu’aux faits, arguments et à la documentation pertinents pour l’analyse de la présente affaire. En particulier, la Chambre a rappelé qu’en application de l’art. 6 par. 3 de l’Annexe 3 du Règlement, la FIFA peut utiliser tout document ou toute preuve générés ou contenus dans le système de régulation des transferts (ci-après : TMS).
6. A cet égard, les membres de la CRL ont noté que le demandeur prétendait avoir signé en date du 1er juillet 2015 un contrat de travail avec le défendeur valable du 1er juillet 2015 au 30 juin 2018 et prévoyant, inter alia, une rémunération de 11,000 à titre de salaire mensuel net, une prime annuelle de signature de 550,000 pour la saison sportive 2015-2016, payable en trois tranches, une prime d’engagement de 550,000 pour la saison sportive 2016-2017, payable en trois tranches ainsi qu’une prime d’engagement de 550,000 pour la saison sportive 2017-2018, payable elle aussi en trois tranches.
7. Par ailleurs, la Chambre a également observé que le défendeur affirmait n’avoir jamais signé de contrat de travail avec le demandeur et contestait formellement l’authenticité de celui-ci. La Chambre a également noté que le défendeur affirmait avoir fait uniquement passer au demandeur des tests techniques et médicaux durant une période d’essai entre la fin de la saison sportive 2014-2015 jusqu’à la fin du mois de juillet 2015 en vue de son éventuel transfert mais que ceux-ci se sont avérés être non concluants.
8. Au vu des allégations et arguments présentés par chacune des parties, la Chambre a considéré qu’en l’espèce, il convenait d’établir dans un premier temps si les parties au présent litige avaient effectivement conclu un contrat de travail.
9. A ce stade, la Chambre a souhaité rappeler aux parties le principe de la charge de la preuve, tel qu’établi par l’art. 12 par. 3 des Règles de procédure, selon lequel la charge de la preuve incombe à la partie qui invoque un droit découlant d’un fait qu’elle allègue. En application de ce principe, la Chambre a noté qu’en l’espèce, la charge de la preuve incombe au demandeur, à qui il appartient dès lors d’établir l’existence d’un contrat de travail valide sur la base de laquelle une compensation pour rupture de contrat est demandée.
10. Dans ce contexte, la Chambre a observé que le défendeur affirmait n’avoir jamais signé de contrat avec le demandeur et a noté que celui-ci contestait formellement l’authenticité de la copie du contrat présentée par le demandeur au soutien de sa demande. De plus, la CRL a souligné que le demandeur n’avait, de son aveu, pas été en mesure de fournir l’original du contrat de travail prétendument conclu par les parties. Compte tenu des considérations qui précèdent, la Chambre a considéré que la copie du prétendu contrat de travail amenée au dossier par le demandeur ne constituait pas une preuve suffisante pour établir l’existence d’une relation juridique entre les parties.
11. La Chambre a toutefois examiné toute la documentation présentée par le demandeur pour prouver ses allégations quant à l’existence d’un contrat de travail.
12. A cet égard, la CRL a noté que le demandeur présentait au dossier une vidéo prétendument filmée par la télévision du club dans laquelle le demandeur était prétendument en train de procéder à la signature de son contrat. Dans ce contexte, la Chambre a considéré que l’existence du prétendu contrat de travail ne pouvait être déterminée avec certitude en prenant en compte uniquement la vidéo présentée par le demandeur.
13. En outre, et compte tenu des allégations du demandeur qui certifiait que « seule la première tranche soit 250,000 a été payée », la Chambre a souligné que le défendeur affirmait qu’aucun montant n’avait été payé au demandeur en vertu d’un prétendu contrat de travail signé entre les parties et que le demandeur, en fait, n’avait amené aucune preuve factuelle, telle qu’un relevé de compte bancaire, à l’appui de son argumentation qui aurait pu prouver que le demandeur avait effectivement reçu un montant de 250,000 de la part du défendeur.
14. De plus, la Chambre de Résolution des Litiges, en référence à l’art. 6 par. 3 de l’Annexe 3 du Règlement, a observé que le transfert du demandeur au club défendeur n’avait pas été enregistré dans le système TMS et que, par conséquent, le contrat de travail prétendument signé entre les parties n’était pas disponible dans ledit système.
15. Compte tenu du fait que le demandeur – face à l’allégation du défendeur de contrefaçon du contrat – n’a pas pu présenter à la FIFA l’original dudit contrat, la Chambre, tout en rappelant qu’elle apprécie les preuves selon sa libre appréciation, a considéré de manière unanime que les preuves présentées par le demandeur au soutien de sa demande étaient insuffisantes pour établir avec certitude l’existence d’un contrat de travail entre les parties.
16. En conséquence, et ayant à l’esprit les considérations qui précèdent et le fait qu’aucun original du contrat n’ait été amené au dossier, les membres de la CRL ont conclu que le demandeur n’a pas été en mesure de prouver l’existence du prétendu contrat de travail. Par conséquent, et considérant notamment que la demande du demandeur était basée uniquement sur ce prétendu contrat, la Chambre a décidé de rejeter la demande du demandeur.
III. Décision de la Chambre de Résolution des Litiges
1. La demande du demandeur, Joueur A, est rejetée.
*****
Note concernant la décision motivée (Voie de droit) :
Conformément à l’article 58 alinéa 1 des Statuts de la FIFA, cette décision est susceptible d’un appel au Tribunal Arbitral du Sport (TAS). L’appel devra être interjeté dans un délai de 21 jours à compter de la notification de la décision et devra comprendre tous les éléments figurant au point 2 des directives émanant du TAS, dont copie est jointe à la présente. L’appelant dispose de 10 jours supplémentaires à compter de l’expiration du délai de recours pour déposer son mémoire d’appel contenant une description des faits et des arguments légaux fondant le recours (cf. point 4 des directives annexées).
L'adresse complète du Tribunal Arbitral du Sport est la suivante :
Avenue de Beaumont 2, 1012 Lausanne, Suisse
Tél : +41 21 613 50 00
e-mail : info@tas-cas.org
Au nom de la
Chambre de Résolution des Litiges
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Omar Ongaro
Directeur de la sous-division
Réglementation du Football
Annexe : Directives du TAS
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